Smart contracts : 4 objectifs décisifs pour une adoption à grande échelle
Kevin Weier

Smart contracts : 4 objectifs décisifs pour une adoption à grande échelle

Article original rédigé en anglais par Mike Palencia (Qtum Foundation) pour The Block. Traduction en français par Adrien Scorniciel.


La technologie smart contracts est encore loin d’être à maturité. Cela se fera avec le temps, mais avons-nous vraiment le luxe d’attendre ?

Afin que la blockchain réalise son plein potentiel, elle doit devenir omniprésente. Et pour cela, elle nécessite d’être adoptée par les grandes entreprises. Connus pour leur lenteur à intégrer les évolutions technologiques, ces grands groupes requièrent des solutions adaptées à leur usage avant d’envisager une quelconque intégration. Une implémentation, même à petite échelle, représente un défi de taille, mais peut significativement accélérer l’adoption de cette nouvelle technologie — pour autant qu’elle soit une réussite.

Nous ne pouvons pas nous permettre d'attendre, les bras croisés, que les smarts contracts évoluent peu à peu et que les multinationales décident enfin de les utiliser : nous devons les soutenir proactivement, et ce dès maintenant.

Voici quatre objectifs clés :


1.) Développer des environnements « cross-chain »

L’avenir des blockchains individuelles n’est pas encore fixé. L’histoire nous a appris que les premiers leaders technologiques n’arrivent pas toujours à tenir leurs promesses sur le long terme (par exemple, le navigateur web Netscape, qui a dû faire place à Internet Explorer, lui-même détrôné par Chrome).

Les décideurs d’entreprises conservatrices ne sont pas encore prêts à se limiter à une seule blockchain. En gardant valeur commerciale et cas d’utilisation des smart contracts au centre de leurs préoccupations, la technologie n’est en réalité pour eux qu’un moyen de remplir leurs objectifs. Pourquoi choisir aujourd’hui une blockchain qui pourrait les entraver demain ?

Au lieu de cela, les grandes entreprises recherchent la flexibilité de smart contracts qui leur permettront d’effectuer des transactions avec le réseau de leur industrie et celui de leurs fournisseurs, peu importe où ils se trouvent — et où ils se trouveront dans quelques années.

Si nous savons d’expérience que certaines industries ou cas d’utilisation finiront probablement par graviter autour de blockchains dédiées, l’établissement d’un environnement « cross-chain », et ce très tôt dans le développement de la technologie, pourrait fondamentalement impacter cette tendance. Quoiqu’il en soit, pour les entreprises, cela réduirait significativement les risques liés aux projets smart contracts.


2.) Assurer la rétrocompatibilité

Afin de limiter un peu plus les risques des smart contracts, les grandes entreprises sont susceptibles d’exiger une rétrocompatibilité de toutes les transactions. À mesure que les blockchains évoluent et que de nouvelles versions sont mises à disposition, la plupart des entreprises trouveraient un avantage à ce que des transactions exploitant une ancienne version du protocole puissent tout de même être validées.

Sans cette rétrocompatibilité, les smart contracts qui auparavant fonctionnaient pourraient bien ne plus s’exécuter. Mais dans cet environnement, étant donné l’échelle et la valeur des transactions, cela pourraient coûter des dizaines de milliards de dollars et mettre des industries à genoux. On ne parle ici pas de dizaines, mais de dizaines de milliers de smart contracts ; d’une valeur non pas de centaines, mais de centaines de millions de dollars.


3.) Offrir des méthodes de consensus adaptées

Alors que la preuve de travail (Proof-of-work) s’est imposée depuis quelques temps comme la méthode principale de consensus, les dirigeants d’entreprise ne semblent pas encore convaincus par sa capacité à s’adapter à leur usage. Le minage est considéré risqué : il nécessite la stabilité d’un réseau de mineurs, dont les actions et la disponibilité ne peuvent être contrôlées ou assurées. Cette méthode de consensus n’est pas optimale et nécessite une énorme puissance de calcul et de grandes quantités d’énergie — et elle est lente : une heure peut s’écouler avant qu’une transaction Bitcoin standard n’atteigne le consensus. Les smart contracts du protocole Ethereum ont leurs propres problèmes, dont le plus évident est la sécurité — les hackers et un niveau d’exigence peu élevé en matière de vérification d’identité semblent en faire un choix plus risqué.

