Les freins culturels à l’innovation dans l’administration publique : spécificités helvétiques

L’innovation publique est un moyen organisé et délibéré de s’adapter aux mutations économiques, sociales et technologiques de la société. Son objectif est de produire un service de qualité et permet de présenter une posture dynamique de son organisation.

Quels traits particuliers à la culture suisse ? Le pragmatisme, la prudence et la recherche du consensus, ou la collégialité et le principe de concordance. Quelles différences entre les freins culturels constatés en suisse et ceux de la littérature internationale ?

Comment définir l’innovation publique ? Les définitions sont légions pour l’innovation dans le secteur privé, mais encore peu présentes dans la littérature. Dépend-elle de la perception de l’organisation, de l’usager concerné ? Une amélioration continue ou une rupture avec le passé ?

Qu’est-ce qu’un antécédent de l’innovation publique ? Un antécédent est un élément neutre qui agit sur l’innovation. Il peut être environnemental (au d’un milieu organisé), organisationnel ou individuel.

Les antécédents agissent comme freins ou leviers à l’innovation. Les auteurs avancent deux « freins universels » présent dans la littérature internationale : l’écosystème administratif (réseaux, réglementations, hiérarchie…) et  culturel (prise de risque, ouverture d’esprit…).

L’article s’attache donc à préciser dans quelle mesure la culture suisse peut-être un frein à l’innovation. « La culture est souvent définie comme l’ensemble des valeurs, normes, comportements, règles et symboles que partagent un groupe social spécifique. »

Voici les freins culturels considérés que les auteurs présentent comme « universels », basés sur une vingtaine d’articles, que je vais me contenter de lister mais que je vous invite à parcourir : l’aversion aux risques, peu de place à l’apprentissage, faible ouverture aux nouvelles idées, rigidité horizontale (silo), rigidité verticale, faible valorisation du succès et sanction négative de l’échec, orientation performance court-termiste.

Les auteurs croisent cette revue de littérature internationale avec une revue de littérature ciblant spécifiquement la culture helvétique que je liste ici également : distance de pouvoir forte, grande aversion à l’incertitude, individualisme relativement fort, une forte « masculinité » (référence à un concept universitaire développé par Hofstede sur l’interculturalité), et le sens du compromis.

Quels résultats de l’enquête ? Sur la base de 15 entretiens semi-directifs de cadres, les chercheurs listent 28 freins dont la moitié relèvent de freins culturels. Quels sont les points communs ?

Les suisses suivent une tendance globale de la peur du risque ; de la sanction de l’échec ; de la dépendance à la routine, qui crée un carcan normatif auquel il est difficile d’échapper, et de facto, bride l’apprentissage et l’ouverture à des idées nouvelles ; de la rigidité verticale peu encline à l’autonomie des agents.

Il est intéressant de constater que des freins évoqués dans la revue de littérature internationale n’apparaissent pas dans les entretiens, comme la rigidité horizontale, qui confirme l’hypothèse initiale d’une propension suisse à la collaboration.

Enfin, de nouveaux freins n’apparaissent pas dans la revue internationale et semblerait indiquer une spécificité suisse : la recherche du consensus et la volonté de discrétion et d’anonymat, le premier freinant l’innovation et le second l’impulsion du projet.

En somme, le frein le plus important à la fois présent dans la culture suisse et la culture administrative est l’aversion au risque, potentiellement présent chez les agents ou les usagers eux-mêmes. 


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