L'éloquence de l'acteur
Le talent n’attend pas le nombre des années...
Un problème récurrent se présente de plus en plus évident dans notre société de la vélocité et de l’image : c’est celui du jeune acteur qui après un début prometteur, se lance dans une carrière méritée. Fort de son talent, de ces capacités expressives, il met son talent au service de la société, de l’art et de la scène.
Au bout de quelques années ou de quelques mois seulement parfois, l’acteur sent l’inadéquation de sa voix, de son outil vocal et corporel avec ses besoins expressifs.
Rester sur scène pendant des heures est souvent de mise, les rôles s’enchaînent les personnages s’enchaînent aussi dans leurs disparités multiples.
Les besoins de diversité expressive se font de plus en plus pressant.
L’acteur trop souvent se retrouve seul face à lui même et souvent à un moment où toutes ses forces doivent être mobilisées vers le difficile défis de maintenir une performance expressive et scénique devant un public de plus en plus exigent et des critiques de plus en plus pointilleux et si peu fidèles au talent.
L’acteur est seul face à cela, toujours. Prenant tous les risques, c’est lui, seul qui prendra la décision de se tourner un moment vers lui-même, de faire une pause. Quelques instants suffisent très souvent. Instants cruciaux dans lesquels l’acteur se reconnaissant à lui même son propre talent se reconnait aussi dans ses limites.
Là commence le vrai chemin initiatique de l’acteur, là, acceptant la limite du talent il reçoit de lui même la grâce du « génie ». « Génie » qui non content d’être béni des Dieux transcende tel Leonardo da Vinci un art en une ingénierie complexe d’une efficacité parfaite, sublime.
Cela implique une part de travail technique que parfois le jeune Talent, par peur de changer, de perdre cette étincelle mystérieuse qu’il sait être en lui n’ose pas faire.
C’est pourtant une des seules « voies » et « voix » possible. Le métier d’acteur n’est pas pur talent, c’est une alchimie de prouesses expressives et d’heures de travail, de recherches et d’attentes, de mécanismes corporels et vocaux.
L’acteur doit être tout à la fois : sportif et artiste, tragédien et comédien, sans modestie aucune car le travail est titanesque et peu ont ce courage et cette témérité. L’acteur reste pourtant humble serviteur des arts.
Sabine Escalant