#74 Il vaut mieux s'occuper du changement avant qu'il s'occupe de vous !

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Bonjour à toutes et tous,

Vous trouverez cette semaine un seul article sur la technologie et la Chine.


Métamorphoses va faire une pause de 2 semaines et vous retrouvera en janvier. Je vous souhaite d’excellentes fêtes de fin d’année.


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Bonne lecture et n'hésitez pas à me faire part de vos suggestions dont des sujets à traiter.

A la semaine prochaine.

Stéphane


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Les technologies et la Chine

La Chine a mené une politique d’ouverture et de réformes économiques (Gaige Kaifang) depuis la fin des années 1970. Cela lui a permis de se hisser au rang de deuxième puissance économique mondiale derrière les Etats-Unis. Cette croissance a été portée par une main-d’œuvre abondante peu onéreuse, une industrialisation rapide, des investissements étrangers massifs et une spécialisation dans les industries à faible valeur ajoutée. Lors des deux dernières décennies, la Chine a mené une transition vers un modèle économique fondé sur l’innovation, la R&D, les services à forte intensité de connaissances et la high-tech. Pékin développe en parallèle une diplomatie économique et technologique ambitieuse, et décomplexée. Elle cherche entre autres à établir des normes, à exporter son modèle de gouvernance numérique et à sécuriser des ressources. La rivalité sino-américaine dans le secteur technologique s’est intensifiée progressivement conduisant à l’émergence d’un paysage géopolitique où l’innovation devient un instrument de pouvoir comme le montre le discours des dirigeants des grandes entreprises technologiques américaines.

Cet article a pour objet de :

  • Évaluer la compétitivité technologique de la Chine dans divers secteurs clés (IA, semi-conducteurs, robotique, green tech, biotech, etc.).
  • Analyser les dépendances notamment en minerais stratégiques et composants critiques.
  • Comprendre comment l’environnement réglementaire, éducatif, démographique et économique influence la performance technologique.
  • Mettre en lumière la manière dont la Chine projette sa puissance technologique à l’international et les réponses des autres grandes puissances.
  • Offrir une vision prospective, en identifiant les scénarios de développement, les risques et les opportunités pour la Chine et ses partenaires.

en s’appuyant entre autres sur

  • Les documents officiels chinois (plans quinquennaux, directives du Conseil des affaires d’État, stratégies sectorielles : « Made in China 2025 », « China Standards 2035 », « AI Development Plan » de 2017).
  • Les statistiques de la NBS (National Bureau of Statistics), les données du MIIT (Ministère de l’Industrie et des Technologies de l’Information) et du MOST (Ministry of Science and Technology).
  • Les rapports de la Banque mondiale, du FMI, de l’OCDE, de la CNUCED, et les analyses de think tanks (Carnegie Endowment, MERICS, CSIS) et de cabinets de conseil (McKinsey, Boston Consulting Group).
  • Des études académiques, des brevets déposés (WIPO), des publications scientifiques (Scopus, Web of Science), et des entretiens avec des experts du milieu industriel, universitaire et gouvernemental.


Panorama Historique et Institutionnel

De la fin des années 1980 aux années 2000, la Chine s’est intégrée aux chaînes de valeur mondiales d’abord comme plateforme de fabrication à bas coût. Le pays a progressivement mis l’accent sur la montée en gamme, soutenu par des plans industriels tels que :

  • Le 11ème plan quinquennal (2006-2010) qui mettait l’accent sur la R&D et l’innovation indépendante.
  • Le 12ème plan quinquennal (2011-2015) qui promouvait les « industries stratégiques émergentes » (énergies propres, biotech, TIC avancées).
  • Le programme « Made in China 2025 » (2015), qui visait à transformer la Chine en leader manufacturier global dans dix secteurs clés dont la robotique, l’aérospatiale, les véhicules électriques, la bio-pharmacie et les nouveaux matériaux. Plus récemment, la Chine a ajouté de nouvelles initiatives comme « China Standards 2035 » (pour mettre en place des normes technologiques internationales) et le plan de développement de l’IA (2017).

