Management par la confiance et management bienveillant sont-il synonymes ?

Est-ce la confiance que l’on donne ?

La confiance que l’on reçoit ?

La confiance que l’on se donne à soi-même ?

Et si le ruissèlement de la confiance permettait de faire entrer l’entreprise dans un cercle vertueux de performance ?

Cet interview de Patrick Vieira par Anthony Clément et Régis Testelin, dans le quotidien L’Equipe du 16 Décembre, aurait pu parfaitement me servir de support pour un atelier sur la confiance que j’ai animé récemment.

Dans ces ateliers, je fais par exemple, réagir les équipes sur leur fonctionnement en leur proposant d’échanger sur ce que les citations issues du monde du sport leur évoquent de leur quotidien. Cette façon décadrante d’aborder leurs problématiques libère leur parole dans le cadre protecteur que mon coaching propose.

A partir de leurs prises de conscience et des améliorations que proposent les participants, un plan d’action est bâti suivi d’un engagement individuel et collectif.

Et si vous vous prêtiez au jeu ?

Patrick Vieira a été choisi en juillet 2018 pour entraîner l’OGC Nice pour 3 ans. Il a été Champion du Monde de Football 1998 en même temps que d’autres joueurs devenus entraîneur-stars : Didier Deschamps, Zinedine Zidane ou Laurent Blanc.

« L’objectif est de continuer à grandir, estime le président de l’OGC Nice Jean-Pierre Rivère. L’arrivée de Patrick permettra de franchir ces étapes. C’est exactement ce que l’on cherche. » Le nouvel entraîneur de l’OGC Nice, tout droit venu du New York FC, veut donc s’inscrire dans la continuité. Et compter sur les jeunes formés au centre de formation. « Ça fait partie du projet. Ça sera d’intégrer des jeunes, de leur donner la chance de joueur dans l’équipe première. C’est important et c’est l’image du club. » (Source : 20 minutes – 11 juin 2018).

Le Président fait confiance au nouvel entraîneur pour s’inscrire dans la continuité de la progression de l’équipe tout en donnant du temps de jeu dans l’équipe première aux jeunes issus du centre de formation.

Pourriez-vous dire que la confiance ruissèle par effet systémique de la Direction à l’entraîneur ?

Patrick Vieira : « Quand je suis arrivé, je n’avais pas d’expérience d’entraîneur dans un grand Championnat Européen, mes prédécesseurs, Claude Puel et Lucien Favre, avaient bien travaillés avant moi. Le Club s’engageait dans une période avec des points d’interrogation. Les gens ne savaient pas comment cela allait se passer, mais ils étaient contents ».

Patrick Vieira a fait confiance au travail de ses prédécesseurs en posant un regard d’étonnement positif sur les potentiels de l’équipe. La Direction a fait confiance à Patrick Vieira pour entraîner l’OGC Nice en misant sur son potentiel alors qu’il n’a pas d’expérience à ce niveau.

ETAPE 1 :

Confiance réciproque entre la Présidence et le manager sur un objectif et une vision commune dans la continuité de ce qui a été fait précédemment.

 La confiance peut-elle résister aux aléas d’une saison ? Patrick Vieira répond : « Quand tu perds 4-0 à domicile contre Dijon le 25 Août, le lendemain tu viens au bureau, tu ne sais pas la tête qu’auront les gens, mais quelqu’un te dit dans un couloir : « On est là, quoiqu’il arrive » ou « Coach, ne vous inquiétez pas, ça ira mieux demain ». Il y a toujours un petit mot sympa qui te rebooste ».

ETATPE 2 :

La réciprocité de la confiance permet de poser un cadre protecteur de cohésion entre la Direction, le staff technique et les opérationnels ce qui permet de supporter les déconvenues pour plus vite se remotiver.

Le 31 Août, une semaine après, l’OGC Nice gagne 1-0 contre Lyon… Patrick Vieira : « Ce match a donné beaucoup de confiance aux joueurs, au staff et à moi, même si on a souffert. Mais on avait besoin de chance pour gagner la confiance. »

Pour Philippe Gabillet, Professeur de leadership à l’ESCP Europe, la chance est une compétence et dans ce cas, pouvons-nous dire que c’est la confiance en ruisselant de la Direction jusqu’aux joueurs qui a généré l’opportunité de la chance de cette victoire ?

Confiance + Plaisir sont-ils à la source de la performance durable en équipe ?

Patrick Vieira : « Je veux voir l’équipe développer du jeu, se créer des occases, que les mecs prennent du plaisir. Il y a eu des moments où ils n’en ont pas pris mais on a gagné. Je savais que cela ne suffisait pas et, aujourd’hui, si on fait le bilan du jeu produit, c’est moyen ». « Tu peux obtenir les résultats que tu veux en jouant un jeu agréable ».

