Non, un enfant de 8 ans n’a pas déjà consommé plus de sucre que son grand-père !
Les idées fausses n’épargnent pas le sucre et l’une d’entre elles a ressurgi récemment, à l’occasion des débats sur de nouvelles pistes de taxation visant les produits sucrés.
Ainsi, on entend dire qu’« un enfant de 8 ans aurait déjà consommé plus de sucre que son grand-père au cours de toute sa vie ».
L’image est saisissante mais elle n’est étayée par rien de concret. J’ai beau chercher, je ne trouve pas de publication référencée et il n’y a aucun chiffre précis venant de ceux qui reprennent l’affirmation à leur compte.
Un grand père ayant 70 ans aujourd'hui est né dans les années 50, époque pour laquelle nous ne disposons pas de données précises issues d’enquêtes individuelles. On peut toutefois y voir plus clair dans les tendances des consommations grâce aux données de disponibilités alimentaires.
Exprimée en kg/habitant/an, la disponibilité en sucre (ventes totales divisées par le nombre d’habitants) a augmenté en France à partir des années 1950 jusqu’aux années 70, puis a diminué et s’est stabilisée depuis les années 80 vers 35 kg/habitant/an. La disponibilité en sucre est donc stable depuis plus de 40 ans (source France Agrimer).
Pour avoir des données plus précises sur la consommation réelle, il faut regarder les données des enquêtes de l'ANSES qui existent depuis une vingtaine d'années.
Que nous disent ces enquêtes selon les classes d’âge ? Les sucres totaux (incluant les sucres ajoutés dont LE sucre blanc) révèlent des apports moyens en France de 75 g/j pour les 18-79 ans, ceux des enfants de 3 à 10 ans sont de 78 g/j, dont les 2/3 sous forme de sucres ajoutés (ANSES, 2016, Etablissement de recommandations d’apport en sucres)
Les valeurs moyennes sont quasi égales et, c’est une constante connue, les apports en sucres augmentent en valeur absolue jusqu’à l’adolescence puis diminuent avec l’âge. Enfin, ces apports en sucres sont stables depuis les premières enquêtes nationales.
En résumé, si l'on considère que la consommation moyenne du grand père a été stable depuis 40 ans, avec une consommation qui a augmenté progressivement les 30 premières années, cela indiquerait qu'il a consommé aujourd’hui 7 ou 8 fois PLUS que son petit-fils de 8 ans.
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En admettant qu’il y a confusion sur le terme "sucre" et que l’on cherche à parler de produits sucrés, il est clair que nous consommons aujourd’hui plus de produits sucrés préparés qu’il y a 60 ou 70 ans, sous une forme différente, avec moins de produits sucrés fait maison et plus de consommations hors domicile et d’achats de produits préparés. Mais il est certain que les ventes totales de sucre divisées par la population française sont globalement stables sur la période, stabilité confirmée par les enquêtes alimentaires nationales depuis plus de 20 ans.
Si la comparaison entre l’enfant de 8 ans et son grand père a pour but de « prouver » que nos consommations de sucre ont explosé et que c’était mieux avant, c’est bien mince et surtout c’est faux !
Il est très clair en revanche que l’Anses recommande d’éviter les excès d’apports en sucres. L'agence invite à ne pas consommer plus de 100 g/j de sucres hors lactose pour les adultes (20 à 30% dépassent ces apports), et moins de 75 g/j pour les enfants de 8 à 12 ans (ce que la majorité d’entre eux, 60%, dépassent).
Pourquoi alors ces reprises nombreuses sans vérification ? Biais de confirmation, exposition répétée du message, contenu émotionnel, besoin d’alerter avec le sempiternel « savez-vous que... », vitesse de circulation d’infox, il y a de multiples raisons au succès de de cette formule.
Rappelons que les acteurs de la filière betterave-sucre prônent une consommation raisonnée de sucre, il faudrait retrouver un peu de raison également dans les discours sur le sucre.
CGB - Confédération Générale des Planteurs de Betteraves Cristal Union Saint Louis Sucre TEREOS Sucrerie Lesaffre SUCRERIE ET DISTILLERIE DE SOUPPES OUVRÉ FILS S.A. Cultures Sucre
Président et Directeur général du Syndicat National des Fabricants de Sucre de France (SNFS) My own views expressed here
1 moisIl faut en vouloir non pas à ceux qui, peu nombreux, répandent des énormités sur les canaux officiels, mais à ceux qui, bien plus nombreux, les gobent sans réfléchir. A moins que tous soient à plaindre d'être victimes d'un déficit d'instruction scolaire élémentaire... Une simple règle de trois conduit à traduire cette affirmation de la manière suivante : "un enfant de 8 ans a consommé près de 220 kg de sucre par an" (et encore, pour un grand-père de seulement 70 ans). Comment peut-on diffuser de telles âneries ??