Procédures-bâillons : une attaque contre la démocratie et la liberté d'expression
Rassemblement à Oakland contre les entreprises qui tentent de museler les critiques et restreindre la liberté d’expression. © Marlena Sloss / Greenpea

Procédures-bâillons : une attaque contre la démocratie et la liberté d'expression

Les grandes compagnies pétrolières du monde entier disposent d’une arme redoutable pour réduire au silence toutes celles et ceux qui oseraient se mettre en travers de leur route : les procédures-bâillons. Ces dernières années, ces procès intentés par des multinationales pour étouffer la liberté d’expression et limiter le pouvoir citoyen se sont multipliés. À l’heure où la contestation mondiale prend de l’ampleur contre les industries fossiles (responsables, d’après le GIEC, de 86 % des émissions de CO2 ces 10 dernières années), ces entreprises polluantes cherchent à tout prix à préserver leurs profits, au détriment des êtres humains et de la planète. Elles n’hésitent pas à utiliser leurs ressources pour intimider, faire peur et, en fin de compte, étouffer toute contestation.

Qu’est-ce qu’une procédure-bâillon ?

Les procédures-bâillons, également connues sous l’acronyme anglais ou SLAPP (« Strategic Lawsuit Against Public Participation ») qui signifie littéralement « gifle », sont des poursuites juridiques utilisées par des entreprises pour tenter de limiter voire d’empêcher la mobilisation publique de la société civile. Les procédures-bâillons sont souvent sans fondement et n’ont pas besoin de se conclure par une victoire juridique pour atteindre l’objectif souhaité par les entreprises qui les lancent.

Manifestation contre le Dakota Access Pipeline (DAPL) à San Francisco. © Cy Wagoner / Greenpeace

Ces procédures-bâillons font perdre du temps et causent d’importants préjudices financiers et parfois psychologiques aux personnes et organisations visées, qui doivent embaucher des avocats et s’engager dans des batailles juridiques longues et coûteuses, risquant parfois jusqu’à la faillite. Ces poursuites tentent d’entraver la liberté d’expression et de limiter la protestation pacifique en utilisant l’action en justice pour dissuader les manifestations non-violentes, la désobéissance civile, mais aussi parfois le travail de documentation ou de recueil de témoignage.

Souvent, les poursuites-bâillons réclament des sommes d’argent extrêmement élevées. Même si ces demandes sont sans fondement et vouées à l’échec, le fait que l’issue d’un procès n’est jamais totalement certaine implique parfois que certaines entités visées n’ont d’autre choix que de se rétracter.

De plus, les entreprises qui ont recours aux poursuites-bâillons espèrent dissuader les défenseurs et défenseuses de la planète et de l’intérêt général de s’élever contre des actes pourtant répréhensibles, de peur d’être poursuivis en justice. 

Ces dernières années, l’industrie des énergies fossiles a largement utilisé les poursuites-bâillons. Selon un rapport publié en 2022 par EarthRights International, l’industrie a utilisé des tactiques de poursuites-bâillons pour cibler plus de 150 personnes et organisations au cours des dix dernières années.

États-Unis : un procès contre Greenpeace et la liberté d’expression

Dans ce contexte inquiétant d’augmentation des tentatives d’intimidation judiciaire contre la société civile, Greenpeace n’est pas épargnée et fait face à plusieurs procédures de la part de grandes entreprises, notamment des pétro-gazières.

Rassemblement contre les SLAPP et les intimidations des entreprises à New York. © Michael Nagle / Greenpeace

L’entreprise américaine Energy Transfer poursuit Greenpeace USA et Greenpeace International et réclame 300 millions de dollars de dommages-intérêts en prétendant que Greenpeace aurait organisé les manifestations qui se sont déroulées dans le Dakota du Nord entre 2016 et 2017, pour s’opposer à son projet d’oléoduc qui menace les populations Sioux de Standing Rock. Une affirmation à la fois ridicule et profondément raciste.

Cette fausse affirmation minimise la lutte des populations amérindiennes, directement concernées par ce projet néfaste. En réalité, cette poursuite n’est rien d’autre qu’une procédure-bâillon qui vise à épuiser Greenpeace aux États-Unis en l’entraînant dans une procédure longue et coûteuse, dans le but de nous faire taire. Le procès débutera en février 2025 et, si Energy Transfer venait à gagner, Greenpeace USA serait ruinée et pourrait disparaître, après plus de 50 ans de lutte pour protéger le vivant. 

Cette bataille juridique qui se joue aux États-Unis ne concerne pas que Greenpeace : elle nous concerne toutes et tous. Les entreprises polluantes se saisissent de plus en plus fréquemment de cette stratégie juridique abusive qui porte gravement atteinte à la liberté d’expression.

Une victoire de l’entreprise américaine pourrait créer un précédent qui menacerait notre droit à protester, et ce partout dans le monde. Nous ne pouvons pas laisser les entreprises des énergies fossiles réduire au silence celles et ceux qui osent s’opposer à elles. Si Greenpeace est la cible de ce type de procédures, c’est bien la preuve que notre travail est efficace et craint par les entreprises les plus polluantes. Malgré ces plaintes abusives, nous continuerons notre combat pour la justice environnementale, climatique et sociale. Pour soutenir Greenpeace face à cette tentative d’intimidation de l’industrie des énergies fossiles, vous pouvez agir en faisant un don.


Source article : Greenpeace France

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