"100% Santé", le reste à charge zéro en Audioprothèse : résumé, documents pour comprendre...
Évolution du reste à charge moyen pour deux audioprothèses : objectif 0€ pour 2021
Le cadre : le dispositif 100% SANTÉ --> réforme proposée par le Ministère des Solidarités et de la Santé, suite à un engagement de campagne du Président de la République, Emmanuel Macron : un reste à charge à zéro € pour tous les Français pour leurs lunettes, leurs audioprothèses ou leurs prothèses dentaires.
L'objectif : donner à tous les Français un accès à des soins de qualité pris en charge à 100%, dans le domaine de l’optique, de l’audiologie et du dentaire --> "100% santé : des soins pour tous, 100% pris en charge". Les principes retenus sont les mêmes quel que soit le secteur concerné, optique, audiologie et dentaire : il s’agit de proposer un ensemble de prestations de soins identifiées (panier / offre) qui répond aux besoins de santé essentiels – bien voir, bien entendre et soigner son hygiène bucco-dentaire – avec une garantie de qualité, tout en préservant leur liberté de choix. Il s'agit avant tout de lever le renoncement aux soins, notamment audioprothétiques qui potentiellement entraîne à moyen et long terme des pathologies plus lourdes (démence, dépression, dépendance, tel que démontré par plusieurs études récentes) : en France, le nombre de personnes souffrant de difficulté d’audition est estimé à environ 6 millions de personnes en France. Parmi elles, environ la moitié, soit 3 millions de personnes, est susceptible d’être appareillée. Or le taux d’appareillage effectif dans notre pays est estimé de l’ordre de 35% de la population souffrant d’une déficience auditive. L’objectif est de se rapprocher d’un taux d'équipement de 50%. Ce qui peut se traduire, selon les calculs des instances professionnelles par une évolution importante du nombre d'audioprothèses adaptées par an : en "vitesse de croisière", on passerait de 750 000 appareils à 1 million.
Pour qui ? Par qui ? Cette offre sera accessible à tous les Français et prise en charge à 100% par la Sécurité sociale, les complémentaires en santé et les professionnels, donc sans reste à payer pour les patients.
Résultat de négociations : depuis février 2018, des négociations difficiles ont été menées entre la direction de la Sécurité sociale du ministère des Solidarités et de la Santé et l’ensemble de syndicats d’audioprothésistes (SYNEA, UNSAF, SYNAM, CNA), ainsi que par le SNITEM (industriels). La négociation a associé également les fédérations d’organismes complémentaires (Fédération nationale de la mutualité française, Fédération française des assurances, Centre technique des institutions de prévoyance) et l’organisme qui les fédère (UNOCAM). Un protocole d'accord a été signé officiellement le 13 juin 2018, suite au discours du Président de la République devant le Congrès de la Mutualité.
Le calendrier : Les tarifs des aides auditives faisant l’objet du panier « 100% santé » seront plafonnés à compter du 1er janvier 2019 et progressivement réduits. A partir de la même date, la base de remboursement de la Sécurité sociale sera progressivement augmentée. Sur les appareils « 100% santé », en 2019, il y aura en moyenne 200€ de frais en moins (par oreille). Les audioprothésistes devront proposer au patient un panier de produits « Reste à charge maîtrisé », avec des appareils auditifs au prix plafonné à 1 300 euros et qui ne laisseront plus que 600 euros de reste à charge moyen au patient contre 1 000 euros aujourd’hui par oreille. En 2020, les efforts partagés par tous les acteurs amèneront à proposer des appareils à un prix plafonné cette fois à 1 100 euros. Le reste à charge du patient ne sera plus que 300 euros. A compter de 2021, les équipements « 100% santé » seront garantis sans reste à charge dans la limite d’un plafond allant jusqu’à 950 euros par oreille. Les appareils RAC zéro sont équivalents à des produits aujourd’hui facturés de 1 200 à 1 300 euros. Entre 2018 et 2021, la base de remboursement de la Sécurité sociale sera progressivement passée de 120 à 200 euros (2018), de 200 à 300 euros en 2019, de 300 à 350 en 2020 pour arriver à 400 euros en 2021.
Le panier de soins : les aides auditives sont désormais répertoriées en deux catégories.
- La première catégorie (Classe I) constitue le dispositif « reste à charge zéro ».
- La seconde catégorie (Classe II) permettra de proposer des équipements à prix libre, avec des prix qui se situeraient proches des 1 600 € par équipement.
La Classe I avec reste à charge zéro :
- tous les types d’appareils sont concernés : contour d’oreille classique, contour à écouteur déporté, intra-auriculaire.
- 12 canaux de réglage pour assurer une adéquation de la correction au trouble auditif (ou dispositif de qualité équivalente à 8 canaux) et système permettant l’amplification des sons extérieurs restitués à hauteur d’au moins 30 dB.