L’État central par le biais du Conseil des affaires d’État, du NDRC (National Development and Reform Commission) et du MIIT, définit les orientations stratégiques, mobilise les ressources financières, réglementaires et fiscales. Les gouvernements provinciaux, qui sont en concurrence pour attirer capitaux et talents, soutiennent des zones franches et des clusters (comme Zhongguancun à Pékin qui est l’équivalent chinois de la Silicon Valley). Ils proposent des subventions, des incitations fiscales, des terrains à bas coût, …. Les entreprises publiques (SOE) servent de relais d’exécution surtout pour les infrastructures, la téléphonie, l’énergie et les transports. Parallèlement, l’État encourage le secteur privé (BATX : Baidu, Alibaba, Tencent, Xiaomi, mais aussi ByteDance, Huawei qui sont des groupes privés non cotés mais soutenus par l’État) à innover et à investir dans la R&D.

Les lois sur la propriété intellectuelle ont été renforcées avec au passage une augmentation du nombre de procès pour contrefaçon afin d’améliorer la crédibilité technologique. Des normes spécifiques ont été introduites pour la cybersécurité, la protection des données (Data Security Law, Personal Information Protection Law), la régulation des technologies sensibles et l’IA. Le gouvernement surveille étroitement l’économie numérique en imposant parfois des restrictions (comme sur les jeux vidéo, la fintech) pour préserver la stabilité financière et sociale selon leurs désirs.

État des Lieux

Les grandes entreprises technologiques (++) Les champions nationaux tels que Huawei (télécommunications, 5G, smartphones), Alibaba (e-commerce, cloud), Tencent (réseaux sociaux, gaming, fintech), Baidu (moteur de recherche, IA), et Xiaomi (smartphones, IoT) dominent le marché intérieur. Ils investissent massivement en R&D et accumulent brevets et technologies propriétaires. Alibaba Cloud et Tencent Cloud rivalisent avec AWS ou Microsoft Azure en Asie. D’autres acteurs émergent comme ByteDance (TikTok, Douyin) et DJI, numéro un des drones grand public.

Huawei est devenu un leader mondial dans la 5G, détenait plus de 3700 brevets 5G en 2020 et est un des leaders pour la 6G.

Huawei détient un nombre important de brevets dans les technologies 5G et 6G :

  • Huawei est leader mondial des brevets 5G avec 3 325 familles de brevets déposées.
  • L'entreprise détient environ 12% des brevets essentiels pour la 5G
  • Au total, Huawei possède plus de 110 000 brevets actifs.
  • La Chine dans son ensemble détient 40,3% des 20 000 brevets déposés pour les technologies 6G, et Huawei y contribue significativement.
  • Huawei a clairement une position dominante dans les brevets liés aux technologies de réseaux mobiles, tant pour la 5G actuelle que pour la future 6G. Cette avance technologique lui permet de générer des revenus importants grâce aux licences de brevets, malgré les difficultés rencontrées sur certains marchés internationaux du fait des restrictions induites par la position américaine.

le tableau ci-dessous donne pour les principales entreprises technologiques chinoises leurs activités, chiffre d'affaires, stratégies futures et internationales. Ces entreprises bénéficient d'un fort soutien gouvernemental et d'un vaste marché intérieur, ce qui leur permet de se développer rapidement et de concurrencer les acteurs internationaux établis. Pour le voir en entier, cliquez là




Infrastructures numériques et intégration socio-économique (++) La Chine a investi plus de 40 milliards de dollars dans la 5G permettant de déployer plus de 2 millions de stations de base en 2022. Les paiements mobiles (Alipay, WeChat Pay) dominent totalement les transactions de détail. Le e-commerce a pénétré toutes les couches de la société et pèse plus de 2 000 milliards de dollars. Les villes intelligentes (Hangzhou, Shenzhen) intègrent caméras de surveillance avancées, big data, services publics digitaux. Toutes ces infrastructures nourrissent un écosystème massif de données qui est à l’origine de progrès substantiels de l’IA, de la logistique intelligente, du diagnostic médical à distance et la smart agriculture.

Positionnement sur les chaînes de valeur globales (+) La Chine n’est plus seulement l’assembleur final des iPhones ou des ordinateurs portables. Elle conçoit désormais des produits finis de très haute qualité pour comme des smartphones, des ordinateurs, des voitures. , investit dans le design, et renforce ses marques à l’international. Cependant, la dépendance sur les technologies critiques (semi-conducteurs, lithographie, softwares spécialisés) demeure un point faible.


