Connaissez-vous la tontine ?

Connaissez-vous la tontine ?

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1      C’est quoi la tontine ?

La tontine est un type de contrat créé à l’origine par Lorenzo Tonti au XVIIe siècle à la demande du Cardinal Mazarin pour permettre à Louis XIV de financer ses guerres. L’idée était alors d’inviter des investisseurs à déposer de l’argent dans un pot commun pour en retirer une rente viagère. A la mort de chaque investisseur, les survivants se partageaient sa part de la rente et à la mort du dernier investisseur le capital revenait à l’état.

Depuis l’époque, la notion de Tontine a quelques peu changé.

On parle aujourd’hui de « clause de tontine » ou de « clause d’accroissement ». Il s’agit d’une clause insérée dans un contrat d'acquisition en commun selon laquelle « la part du ou des premiers décédés reviendra aux survivants de telle sorte que le dernier vivant sera considéré comme seul propriétaire de la totalité des biens ».

Ainsi par cette clause, le bien meuble ou immeuble acquis en commun par un groupe d’investisseur devient la propriété, non plus de l’état comme du temps de Louis XIV, mais du dernier survivant.

Le terme « clause d’accroissement » est en fait quelque peu impropre. En effet il suppose que le patrimoine de l’un s’accroit au décès de l’autre ce qui n’est pas tout à fait le cas. En effet chacun des co-contractants devient propriétaire sous condition résolutoire du décès de l’autre et sous condition suspensive de sa propre survie.

Ainsi, s’éteignant, le pré-mourant est censé n’avoir jamais été propriétaire du bien alors que survivant est, lui, réputé être le seul propriétaire depuis l’origine de l’acquisition.

C’est une des caractéristiques les plus étranges de la tontine. Tant qu’il y a plusieurs survivants, les co-contractants ne sont ni propriétaires, ni même indivisaires du bien. Puis au moment où il n’en reste qu’un, celui-ci est réputé en avoir toujours été propriétaire. D’aucun y verront une application de l’intrication quantique appliqué à la finance 😊.

Le fait que le survivant soit réputé avoir été le seul propriétaire depuis le jour de l’acquisition du bien, fait qu’il n’y a donc pas de transmission. Ce qui permet de contourner les règles liées à la réserve héréditaire.

Ce qui explique que cette clause est le plus souvent utilisée par des couples mariés en régime de séparation de bien, par des partenaires de PACS ou par des concubins ayant des enfants d’un premier lit, afin de leur permettre de jouir, leur vie durant, du bien qu’ils ont acquis ensemble et dont le survivant recueillera la propriété en évinçant complétement les héritiers du prémourant.

Cependant, la pratique de la tontine pour les biens immobiliers était quelques peu tombée en désuétude depuis le 19 janvier 1989.En effet à cette date, le législateur a décidé de soumettre les sommes reçues par le dernier survivant aux droits de succession (art 754 A du code général des impôts), ce qui pour des investisseurs n’ayant pas de lien entre eux (les concubins par exemple), conduit à une taxation de 60%. Ce qui fait tres mal….

 Pour les conjoints ou pour les partenaires de PACS, l’exonération de droits de succession entre eux conserve l’intérêt du pacte tontinier.

Il existe toutefois une solution pour rendre la tontine attractive même entre personne non liées par un mariage ou un PACS. Solution que nous allons aborder dans la chapitre suivant.

Outre les tontines qui permettent l’acquisition en commun d’un immeuble ou d’un bien meuble corporel (voiture, œuvre d’art, etc…), il existe également une tontine particulière dite « tontine Financière » que nous aborderont au §4 et qui présente de nombreuses particularités.

2 : TONTINE ET SOCIÉTÉS

Il s’agit ici non plus d’insérer une clause d’accroissement dans le contrat d’acquisition mais plutôt au niveau des statuts d’une société (par exemple une SCI). C’est la société qui réalisera ensuite l’acquisition du ou des biens.

Les statuts prévoient alors que les parts sociales seront attribuées à chacun des associés sous la condition suspensive de sa survie et sous la condition résolutoire de son prédécès.

Par quelle subtilité le fait que la clause soit insérée dans les statuts d’une société rend-t-il cette méthode intéressante ?

Tout simplement à cause de la rédaction même de l’article 754 A du CGI qui stipule que : « Les biens recueillis en vertu d'une clause insérée dans un contrat d'acquisition… sont réputés transmis à titre gratuit» (c’est-à-dire taxés aux droits de succession). La clause n’étant plus insérée dans un contrat d’acquisition mais dans les statuts d’une société, l’article 754 A du CGI ne trouve plus à s’appliquer.