ETAPE 3 :

Et si la confiance permettait de développer du beau jeu, qui lui-même apporterait du plaisir, du succès et… de la confiance ?

En entreprise cette confiance permet de rentrer dans le cercle vertueux de la réussite : elle engendre la cohésion de l’équipe, la concentration de l’énergie du groupe sur la réussite d’objectifs communs, l’engagement de chacun dans le collectif qui lui-même va influer sur la performance individuelle par effet systémique.

Les émotions peuvent-elles troubler la confiance ?

Le journaliste demande : « Que faites-vous des attitudes capricieuses de certains joueurs comme Mario Balotelli ou Alban Saint-Maximin ? »

(Pour mémoire, Mario Balotelli et Patrick Vieira ont joué ensemble pendant quatre saisons consécutives à l’Inter Milan entre 2007 et 2010).

Dans ce passage, il est question du changement de posture de joueur à entraîneur et du changement de mode de communication qu’elle engendre.

 Patrick Vieira : « Il ne faut pas que je ne fasse pas jouer un mec parce qu’il me gonfle… Si je pensais à ma rancune personnelle, certains ne joueraient plus et ce serait un problème pour l’équipe. Il faut que je mette cela de côté pour aider le groupe… » 

« Mario, j’ai envie de lui répondre et de le coller au mur ou au porte-manteau ! Mais je ne suis plus joueur. Je dois toujours réfléchir à deux fois avant de dire quelque chose car cela peut avoir un impact, je risque de perdre un joueur et de le regretter. J’essaie d’être constructif. »

ETAPE 4 :

Comment remettre un collaborateur dans le sens de la marche sans altérer sa confiance dans le staff et avec ses équipiers ? Comment trouver la juste posture, celle qui permet d’aligner qui l’on est, ce que le poste nous demande et les moyens que l’on va utiliser pour le faire… en toute confiance ? Quelles sont les conditions de réussite de ce triptyque ?

« On a tous nos émotions, il faut un peu de recul pour prendre la bonne décision… Peut-être aussi que mon message avec eux n’est pas toujours clair. ».

« Quand Mario Balotelli ne marque pas de buts, comme il doute, l’important est d’avoir confiance en lui. »

« La dimension psychologique c’est aussi important que la tactique ou le physique. Je dois expliquer les choses car si les mecs ne comprennent pas, soit ils se braquent, soit ils pensent que c’est contre eux et cela veut dire que tu les perds ».

Ici Patrick Vieira doute de la clarté de sa communication et… certains joueurs doutent de leur compréhension, se mettent à résister, et parfois à perdre confiance…

Comment redonner confiance au groupe en se remettant en question « tout seul » ?

Que pourriez-vous proposer d’autre en entreprise ?

Pour finir, le journaliste interroge Patrick Vieira sur le bilan de ses premiers mois :

« J’ai été moyen… Se rendre compte que cela ne va pas et s’adapter, c’est toujours bien… Après je n’ai pas encore réussi à tirer le maximum des joueurs en difficulté, à leur donner confiance. »

« Dans ce Club, c’est top, je suis protégé, des gens disent « non » pour moi quand je ne veux pas parler aux médias. L’important était de me concentrer sur mon métier ».

A la question, qu’est-ce qui vous fera dire que vous aurez réussi, Patrick Vieira répond : « Au-delà du classement, je me demanderai si j’ai réussi à tirer le maximum de mes attaquants, si j’ai bien fait de changer de système de jeu ».

Diriez-vous que par effet systémique, les doutes de Patrick Vieira, créent une résistance chez les joueurs qui elle-même influe sur leur confiance et les résultats de toute l’équipe ?

Se concentrer sur son métier est-il synonyme pour vous de s’isoler et de décider seul ?

Pour moi, le ruissèlement vertueux de la confiance n’a pas encore atteint suffisamment Patrick Vieira dans sa façon de manager son équipe.

Quand il nous confie sa façon de « réfléchir » à deux fois avant de parler, la manière dont il prend sur lui pour « recadrer gentiment » ses joueurs récalcitrants, sa lutte contre ses émotions, la patience qu’il doit mettre en œuvre, etc.

Il n’incarne pas encore pleinement son rôle d’entraîneur, son passé de joueur est encore très sous-jacent. Et dans toutes ses réflexions, il semble bien seul…

Et vous, combien de temps vous a pris votre changement de posture managériale ?

Quelles en sont pour vous les conditions de réussite ?

Sur qui vous êtes-vous appuyé pour la réaliser en confiance ?

Vous a-t-on proposé un coaching professionnel pour accompagner votre changement de posture que l’on sait si influent sur les performances de votre équipe ?

Plus globalement, à l’issue de la lecture de cet article, pensez-vous que le management par la confiance est synonyme de management bienveillant ?