L’intelligence artificielle (++)

Le « Next Generation Artificial Intelligence Development Plan » (2017) prévoyait de faire de la Chine le leader mondial de l’IA en trois étapes :

  • 2020 : être au niveau des leaders mondiaux (objectif atteint)
  • 2025 : faire des percées majeures en IA théorique et dans les applications économiques
  • 2030 : devenir le centre mondial de l’innovation en IA

Pour y arriver, Pékin injecte des milliards de yuans dans des laboratoires nationaux, des hubs (Pékin, Shanghai, Shenzhen, Hangzhou) et encourage massivement les partenariats entre entreprises et universités.

Les start-ups spécialisées en IA (Megvii, SenseTime, CloudWalk) ont levé des milliards de dollars. Elles se concentrent sur la reconnaissance d’images, la vision artificielle, le traitement de données massives qui sont achetés par l'administration ce qui accélère la R&D. En parallèle, des programmes de formation d’ingénieurs IA se multiplient. Le China AI Industry Development Alliance et d’autres consortiums créent des normes ce qui facilitent le transfert de connaissances.

Les applications concrètes de l’IA chinoise sont déployées massivement dans la sécurité publique (reconnaissance faciale, analyse de foules et prévention de la criminalité). Dans l’industrie, l’IA optimise les chaînes logistiques, la maintenance prédictive et le contrôle qualité. Dans la finance, elle facilite la détection des fraudes, la scoring de crédit, le conseil en investissement automatisé. En santé, elle assiste le diagnostic médical et l’analyse d’imagerie médicale. La différence avec l’occident repose sur la centralisation des données à grande échelle.

Les États-Unis conservent pour l’instant un avantage dans les semi-conducteurs IA de pointe, la recherche fondamentale et les talents. Pour réduire sa dépendance, la Chine finance la R&D dans les puces dédiées (NPU, TPU chinois) et débauche à prix d’or les meilleurs talents de TSMC à Taiwan. La Chine intensifie par conséquence le développement de puces nationales et explore de nouvelles alternatives open-source comme RISC-V. L’Europe, elle, cherche un cadre éthique. Ces questions éthiques (biais, respect de la vie privée, usage gouvernemental de la technologie) et les restrictions américaines sur l’exportation de composants clés sont au cœur des enjeux du développement de l’IA chinoise. Au demeurant, les entreprises technologiques chinoises ont atteint un niveau de sophistication en IA comparable à celui de leurs homologues occidentales. Par exemple, Alibaba a dévoilé la semaine dernière deux modèles de raisonnement avancé Marco-o1 et QwQ-32B-Preview qui rivalisent avec le modèle o1 d'OpenAI. Le modèle QwQ-32B-Preview peut traiter des entrées allant jusqu'à 32 000 mots et intègre un mécanisme d'auto-vérification des faits qui lui permette de surpasser les versions o1-preview et o1-mini d'OpenAI sur certains benchmarks comme AIME et MATH.

La Chine déploie aussi une stratégie active pour étendre l'influence de ses technologies d'IA au-delà de ses frontières. Cette approche inclut la promotion de ses normes technologiques à l'international, la formation de partenariats avec des entreprises étrangères et l'exportation de solutions d'IA vers divers marchés mondiaux. Le gouvernement chinois encourage également ses entreprises à établir des centres de recherche et développement à l'étranger ce qui facilitent l'adaptation de leurs technologies aux besoins locaux et renforçent leur présence sur la scène internationale. Cette stratégie vise à positionner la Chine comme un leader mondial de l'IA incontournable.


Les puces électroniques et semi-conducteurs (—)

La Chine importe plus de 300 milliards de dollars de semi-conducteurs par an. Elle n’a produit que 16% de sa consommation domestique de puces en 2022 ce qui est très loin de l’objectif de 70% fixé pour 2025. Les acteurs dominants (Intel, Qualcomm, Nvidia, TSMC, Samsung) restent hors de sa portée technologique la plus avancée pour l’instant. L’équipement de lithographie EUV (ASML, Pays-Bas) est clé et la Chine n’y a pas pleinement accès du fait des restrictions des États-Unis comme pour les puces avancées (Nvidia A100/H100). Le cas Taïwan est symptomatique des enjeux géopolitiques de ces composants avec TSMC. Cette société est le leader mondial de la gravure avancée. Un conflit autour de Taïwan aurait de fortes répercussions sur l’approvisionnement mondial.

