La guêpe et la bouteille

La guêpe et la bouteille

Vous avez observé cette abeille qui est entrée dans votre bouteille de soda cet été et qui a été incapable d’en sortir ? Bientôt elle est rejointe dans cet espace confiné par ses consœurs. Trois, quatre, bientôt 5 guêpes vrombissent désespérément. Si votre terrasse est calme, en fermant les yeux vous pouvez même entendre les chocs contre la paroi en verre de votre bouteille. Le piège s’est refermé sur cette petite colonie, vous ne comprenez pas comment elles ne pensent à sortir par l’espace où elles sont entrées. La colonie répète inlassablement le même vol infructueux qui l’empêche de trouver la sortie. Des vols dans tous les sens, en prenant à chaque fois le plus de vitesse que l’espace le permet.

Vous recevez cette guêpe en séance.

« quel est votre problème ? »

« après avoir butiné du sucre dans une bouteille je n’arrive plus à voler vers ma ruche »

« comment faites vous à votre avis pour ne pas y arriver »

« je m’épuise trop vite en tentant de passer à travers la paroi de la bouteille et je n’arrive jamais à retrouver l’air libre ».

Votre cliente va décrire sa frustration de ne pas pouvoir sortir de la bouteille et voler vers sa ruche, son objectif. Son problème n’est pas de ne pas être capable de sortir de la bouteille mais sa frustration de ne pas savoir comment faire, ayant déjà tenté toute les solutions.

Pour comprendre quel est le vrai problème de votre cliente vous lui demandez de décrire précisément ce qu’elle fait pour tenter de sortir et d’atteindre la ruche avec ses congénères sans y arriver.

« peux-tu décrire précisément les actions que tu mets en place pour tenter de sortir de là ? »

Elle vous décrit en experte ses multiples tentatives de solution, celles qu’elle imagine, et celles que ses congénères expertes elles aussi lui proposent : elle voit de la lumière autour d’elle, des formes qu’elle reconnait à quelques mètres, et elle se dirige tout droit pensant être à l’air libre. Mais à son grand étonnement, elle se heurte à chaque fois sur une matière invisible, elle ne comprend pas. Elle regarde dans une autre direction, tout aussi éclairée, vole aussi vigoureusement que possible et bute à nouveau contre une autre paroi. Elle tente un nouveau vol, avec plus de vigueur, elle tente des vols dans d’autres directions, jusqu’à la blessure et à l’épuisement.

En coach féru d’approche stratégique et lecteur assidu de Watzlawick vous allez tenter de lui faire abandonner son ancienne logique en lui faisant expérimenter des actions à 180° par le biais d’une prescription :

« lorsque vous vous trouverez dans votre prochaine bouteille, oubliez que vous êtes une guêpe et faites comme si vous étiez un ver de terre »

Pour votre cliente la seule solution repose sur le principe suivant : voler vers un espace éclairé de la lumière du jour est la meilleure solution pour aller ailleurs.

Au travers de la prescription vous souhaitez inverser les tentatives de solutions infructueuses : arrêter de voler, se poser, et commencer à marcher le long de cette matière qu’elle ne voit pas, mais qu’elle peut sentir, peu importe l’endroit où elle se pose dans la bouteille. Quelle que soit l’orientation que prendra sa marche, si elle accepte émotionnellement de prendre un chemin plus long, elle pourra trouver elle-même le chemin de la sortie.

L’école de Milwaukee de Steve de Shazer commence au début des années 1980 à orienter les thérapies familiales brèves vers des techniques de changement uniquement focalisées sur les solutions au travers des moments d’exception. Ces prédécesseurs en thérapie familiale, notamment l’équipe de Watzlawick, le Centre de Thérapie Brève du  Mental Research Institute – l’école de Palo Alto – avaient abordé les techniques de changement au travers du problème, dont une des portes théoriques était l’étude des tentatives infructueuses de solution.

Selon la définition établie par le centre LACT Research, en partenariat avec Circé :

« les tentatives de solution sont des actions de communication tentées de manière répétitive par la personne, son entourage ou sons système culturel pour résoudre une difficulté de vie avec soi, les autres ou le monde, sans y parvenir ; elles créent un problème qu’elles perpétuent et aggravent en maintenant la personne affectée et bloquée dans une perception restreinte de la situation. Ces actions ont été apprises et sont perçues comme cohérentes par le retour d’expérience »*

Ces tentative de solution ne sont pas toujours mises en place de manière délibérée, il arrive très souvent que les personnes les découvrent durant les séances. Les actions qui aggravent le problème au lieu de le résoudre sont dans la majorité des cas et par définition inconscientes.

« Lorsqu’il y a un problème humain récurrent, les solutions efficaces se trouve à 180° des tentatives de solution » Watzlawick

*cité in : Stratégies de changement – Grégoire Vitry – Erès éditions

𝐓𝐡𝐢𝐞𝐫𝐫𝐲 𝐌𝐚𝐮𝐬𝐬𝐢𝐨𝐧

Coach Pro Certifié | Accompagnement sur mesure pour des résultats concrets | Efficacité des équipes, organisations & managers | Développement personnel & performance | Mobilisation des compétences | Libérez vos talents !

1 ans

Merci Philippe, Je rejoins Nicolas dans son laïus. 😉 Belle journée

Merci pour la métaphore des guêpes et de la bouteille, c'est inspirant pour comprendre le principe systémique énoncé dans ton article...

Identifiez-vous pour afficher ou ajouter un commentaire

Autres pages consultées

Explorer les sujets