Nullité de l’adjudication des actions non libérées
Est nulle, une adjudication des actions non libérées effectuée en violation des formalités prescrites par les articles 775 et 776 de l’Acte uniforme OHADA relatif au droit des sociétés commerciales et du GIE.
Dans son arrêt n°146/2018 du 07 juin 2018, (l’affaire Société Valeur Plus Sénégal c/Mohamed NDIR), la CCJA rejette les moyens du pourvoi en soulignant que contrairement aux allégations du moyen, il ressort des énonciations de l’arrêt déféré qu’au regard des pièces soumises à l’appréciation de la Cour d’appel, aucune des formalités prescrites par les articles 775 et 776 n’a été respectée ; que tirant les conséquences de cette constatation souveraine, la Cour d’appel a justement retenu que « cette violation des dispositions d’ordre public justifiait l’annulation du procès-verbal d’adjudication du 15 mai 2006 » ; qu’en statuant ainsi, elle n’a en rien violé les articles susmentionnés.
En substance, la Cour se fonde sur deux arguments juridiques majeurs pour rejeter le moyen du pourvoi.
1) La violation des formalités d’ordre public prescrites par les articles 775 et 776 de l’acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du GIE
Dans un premier temps, elle met en exergue le fait que la Société Valeur Plus Sénégal n’ait pas respecté les formalités de vente des actions non libérées prévues par les dispositions des articles 775 et 776 de l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du GIE.
Suivant l’article 775 de l’Acte uniforme précité, en cas de défaillance de l’actionnaire, la société est tenue d’adresser à l’actionnaire défaillant une mise en demeure par lettre au porteur contre récépissé ou par lettre recommandée avec demande d’avis de réception.
Un (01) mois après cette mise en demeure restée sans effet, la société poursuit de sa propre initiative la vente des actions non libérées. Dans ce délai, les droits politiques et financiers de l’actionnaire défaillant sont suspendus jusqu’au complet paiement des sommes dues.
Pour la procédure de vente des actions, l’article 776 de l’Acte uniforme précité distingue selon que les actions sont ou non cotées en bourse. Dans le premier cas, la vente s’effectue en bourse. Dans le second cas qui concerne les actions non cotées en bourse, la vente est effectuée aux enchères publiques par un notaire.
Toutefois, avant de procéder à la vente, la société doit publier dans un journal habilité à recevoir les annonces légales, trente (30) jours à compter de la mise en demeure, les numéros des actions mises en vente. Elle avise également le débiteur et le cas échéant ses codébiteurs, de la mise en vente par lettre au porteur contre récépissé ou par lettre recommandée avec accusé de réception contenant l’indication de la date et du numéro de journal dans lequel la publication a été effectuée.
A noter qu’il ne peut être procédé à la mise en vente des actions non libérées moins de quinze (15) jours, après l’envoi de la lettre au porteur contre récépissé ou de la lettre recommandée avec accusé de réception.
La Cour souligne également que ces formalités prescrites par les dispositions précitées ont un caractère d’ordre public. Par conséquent, leur non-respect emporte l’annulation de l’adjudication.
2) L’affirmation du pouvoir souverain d’appréciation du juge de fond
Dans sa décision, la Cour relève que le juge du fond est souverain dans l’appréciation des pièces qui lui sont soumises. C’est d’ailleurs pourquoi elle rejette les allégations du moyen selon lesquelles les formalités prescrites par les articles 775 et 776 de l’Acte uniforme précité ont été respectées, à travers notamment la mise en demeure adressée à l’actionnaire défaillant, l’annonce de la vente dans un journal d’annonces légales. La Cour d’appel avait fini par constater, au regard des pièces qui lui sont soumises, qu’aucune des formalités exigées par ces dispositions n’a été respectée.
Ainsi, la Cour estime que le juge de fond, en annulant le procès-verbal d’adjudication des actions non libérées, n’a en rien violé les dispositions précitées.
En somme, la mise en vente d’actions non libérées doit suivre une procédure d’ordre public, sous peine de l’annulation de l’adjudication ultérieure.
C’est d’ailleurs pourquoi, le conseil d’un spécialiste est nécessaire pour sécuriser tout investissement dans ce sens.
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Avocat à la Cour/Attorney/ GENI and KEBE (Litigation-Tax-Corporate-Finance and Project)
2 ansBoubacar DIAKITE
Senior Consultant Tax & Legal
6 ansTrès intéressant ! Le poids des dispositions d'ordre public... L'argumentation est bien structurée et l'orthographe est correct, presque sans faute. Respect 🙂
Senior Tax and Legal
6 ansProduire et partager. Merci Baldé.
Responsable Juridique chez Auchan Retail Sénégal
6 ansC’est toujours un plaisir pour moi de te voir produire une réflexion juridique cher Baldé. Félicitations!