En attendant, le « National Integrated Circuit Plan » (2014) et le « Big Fund » (China Integrated Circuit Industry Investment Fund, 138 milliards de dollars en deux phases) soutiennent le développement d’une chaîne de valeur locale : design (HiSilicon de Huawei), fonderies (SMIC), équipements (Naura) et matériaux (Jiangsu Azure). SMIC a réalisé des progrès (gravure 7 nm sous contrainte) mais le fossé technologique demeure (2 nm pour TSMC). L’objectif de la Chine est d’atteindre une plus grande autonomie en cherchant des technologies alternatives mais le succès n’est pas garanti indépendamment des injections massive de capitaux.


Robotique et Automatisation

Les directives gouvernementales encouragent l’automatisation pour pallier la hausse des coûts salariaux et le vieillissement de la population. La production de robots industriels a dépassé 250 000 unités en 2021 ce qui fait de la Chine le premier marché mondial de la robotique industrielle.

Les utilisations couvrent de nombreux domaines dont principalement

  • Industrie manufacturière : robots pour l’assemblage de smartphones, de véhicules, pour le soudage et l’inspection qualité.
  • Logistique : entrepôts entièrement automatisés d’Alibaba ou JD.com, AGV (Automated Guided Vehicles), robots de livraison.
  • Santé : robots-chirurgiens, exosquelettes pour rééducation, robots infirmiers, diagnostic à distance.
  • Agriculture : drones d’épandage, robots de récolte pilotés par IA.

Le gouvernement soutient la création d’instituts de recherche, encourage l’adoption de solutions open-source, et favorise le transfert de technologie. L’utilisation massive de ces outils induit une mise à disposition sans précédent de données qui vont nourrir la R&D et les IA couplées aux robots. La structure du marché du travail se transforme profondément. Les emplois répétitifs et peu qualifiés déclinent, tandis que la demande pour des ingénieurs, des techniciens spécialisés et des opérateurs qualifiés s’accroît. Pour atténuer les tensions sociales, la Chine mise sur la formation continue, la reconversion et la mobilité interne.


Ouverture vers le Monde

Les entreprises chinoises investissent dans des start-ups occidentales ou acquièrent des entreprises réputées pour leur savoir-faire. Par exemple, Midea a racheté KUKA (robotique allemande) en 2016. Evidemment, ces investissements suscitent des craintes de transfert de technologies sensibles. Les universités chinoises collaborent avec le MIT, Stanford, ETH Zurich, souvent via des laboratoires mixtes. Le Belt and Road Initiative (BRI) comprend un volet Digital Silk Road. Cela consiste à installer des câbles sous-marins, des infrastructures 5G, des centres de données, des systèmes de paiement mobiles dans les pays émergents, ce qui in fine renforçe l’influence technologique de Pékin.

Depuis 2018, la guerre commerciale sino-américaine a mis la technologie au cœur des négociations. Les restrictions américaines sur Huawei, le Clean Network Program, la pression sur la 5G dans les pays alliés illustrent cette compétition. L’Europe devient beaucoup plus prudente. Elle analyse tous les investissements et exige plus de réciprocité.


Ressources Minérales et Matières Premières Stratégiques

Les terres rares, fondamentales pour les aimants permanents, les moteurs électriques, les écrans, sont largement raffinées en Chine (plus de 80% du raffinage mondial). La Chine contrôle aussi une partie importante de la chaîne du cobalt (récolté majoritairement en RDC), du lithium (australien, sud-américain). Cependant, pour certains minerais, la Chine reste dépendante. Elle s’efforce de diversifier ses approvisionnements, en assurant le contrôle d’actifs miniers à l’étranger.

