Un contrat qui fait toute la différence en gestion de copropriété

Un contrat qui fait toute la différence en gestion de copropriété

Par Jean-F. Lavigne Adm.A. Publié par l’Ordre des administrateurs agrées du Québec

Acquérir un condo est d’abord et avant tout l’achat d’une partie d’un immeuble. Pour faire une bonne affaire, il est très important d’analyser la situation de l’immeuble dans lequel vous souhaitez investir. Le meilleur moyen pour ce faire est de lire attentivement la déclaration de copropriété. Ce document obligatoire pour toute copropriété est facilement disponible, il suffit de le demander au courtier. La déclaration de copropriété est révélatrice quant aux valeurs communes des copropriétaires composant un immeuble. Mieux encore, son contenu permet de déterminer si les administrateurs de l’immeuble ont accès aux outils de gestion nécessaires pour assurer la qualité de vie dans l’immeuble, chose que tout investisseur devrait absolument vérifier avant d’y placer ses billes.

Un document qui en dit long

La déclaration de copropriété est un document important puisque c’est un contrat notarié, publié au registre foncier, qui présente l'ensemble des mesures prescrites auxquelles sont soumis tous les copropriétaires d’un immeuble. Vous avez bien lu. Tout copropriétaire doit adhérer à la déclaration de copropriété. On y retrouve les règles de fonctionnement et de vie commune, de contribution aux charges de copropriété et d'administration. Ne pas lire ce document avant un achat serait une grossière erreur qui pourrait vous couter cher. Une déclaration de copropriété déficiente est très révélatrice quant à la qualité de gestion d’un immeuble, plus encore, quant à sa valeur au marché. Cet article vise à vous donner des points de repères et des pistes d’éléments à considérer qui pourraient faire la différence entre un bon et un mauvais investissement.

Premier indice révélateur

Examinez si la déclaration de copropriété a été mise à jour depuis la dernière réforme du Code civil en 1994. Pour le savoir rapidement, vérifiez si sa table des matières est subdivisée en trois sections distinctes; l'acte constitutif, le règlement de l'immeuble et l'état descriptif des fractions. Sinon, recherchez si la date de publication du document est ultérieure à 1994. Si le document n’est pas à jour, il risque de contenir des éléments désuets ou manquants. Cela pourrait créer de la confusion et ainsi rendre difficile à différencier ce qui est applicable de ce qui ne l’est pas. La déclaration de copropriété ne devrait jamais être un document figé dans le temps. La société change, le contrat qui unit les copropriétaires d’un immeuble devrait aussi changer.

Location à court terme

Bien que récente, la location à court terme doit être couverte dans votre déclaration de copropriété. Les plateformes Internet de location à court terme ont vu le jour en 2008 et il est estimé aujourd’hui qu’« AirBed & Breakfast » (Airbnb) contient à elle seule plus de 1,5 millions d’annonces à travers le monde. C’est maintenant beaucoup plus facile et surtout plus lucratif de louer à court terme. Malheureusement la location à court terme engendre des difficultés et crée une pression à la baisse de la valeur des copropriétés. La déclaration de copropriété devrait à tout le moins interdire la location répétée d’une unité à des locataires différents pour des périodes de moins de douze mois. Si ce n’est pas le cas, votre investissement va en souffrir.

Frais à la location

La location d’une unité, même à long terme, affecte la valeur d’un immeuble en copropriété. En effet, il est reconnu que les locataires ont un impact négatif tant sur le niveau de qualité de vie des copropriétaires que sur les coûts de gestion d’un immeuble. En réaction à ceci, plusieurs immeubles en copropriété, notamment à l’île des Sœurs, ajoutent à leurs règlements un frais annuel à la location variant entre 200$ et 900$ par unité. Ceci s’appuie sur le fait qu’il est injuste que les copropriétaires qui habitent leur unité déboursent davantage et voient leur niveau de qualité de vie baisser parce que d’autres copropriétaires choisissent de louer leur unité.

L’eau, un fléau

La quasi-totalité des immeubles en copropriété au Québec souffre actuellement d’un déficit chronique d’entretien. Ceci a notamment pour conséquence de nombreux dégâts d’eau, ce qui en retour fait exploser les primes et les franchises d’assurances créant par le fait même une « crise » de l’assurance actuellement. Ce manque d’intérêt pour l’entretien préventif nuit à la valeur des copropriétés. Assurez-vous que la déclaration de copropriété contient minimalement un article qui oblige le remplacement des chauffe-eau qui sont situés dans les parties privatives au moins à tous les dix ans. Un règlement demandant de remplacer le calfeutrage dans la salle de bains à tous les deux ans est aussi un must. Lorsque l’eau coule plusieurs étages plus bas à répétions, ça coute très cher!

Les mauvais payeurs

Des retards de paiements de charges de copropriété de quelques copropriétaires peuvent causer des difficultés à l’ensemble des copropriétaires. Assurez-vous que le taux d’intérêt pour les fautifs soit élevé, 2% par mois devrait être un standard. Trop souvent, il est question de faibles taux d’intérêts qui sont difficiles à déterminer. Le taux doit être clairement nommé et dissuasif. Rendre le débit préautorisé obligatoire est une excellente façon de réduire les retards tout en diminuant considérablement le temps de traitement des charges de copropriété, une tâche à faible rendement. Les chèques sont d’une autre époque, éliminez-les. Par mesure supplémentaire, un frais administratif minimum de 100$ par transaction « sans fonds » devrait être exigé, en plus des frais bancaires évidemment.

La carotte et le bâton

Le respect des règlements est important. Une copropriété étant une microsociété, tous ne se conforment pas systématiquement aux règles. Si la déclaration de copropriété ne contient pas de clause pénale permettant d’imposer des pénalités, il sera très difficile pour les administrateurs de gérer correctement votre immeuble. Cela aura un impact négatif sur votre qualité de vie et la valeur de votre investissement. Une sanction claire et facile d’application, par exemple 100$ par infraction, devrait permettre un plus grand respect des dispositions de la déclaration de copropriété. Évitez les multiples avertissements « de courtoisie » et les pénalités à paliers multiples trop élevées, cela ajoute de la complexité et décourage les administrateurs à sévir.

Prédominance du français

Des syndicats font parfois l’erreur de produire les procès-verbaux d’assemblées et les états financiers uniquement en anglais. Cela a un impact néfaste sur la valeur des unités de l’immeuble puisque le bassin d’acheteurs du Québec est majoritairement francophone. Assurez-vous que les documents soient rédigés dans la langue de Molière, vous attirerez plus d’acheteurs.

En terminant, si vous détenez une unité dans un immeuble en copropriété sachez que la déclaration de copropriété ne peut être modifiée que par l’assemblée des copropriétaires. Différentes majorités sont prévues dans la loi, selon la modification. Nous vous recommandons de consulter un notaire spécialisé en copropriété pour obtenir de plus amples informations ou si vous prévoyez modifier ce document. N’oubliez pas qu’une bonne déclaration de copropriété est essentielle à la mise en place d’une saine gestion. Protégez votre investissement, le jeu en vaut la chandelle.

Jean-François Lavigne, Adm.A, MBA

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