Le manager, clé du profit durable?
Lorsqu'une entreprise investit 2 millions d'euros pour développer son business pour 40 ans, c'est un évènement important. Un pari sur l'avenir, fondé sur la certitude qu'il va permettre de générer davantage de bénéfices et que, in fine, l'entreprise sera renforcée dans son activité.
Des coûts d'entretien et de maintenance (charges) s'additionnent à cet important effort initial, parce que l'intérêt du dirigeant est que son investissement initial soit toujours parfaitement entretenu pour donner son meilleur rendement au service de l'entreprise.
Mais qu'est-ce que l'embauche d'un jeune en CDI, si ce n'est précisément un investissement de 40 annuités de 50000 euros? En France, où l'on connait toute la difficulté de mettre un terme à ce contrat en cas de résultats non satisfaisants, cette foutue lettre "I" effraie nombre de chefs d'entreprises, frileux de s'engager sur une période de 40 ans sans certitude de ne pas avoir à le regretter.
Pourtant quand la décision d'embaucher est arrêtée, le dirigeant prend souvent grand soin de mettre tous les atouts de son côté: description de poste ambitieuse, recherche de la perle rare, organisation de rencontres, d'entretiens d'embauches, de tests... il recourt à l'intérim pour mieux réaliser les compétences réelles du candidat, ou il choisit la réputation d'un conseil en recrutement pour essayer de gommer ses dernières inquiétudes... Bref, tout est fait pour que le choix de l'investissement initial soit parfaitement judicieux au temps T0. Bravo!
Et l'embauche a lieu. L'investissement de 2 millions d'euros sur 40 ans est débloqué. Génial. Fin de l'histoire?
On pourrait le croire, en constatant le peu de soin apporté à la "maintenance" de cet investissement dans plusieurs entreprises, surtout depuis la crise récente de 2008. Soucieux de maintenir à flot leur entreprise dans cette période de vaches maigres, pressés par des actionnaires qui ne veulent pas entendre parler de crise dans leurs dividendes, les dirigeants ont pris des mesures "choc et spot" pour obtenir des résultats chiffrés et immédiats: réduction des budgets, donc des moyens, pression sur l'encadrement, donc sur les salariés, report des actions de formation du personnel, donc du développement de leurs compétences... Et pour aller plus vite, pour un résultat "tout de suite", on a trop souvent oublié de justifier, d'expliquer, de partager. Les managers de terrain ont été contraints de faire plus avec moins, de faire aussi bien sans être associés aux décisions, sans trop d'explications ni de contre-parties... Pas le temps, il faut survivre, on verra plus tard... 2009, 2010, 2011, 2012, 2013, 2014, 2015, 2016... " Dis papa, c'est quand, plus tard?" me demandait mon fils à 4 ans...
On n'en sait rien... On ne voit plus loin devant. La vision de l'entreprise, celle qui donne un horizon à toute personne qui veut s'investir dans son travail, celle qui constitue un ancrage de valeurs indispensables aux managers opérationnels, celle qui rassure les salariés, cette vision s'est arrêtée sur la poussière de craie d'un tableau noir et inquiétant. Où va t'on? Comment y va t'on? Quelle est ma place dans l'entreprise?
Revenons aux fondamentaux! Si l'acte de recrutement est important pour trouver "le" bon candidat, l'accompagnement et le bon management du salarié sont essentiels. Pour impulser en lui l'envie d'être au top, de donner le meilleur de ce qu'il sait faire, et même de ce qu'il peut faire. Pour lui permettre d'avoir confiance en son entreprise, confiance en son chef, confiance en lui-même. Et donc d'être plus performant... et plus heureux. La bienveillance du management permet l'exigence sur les résultats attendus, mais l'exigence seule ne suffit plus à créer les conditions d'un succès durable.
Il est temps que les ressources humaines de l'entreprise (je ne parle pas de la direction RH) soient à nouveau considérées comme le plus formidable gisement de progrès des résultats de l'entreprise. L'homme est capable de surprendre par sa créativité, de se surprendre par le plaisir qu'il peut (re)trouver dans son travail. Il lui faut une impulsion, un signe fort que le temps des sacrifices inexpliqués (et donc incompris) est terminé. Il a besoin d'un horizon à nouveau bien dessiné, d'une vision d'entreprise ambitieuse, claire et stable. Et son manager a besoin d'être libéré du tableau noir des objectifs à 3 mois qui sont effacés et changés d'un coup de brosse... tous les 3 mois.
L'embauche d'un salarié, c'est un investissement de 2 millions d'euros. Le prix d'une somptueuse voiture. Alors, juste une question: Qui achèterait une superbe Lamborghini ou autre Bugatti de 2 millions d'euros pour en confier la conduite à un chauffeur qui n'est ni serein, ni en confiance? Surtout s'il hésite sur la route à prendre?
Le chauffeur, c'est le manager! Investissez sur lui! Il détient une clé essentielle des performances durables de votre entreprise. Car c'est celui qui va conduire ses salariés pour les amener, avec exigence et bienveillance, à donner jour après jour le meilleur d'eux-même pour le bien de votre entreprise.