Afin de sécuriser cette matière indispensable, Pékin investit par le biais de sociétés minières étatiques (China Minmetals, Chalco) dans des mines de lithium en Australie, de cobalt en RDC, de nickel en Indonésie. Des accords bilatéraux assurent l’approvisionnement, tandis que l’industrie nationale progresse dans le recyclage des batteries et des métaux rares. La Chine utilise sa position dominante sur le raffinage des terres rares comme un atout stratégique. Elle peut influencer les prix et imposer certaines conditions. Le Japon, les États-Unis et l’UE cherchent à réduire leur dépendance en tentant de développer des projets de diversification ou de substitution.


Compétitivité et R&D

La Chine a investi plus de 2,4% de son PIB en R&D (environ 450 milliards de dollars en 2021) ce qui est proche proche de l’UE, derrière les États-Unis en valeur absolue. Le nombre de brevets déposés en Chine dépasse ceux aux États-Unis même si la qualité des brevets varie. Les publications scientifiques chinoises (notamment en IA, nanotechnologies et énergies vertes) grimpent progressivement.

Cette dynamique est contrariée par des problématiques structurelles comme le système éducatif qui malgré sa massification doit améliorer la créativité, la pensée critique, les barrières bureaucratiques, le favoritisme envers certaines entreprises publiques, la fragmentation entre provinces. La rétention des talents internationaux est aussi un défi car les ingénieurs chinois formés à l’étranger ne rentrant pas toujours au pays et les experts étrangers hésitent à s’installer durablement en Chine.


Technologies Vertes (Green Tech)

Le plan chinois vers la neutralité carbone avant 2060 implique de transformer le mix énergétique : augmenter la part du solaire, de l’éolien, de l’hydroélectrique, et investir dans le réseau intelligent et le stockage d’énergie. La Chine produit plus de 70% des panneaux solaires mondiaux et occupe une part dominante dans la chaîne de valeur des batteries (CATL, BYD). Dans l’éolien offshore, la Chine installe plus de capacité que n’importe quel autre pays. Les bus électriques chinois (Shenzhen est entièrement électrifié) et les flottes de taxi EV se répandent très vite. Malgré sa forte consommation d’énergies fossiles, la Chine se présente comme un acteur responsable sur le climat depuis de nombreuses années et elle exporte ses technologies vertes. Elle a noué des partenariats avec des pays en développement pour équiper leurs réseaux. L’Europe et les États-Unis tentent de rattraper leur retard dans la production de batteries, dans l’hydrogène vert, ou de contrer l’hégémonie chinoise non sans difficulté.


Biotechnologies et Santé Comme pour toutes les innovations du futur la Chine est aussi présente dans ce secteur. Elle ambitionne de devenir un leader mondial en sciences de la vie. Elle investit dans la génomique (BGI Group), la bio-informatique, la médecine de précision, la production de vaccins (Sinovac, Sinopharm). Les biotech chinoises lèvent des fonds à Hong Kong, aux États-Unis (NASDAQ) et en Europe. Des zones dédiées, comme le Zhangjiang Hi-Tech Park à Shanghai, concentrent laboratoires, hôpitaux, fonds de capital-risque. Des alliances internationales (Harvard, Oxford) favorisent le transfert de technologies, la participation à des essais cliniques mondiaux notamment pour les thérapies géniques et l’édition génomique (CRISPR-Cas9).

Elle traine sur ce sujet certaines casseroles comme la pandémie de Covid-19, l’expérimentation sur l’embryon, la modification du génome humain (affaire He Jiankui en 2018), … Tout ceci influe sur l’image internationale de la Chine qui renforce en ce moment ses réglementations éthiques pour redorer son blason et la confiance.


Démographie et Ressources Humaines

La démographie est au cœur de certains choix stratégiques de la Chine. Ce pays a atteint son pic de population en 2022 et décline depuis. Le vieillissement rapide (un tiers de la population aura plus de 60 ans en 2050) réduit le réservoir de main-d’œuvre bon marché et pèse sur les dépenses sociales. Dans ce futur, seul une robotisation massive physique et virtuelle permettra à la Chine de rester compétitive. L’innovation exige non seulement des ressources humaines abondantes, mais aussi un environnement favorisant la liberté académique, la circulation des idées, l’ouverture internationale. Ces facteurs détermineront la capacité du pays à maintenir sa dynamique innovante.