- 30 jours minimum d’essai de l’aide auditive avant achat.
- 4 ans de garantie.
- Au moins trois des options suivantes : système anti-acouphène, connectivité sans-fil, réducteur de bruit du vent, synchronisation binaurale, directivité microphonique adaptative, bande passante élargie ≥ 6 000 Hz, fonction apprentissage de sonie, dispositif anti-réverbération.
- Des prestations de suivi (au moins une fois par an) pour adapter en continu le réglage de l’appareil en fonction de l’évolution de la perte auditive.
Ce contenu représente environ 35% du marché actuel (source Audio Infos).
Et la Classe II ? Après négociations houleuses et "montées au créneau" de certains députés de la majorité LREM à l'endroit des fonctionnaires "zélés" de la DSS, les tarifs de la classe II restent libres. Aussi, la base de remboursement par la Sécurité sociale est identique à celle du panier de soins RAC zéro ; c’est-à-dire qu’il passera à échéance 2021 de 120 à 400 euros (contre tout de même 800 euros en Allemagne, 660 euros en Belgique, 600 euros en Italie…). En parallèle, le Gouvernement met en place un dispositif, conjoint avec la profession, de contrôle de l’évolution des tarifs dont le but est d’éviter les dérives ou report d’un manque à gagner sur la Classe I vers la Classe II. Ce dispositif prévoit d’imposer un prix limite de vente en cas d’évolution trop importante des tarifs. Par ailleurs, le Gouvernement précise que le tarif de prise en charge par les contrats des assureurs complémentaires (contrats responsables) limite la prise en charge totale (assurance maladie obligatoire et complémentaire) à 1 700 euros par oreille.
Le volet prévention : les difficultés d’audition concernent majoritairement des personnes âgées. Les difficultés d’audition ont un impact établi sur la désocialisation des personnes âgées. Ils constituent un facteur de risque de dépression et de troubles cognitifs, de même que de chute. Mais la prévention doit être déployée également à destination des plus jeunes pour lesquels l’écoute de la musique sans protection peut avoir des conséquences dommageables. Le plan Priorité prévention présenté par le Gouvernement le 26 mars prévoit de redéployer les examens obligatoires actuellement concentrés sur les enfants de moins de 6 ans et de créer nouvelles consultations destinées aux jeunes de 8-9 ans, 11-13 ans et 15-16 ans, prises en charge à 100%. Ces consultations incluront un bilan auditif.
Un plus grand nombre d'audioprothésistes pour améliorer le suivi : le nombre des professionnels formés sera progressivement augmenté pour s’adapter à l’évolution prévisionnelle du nombre de personnes appareillées. Il sera porté d’ici 2021 à 300, contre 214 aujourd'hui (244 avec l'ouverture en septembre 2019 de l'école d'Évreux/Rouen), pour l’essentiel par augmentation des effectifs des formations déjà existantes.
Pas de dissociation : la fourniture d’une aide auditive inclut la prestation de réglage et d’adaptation pour les quatre années ultérieures. La réalisation effective de cette prestation donnera lieu à suivi et traçabilité. Par ailleurs, la prise en charge en cas de déménagement ou de souhait du patient de changer d’audioprothésiste sera facilitée : l’audioprothésiste ayant réalisé l’appareillage transmettra à l’un de ses pairs (choisi par le patient) l’ensemble des informations nécessaires à la continuité de sa prise en charge.
Satisfaction des syndicats et préservation de la qualité des soins pour le plus grand nombre...
- "Un accord historique" (UNSAF) : le syndicat des audioprothésistes a salué un « accord historique », reposant sur « un effort de l’ensemble des acteurs » et qui « ouvre une nouvelle ère dans la compensation du déficit auditif dans notre pays au bénéfice des malentendants et particulièrement des plus modestes d’entre eux ». L'UNSAF se réjouit notamment du « réinvestissement du secteur de l’audioprothèse par la puissance publique » via la revalorisation de la prise en charge par l’AMO, « inédite depuis 30 ans » même si elle « porte le remboursement à un niveau qui demeure néanmoins bien en deçà de celui de nos voisins européens ».
- « Une avancée incontestable » (SYNEA) : le syndicat national des entreprises de l’audition (SYNEA), qui a toujours soutenu le principe du reste à charge zéro, estime par la voix de son président, Guillaume Flahault, que l’accord constitue « une avancée incontestable puisque ce sont les patients les moins aisés qui en seront les premiers bénéficiaires. Le trop faible taux de remboursement des appareils auditifs était jusqu’à présent un obstacle à l’accès aux soins ». Le SYNEA veillera ainsi « avec responsabilité à ce que l’accord conclu préserve la qualité des soins et l’équilibre économique de la filière ».
Claude Piqué · Consultant Partner
Sources : Dossier de Presse Ministère des Solidarités et de la Santé , Communiqué de Presse UNSAF , Audio Infos