Que recherchent les entreprises ? Tout d’abord, un réseau stable pour traiter les transactions. Il n’est ici pas question de contrôler nécessairement ce réseau, mais elles doivent être assurées de la stabilité et des performances de celui-ci.

Ensuite, le rendement : le temps et l’énergie nécessaires aux millions de transactions traitées s’accumulent rapidement, arriver à un consensus qui soit à la fois rapide et efficace est vital pour laisser se développer les entreprises. Enfin, elles requièrent une sécurité à toute épreuve afin de s’assurer que les smart contracts soient exécutés de manière la plus sécurisée possible, et uniquement par les parties correctement identifiées.

Une manière prometteuse de répondre aux exigences des grands groupes est la preuve d’enjeu (proof-of-stake), un algorithme de consensus qui se base sur la possession de cryptomonnaies afin d’arriver à un consensus distribué. D’autres procédés peuvent néanmoins surgir à mesure que l’adoption s’accélère.


4.) Produire exemples de bonne pratique et normes pour l’industrie

Actuellement, chaque smart contract est créé individuellement. Étant donné que peu de développeurs — et encore moins d’entreprises — partagent publiquement leurs avancées, le développement de smart contracts relève du Far West. Les erreurs ne peuvent pas toujours être évitées.

Et dans ce Far West, les développeurs travaillent en parallèle sur des smart contracts destinés à répondre aux mêmes besoins. Ceci s’avère très inefficace – d’autant plus lorsque l’on prend en considération le manque chronique de développeurs blockchain à travers le monde.

Du point de vue des grandes entreprises, il y a un grand besoin de standardisation. Ce qu’elles recherchent, c’est une suite de smart contracts standards, répondant à des besoins communs de l’industrie. Ils doivent pouvoir être utilisés tels quels, ou servir de point de départ pour une utilisation plus complexe — à l’image des anciens contrats pro forma.

Dans certains cas d’utilisation et certaines industries, nous nous attendons à un besoin de Master Contracts – des accords off-chain capables d’utiliser des oracles et des flux de données pour interagir avec des smart contracts on-chain.

Des modèles établissant des normes pour l’industrie permettraient non seulement de fournir un point de départ solide, mais cela rassurait également les entreprises quant à la qualité des smart contracts qu’elles utilisent. Les bugs et erreurs ne sont jamais une bonne chose mais, à grande échelle, ils peuvent s’avérer désastreux.

Cette approche nous mènerait vers des modes opératoires standardisés, mais également vers une productivité accrue. Même les entreprises riches en ressources sont réticentes à consacrer temps et argent à la mise au point de nouveaux smart contracts. Lorsque le problème survient à l’échelle d’une entreprise, il ne s’agit pas de dizaines, mais bien de dizaines de milliers de smart contracts.


La collaboration comme facteur primordial d’une adoption réussie

L’adoption des smart contracts par les grands groupes est essentielle pour que la blockchain soit à même de tenir ses promesses. Plutôt que d’attendre que ceux-ci évoluent naturellement et répondent progressivement aux besoins de plus en plus exigeants des entreprises, nous avons l’opportunité de les développer de manière proactive.

Pour cela, nous avons tout d’abord besoin d’une réelle collaboration — non seulement au sein de l’industrie de la blockchain, mais également avec les entreprises avant-gardistes et leur soif d’innovation. Il nous faut regarder l’ensemble : ce qui est bénéfique pour les utilisateurs de la blockchain, l’est également pour l’industrie et la technologie.

Ce n’est qu’à travers une étroite collaboration, la mise en commun d’infrastructures et de procédés, et des initiatives conjointes que les smart contracts seront en mesure de répondre aux besoins du marché des grandes entreprises : une étape cruciale vers une adoption à grande échelle.


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