Concernant les ressources humaines, les programmes « Thousand Talents », « Young Thousand Talents » visent à rapatrier des chercheurs chinois de l’étranger et à attirer des experts internationaux. Malgré de récentes tensions politiques, la Chine reste une destination pour certains chercheurs attirés par les financements généreux et les infrastructures de recherche modernes. La Chine forme plus de diplômés scientifiques et techniques que les États-Unis et l’UE réunis. Les universités de Tsinghua, Peking, Fudan, Zhejiang grimpent dans les classements mondiaux. Les réformes curriculaires visent à encourager l’innovation, la créativité, l’entrepreneuriat même si la culture de l’examen reste forte.


Enjeux Économiques à Moyen et Long Terme

L’économie chinoise espère maintenir une croissance stable (autour de 4-5%) grâce à la technologie. La productivité doit compenser la contraction démographique et l’endettement de certains secteurs (immobilier).

Voici trois scénarios synthétiques du futur de la Chine :

  • La Chine surmonte les restrictions américaines, développe sa propre filière semi-conducteurs, devient leader mondial de l’IA et des green tech et établit ses normes globalement.
  • La Chine progresse mais reste dépendante sur certains segments critiques ce qui contraint sa souveraineté technologique.
  • Intensification des tensions géopolitiques, découplage technologique, ralentissement économique, pénurie de talents, …

Le secteur technologique crée des emplois qualifiés mais l’automatisation en supprime d’autres. Le gouvernement doit gérer ces transitions pour préserver la stabilité sociale ce qui est un enjeu fondamental pour le Parti Communiste Chinois (PCC). Vont ils réussir ?


Vous trouverez ci-dessous un SWOT de synthèse du système technologique chinois

Forces : soutien étatique soutenu, marché domestique énorme, capacité d’exécution rapide, écosystème numérique intégré, montée en compétences, volonté politique de long terme. Faiblesses : dépendance aux semi-conducteurs, obstacles bureaucratiques, manque d’innovation radicale (vs. incrémentale), pression internationale, réticences des talents étrangers.

Opportunités : leadership dans l’IA, la 5G, le solaire, la mobilité électrique, l’influence normative mondiale, diversification des marchés émergents. Menaces : découplage technologique avec l’Occident, restrictions sur les transferts de technologies, réactions hostiles à l’expansion du modèle chinois, ralentissement économique intérieur.


Ce qui nous amène naturellement à des recommandations :

  • Pour la Chine : renforcer la R&D fondamentale (mathématiques, physique, chimie), développer ses propres logiciels EDA, favoriser l’éducation à la créativité, consolider un cadre éthique pour l’IA, améliorer la transparence.
  • Pour les entreprises étrangères : diversifier leurs sources d’approvisionnement, anticiper les politiques industrielles chinoises, adapter leurs produits aux standards chinois, investir dans la connaissance du marché local.
  • Pour les autres pays : coopérer entre alliés pour développer des alternatives, définir des normes éthiques communes, investir dans l’éducation et la R&D nationale, surveiller les dépendances stratégiques.

La Chine est devenue un acteur incontournable de la technologie mondiale. Sa montée en puissance résulte d’une vision stratégique, d’une mobilisation de ressources considérables, d’un apprentissage rapide et d’un marché interne dynamique. Les décennies à venir détermineront si elle parvient à atteindre la souveraineté technologique et à imposer ses normes, ou si elle butera sur des goulots d’étranglement techniques, démographiques ou géopolitiques. L’avenir dépendra également des relations sino-occidentales, de la capacité de la Chine à rassurer ses partenaires, de la résilience de son système éducatif et de sa faculté à innover de manière autonome et responsable. L’issue aura un impact considérable sur l’économie mondiale, la géopolitique, et l’architecture technologique du XXIe siècle.


Bonnes métamorphoses et à l’année prochaine !

Stéphane



Christian Jumelet

Global Enabler, advisor for SDG entreprises.«Altruistic projects, that’s my commitment to spread, popularize GUILD4AI vision.» Founder #GUILD4AI G4AI #AI #AFRIA #CDA #Africa L’Hacienda member 🌶️ #G4AI member 🌵

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