« Le chewing-gum intellectuel de l’attention partielle »
L’attention partielle nous morcelle
Cette image de « chewing-gum intellectuel » nous la devons au psychologue américain Tony Crabbe qui, dans son ouvrage Plus jamais débordé pointe avec humour les nombreuses distractions auxquelles nous sommes sans cesse soumis. Ces distractions, et en premier lieu l’arsenal technologique, rendent quasiment impossible une attention pleine et ouverte.
Pour exemple, alors que le smartphone devrait nous aider à nous connecter aux autres et au monde, il nous entraîne à désinvestir les relations directes que nous pourrions avoir au profit de relations virtuelles. Au lieu de voir le monde devant nous, nous pensons l’avoir dans notre poche. Aujourd’hui dans le métro, dans le train, à la queue du supermarché, dans la rue, on ne se rencontre plus, chacun rivé à son téléphone. Cela nous donne une contenance parfois, nous évite l’ennui souvent, mais nous exile de l’endroit où nous sommes.
Nous devenons les kidnappés de l’instant présent !
Au fond, nous ne sommes ni là, ni ailleurs.
Nous restons la plupart du temps dans un entre-deux, flou et mouvant, qui ne nous permet plus de nous engager dans une conversation, une réunion ou un travail.
Notre attention est partielle. Elle vagabonde d’une idée à l’autre, d’une personne à l’autre, d’une envie à l’autre, sans jamais en choisir une pour de bon.
Nous nous retrouvons comme morcelé, coupé en différentes parties que nous avons du mal à rassembler.
Bref, nous nous perdons de vue nous-même jusqu’à ne plus savoir vraiment qui nous sommes. Nous nous désincarnons au profit d’images conceptualisées de nous-mêmes.
Loin d’être anodin, ce problème d’attention partielle est source de frustrations, de mécompréhensions, de souffrances.
La pleine attention nous restaure
Prendre un moment pour nous poser, pour de bon, là où nous sommes et tels que nous sommes est un puissant entraînement à retrouver le chemin d’une pleine attention. La voie d’une présence véritable, qui de nouveau nous fait sentir vivant, légitime, à notre place.
C’est surprenant : s’asseoir et ne rien faire quelques minutes, sans bouger, sans parler. À priori cela peut sembler ennuyeux. C’est pourtant bien ce que faisaient les anciens après une bonne journée de labeur. Ils ne se mettaient pas devant la TV ou l’ordinateur, mais plutôt au coin du feu ou à la porte de la maison, sans parler, sans bouger…
Mais pourquoi ferions-nous de même ? Pour re-synchroniser notre corps (grand oublié) et notre esprit (grand inconnu).
Pour nous accorder au souffle (combien de fois avez-vous respirer aujourd’hui ?), pour retrouver le goût des perceptions sensorielles.
Pour retrouver la puissante vitalité qui est en nous et qui ne passe pas que par la tête !
Pour prêter une pleine attention aux petites choses qui ouvrent aux grands moments.
Si vous regardez pour de bon votre enfant, vous allez le voir. Si vous le voyez pour de bon, vous allez avoir envie d’être pleinement présent pour lui, pas de manière partielle en même temps que vous régler un problème de boulot ou que vous appelez le plombier.
Si vous participez pour de bon à une réunion, en étant pleinement présent à ce qui se dit, peut-être allez-vous gagner en acuité et en déduction stratégique…
Si vous dites un vrai bonjour à votre boulangère, peut-être cela va-t-il embellir votre matinée.
Développer une pleine attention
La méditation est précisément cet entraînement à développer une pleine attention. À chaque fois qu’on y pense dans la journée, où que l’on soit et quoi que l’on fasse. Y compris dans les transports en commun ou chez le dentiste (j’en ai fait l’expérience, j’ai moins mal en étant présente à ce qui se passe plutôt qu’en faisant semblant d’être ailleurs !)
En acceptant de nous arrêter quelques minutes par jour, nous prenons soin de notre présence corporelle, nous réapprenons à habiter notre corps. Nous prenons soin de nous, de notre souffle, de nos pensées, de nos perceptions. Nous développons une intelligence pleine de sensations et de sensibilité, qui n’a plus peur d’être en rapport au monde.
Nous découvrons que la vraie vie n’est pas ailleurs. Qu’elle est là, juste devant nous, pour peu qu’on lui prête… une pleine attention.
Extrait d'une tribune écrite à l'occasion de la récente sortie de mon troisième ouvrage Vive la méditation.
Auteure, conférencière et présidente de l'agence Cattoire Relation Presse
7 ansMerci d'avoir partagé Tony, bonne semaine.
Auteure, conférencière et présidente de l'agence Cattoire Relation Presse
7 ansMerci pour le partage et bonne semaine.