Les Charybde et Scylla de nos économies.
Le ré-assureur Swiss Ré estime que le coût des catastrophes environnementales est passé de 188 milliards de dollars en 2016 à 306 milliards en 2017 dont 136 milliards pris en charge par les compagnies d’assurance (Contre 65 milliards en 2016). Cette explosion ne sera pas sans conséquence sur l’économie mondiale. Il est bien sûr trop tôt pour faire une projection de ce qui nous attend dans les années à venir et pour savoir si cette augmentation se poursuivra. Elle est néanmoins extrêmement inquiétante car elle pourrait, à terme, bloquer l’économie mondiale.
En effet il faut noter que si le montant des dégâts a augmenté de 62 %, celui des remboursements a cru de 110%. Deux facteurs à cela: Des épisodes climatiques extrêmes touchant massivement les États-Unis où il y a plus de biens et de personnes assurés mais aussi une augmentation importante de ces phénomènes. Les conséquences sont telles que Swiss Re sera dans le rouge en 2017, avec une perte nette de 468 millions $ (402,5 M€) sur les 9 premiers mois de l’année.
Les assureurs ne sont pas en reste et ils doivent répondre aux demandes de leurs clients. Qu’adviendra-t-il pour l’avenir? Il semble impossible que les compagnies d’assurances et de réassurances puissent vivre avec une telle épée de Damocles au-dessus de leur tête. Elles devront donc composer avec cet élément pour revoir les couvertures dans le futur. Ce qui, de facto, va rendre plus périlleuses un certain nombre d’activités. Les clauses limitatives seront sans nul doute renforcées. En effet pourquoi couvrir « comme avant » une installation industrielle devenue à risque avec l’augmentation des feux de forêts en Californie ou risquant d’être inondée avec la montée des eaux?
S’il est donc un secteur qui prend particulièrement au sérieux les conséquences du dérèglement climatique, c’est bien celui de l’assurance et de la réassurance. Leur survie en dépend. Mais la conséquence de ces choix aura aussi un impact sur leurs investissements. Peuvent-ils prendre autant de risques dans le choix de leurs placements qu’autrefois et voir malheureusement se conjuguer une crise financière comme celle de 2008 et une crise écologique comme celle de 2017?
Là est sans doute le risque systémique majeur pour l’économie monde. Un excès d’optimisme dans une croissance à court terme débouchant sur une bulle financière dangereuse qui crèverait la mauvaise année, celle où des phénomènes extrêmes entraîneraient une hausse importante des remboursements. Alors, tel Ulysse, nous passerions de Charybde en Scylla.
Hervé Naillon
source:
https://www.tdg.ch/economie/catastrophes-coute-306-milliards-dollars/story/25643856