Actualité : la sobriété énergétique

Actualité : la sobriété énergétique

(extrait de notre revue de presse d'octobre 2023)

Une sobriété choisie ou subie ?

Un an après le premier plan de sobriété, le gouvernement français a dressé le bilan : les plans sobriété ont « permis de réaliser, sur une année entière, ce que la France n’avait pas su faire en plusieurs décennies : diminuer la consommation d’énergie de 12 % ». Cependant, interrogés en septembre 2023 par l’institut BECOMING pour le Médiateur national de l’énergie, 8 foyers sur 10 déclarent avoir restreint leur chauffage pendant l’hiver pour ne pas avoir de factures trop élevées ; ce taux, qui était de 69% en septembre 2022, n’a jamais été aussi élevé. Selon le médiateur national de l’énergie, « la sobriété énergétique est avant tout motivée par des raisons économiques, plutôt que souhaitée pour des enjeux écologiques. ». Cette étude est confirmée par une étude complémentaire à l’étude Conditions de vie et aspirations des Français du CREDOC de 2023 réalisée avec Action Logement. En effet, les résultats de l’étude montrent que « plus de la moitié de la population (56 %) juge aujourd’hui que ses charges de chauffages sont lourdes, voire impossible à payer. Ce sentiment de précarité énergétique a augmenté dans toutes les catégories sociales. Trois quarts des Français déclarent avoir limité leur consommation de chauffage. Cette sobriété a été principalement motivée par la nécessité économique et non par souci de l’environnement ». On peut donc s’interroger sur la pérennité des gestes de sobriété actionnés durant l’hiver dernier. De plus, si l’on rajoute à cela le fait que la précarité énergétique augmente, (voir dans notre revue de presse de septembre),

La sobriété énergétique constatée en France lors de l’hiver 2022-2023 a plus été subie que choisie.


Une volonté de pérennisation

Le gouvernement français a par ailleurs publié 5 propositions pour prolonger les actions et aller plus loin dans la sobriété : poursuivre la mobilisation des grandes entreprises, permettre aux Français de mieux piloter leur consommation d’énergie grâce à un « plan thermostat », encadrer et clarifier la réglementation sur la pollution lumineuse, promouvoir les mobilités propres en entreprise et engager les énergéticiens dans des actions de valorisation des économies d’énergies. Engie et EDF vont d’ailleurs proposer des "défis" à leurs clients pour les encourager à économiser l'électricité cet hiver, qui seront récompensés par des primes (Engie) ou des places pour assister à des épreuves des Jeux Olympiques (EDF) (voir cet article de Connaissance des Energies). Enfin, le mardi 24 octobre une campagne « Chaque geste compte » a été lancée. Elle promeut la sobriété énergétique via 3 gestes écologiques prioritaires : « Je baisse, j’éteins, je décale ».

Plusieurs propositions et actions ont été publiées ou mises en places au niveau français afin de pérenniser les comportements de sobriété énergétiques.


La question de la manière de modifier les routines de consommation d’énergie est importante : dans cet article paru dans Energy Research & Social Science, Cécile Chamaret , Mathias Guérineau et Julie Mayer ont étudié le défi "Déclics", un programme de gamification français qui promeut les éco-gestes auprès des ménages. Ils ont identifié les pratiques transformatrices que les ménages déploient pour intégrer la sobriété dans leurs routines tout au long du défi. Leurs travaux ont permis de classer les ménages en quatre profils en examinant le degré d'attention qui sous-tend leurs pratiques, en montrant que les individus de ces profils réagissent différemment aux divers instruments de gamification. Leurs résultats montrent qu'au-delà de la motivation et de la prise de conscience des individus, la sobriété énergétique dans un contexte domestique repose sur des efforts délibérés pour modifier des comportements routiniers et maintenir des habitudes vertueuses au fil du temps. Les auteurs fournissent des indications permettant d'adapter les mesures en matière de sobriété énergétique en fonction des différents profils des ménages. Ils mettent en évidence les effets secondaires potentiels de la gamification : elle peut ne pas valoriser les efforts réels déployés par les individus, créant ainsi un sentiment d'injustice sociale.


Toujours en France, plus de 80 organismes ont signé les chartes d’engagement volontaire pour la sobriété des bâtiments tertiaires en octobre (voir sur le site de l’Ademe) afin de pérenniser et d’amplifier leurs efforts de sobriété. Afin de les aider dans leurs démarches, un rapport rédigé avec le soutien de l’ADEME et des pilotes issus de la filière (Ifpeb, OID, FEI, ADI) a été publié visant à identifier les freins, les bonnes pratiques et les leviers à l’action collective en matière de sobriété dans le tertiaire.

Plus de 80 organismes ont signé les chartes d’engagement volontaire pour la sobriété des bâtiments tertiaires.


La nécessité de pérennisation

Les efforts pour diminuer la consommation en énergie sont donc bien réels. Ces efforts sont nécessaires sur le long terme, même si les prévisions de GRTgaz et Téréga sont optimistes pour cet hiver. Les analyses du principal opérateur de transport de gaz en France et de l’opérateur historique de transport et de stockage de gaz dans le sud-ouest montrent en effet que cette année le réseau français a la capacité d’assurer les approvisionnements nécessaires pour alimenter les consommations et les exportations, y compris en cas d’hiver froid. L’équilibre du système implique néanmoins des imports soutenus en GNL, une gestion prudente des stockages ainsi qu’un maintien de la sobriété à des niveaux similaires à ceux observés l’hiver dernier. Les dernières prévisions de l’AIE sur le gaz sont du même ordre. En effet, selon l’agence internationale de l’énergie, « les niveaux élevés de stockage dans l'Union européenne permettent un optimisme prudent à l'approche de la saison de chauffage 2023-24. Cependant, une série de facteurs de risque pourrait facilement raviver les tensions sur le marché. Cet hiver, l'Europe du Nord-Ouest n'aura plus accès à deux sources qui constituaient l'épine dorsale de son approvisionnement en gaz : le gaz russe acheminé par gazoduc et le champ de Groningue aux Pays-Bas : le gaz russe acheminé par gazoduc et le gisement de Groningue aux Pays-Bas ».

L'équilibre du système énergétique implique, entre autres, un maintien de la sobriété à des niveaux similaires à ceux observés l'hiver dernier.

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