Un arrêt rendu le 18 novembre 2003 par la cour d'appel de Chambéry a confirmé cette interprétation. Le survivant est assujetti à des droits de mutation à titre onéreux au taux de 5% sur les parts reçues par effet du décès.

Pour éviter que la validité de la société puisse être remise en cause (et pour que la société ne se retrouve pas avec un associé unique), il est conseillé de maintenir une ou plusieurs parts en dehors de la tontine. Le fait de maintenir des parts hors du pacte tontinier a également pour effet d’assurer la qualité d’associé des intervenant et de permettre ainsi la création de compte courant d’associé.

Comme aucun de co-tontiniers, n’est propriétaire des parts objet de la clause d’accroissement, leur vie durant, les statuts devront également prévoir les droits de chacun sur les bénéfices distribués, dans la limite des clauses léonines.

La constitution d’une société favorise également la construction d’un patrimoine immobilier par l’acquisition successive de biens, sans avoir à se soucier de la diminution progressive des chances de survie de la personne la plus âgée, puisque l’existence de l’aléa ne s’apprécie qu’au jour de la rédaction des statuts et non pas au jour de l’acquisition des biens par la société.

Exemple :

  • Mr Dupont vit maritalement avec Mme Martin.
  • Ils créent une SCI en vue de l’acquisition d’une maison de 500 000€. Chacun possède 250 parts numérotées de 1 à 250 pour Mr Dupont et de 251 à 500 pour Mme Martin.
  • Ils ont inclus une clause de tontine dans les statuts de la SCI qui stipule qu’à titre de clause aléatoire, le premier mourant d'entre eux sera considéré comme n'ayant jamais eu droit à la pleine propriété des parts numérotées de 2 à 250 et de 252 à 500 qui leur ont été attribuées en représentation de leurs apports respectifs, et que ces dernières appartiendront en totalité en pleine propriété au survivant d'eux, sur la tête duquel la pleine propriété sera censée avoir toujours reposé depuis le jour de la création de la société.
  • Ainsi si Mr Dupont décède en premier, Mme Martin est réputée être pleine propriétaire des parts 2 à 250 (attribuée à Mr en représentation de ses apports) et des parts 251 à 500.
  • Le bien étant évalué à 500 000€ au jour du décès de Mr Martin, les droits de mutation à titre onéreux seront de (249/500)*500 000 * 5% = 12 450€.
  • Les héritiers de Mr Martin deviendront propriétaire de la part numéro une pour une valeur de (1/500)*500 000 = 1 000€ (dont les droits à payer dépendront des liens de parentés avec Mr Dupond et des abattements non consommés)
  • Si rien n’avait été prévu dans les statuts et que les parts avaient été transmises par testament, les droits entre concubin auraient été de ((250/500)*500 000 – 1594)*60% = 149 044€ sans compter que la réserve héréditaire des enfants de Mr Dupont auraient pu réduire le montant des parts transmises à Mme martin.

Le législateur maintiendra-t-il dans le temps la rédaction de l’article 754 A permettant de contourner les droits de mutation à titre gratuit en passant par les statuts d’une société ?
Cela fait 42 ans qu’il en est ainsi et malgré la décision de la cour de cassation de 2003, le législateur n’a pas souhaité en modifier la rédaction. On peut donc supposer qu’il s’accommode parfaitement de cette écriture de l’article 754 A.

Autre effet de cette clause : Comme nous l’avons indiqué plus haut, chacun des deux est propriétaire des parts sous une double condition : résolutoire, d’une part, du décès de l’autre et suspensive, d’autre part, de sa propre survie. Ils ne sont donc ni indivisaires ni plein propriétaires des parts leur vie durant. Ils ne sont en fait que titulaire d’un droit conditionnel sur les parts. De fait, seul leur commun accord pourra permettre l'aliénation des parts sociales objet du pacte tontinier et leur disposition sous quelque forme que ce soit et à quelque titre que ce soit, ou même leur nantissement. Les parts sont donc inaliénables et également comme nous le verront plus loin insaisissables (cf §5.2).

Il y a encore un autre effet à cette clause. Elle va faire basculer la totalité du patrimoine de la société dans une souche familiale plutôt que dans l’autre selon l’ordre des décès. Ce qui ne sera pas forcément souhaité par les co-contractants soit parce qu’il n’y a pas d’enfants soit aux contraires parce qu’il y a des enfants d’un premier lit.

Dans ces situations, Il sera nécessaire pour éviter un basculement entre les souche familiales :

  • Soit d’utiliser de préférence, le montage classique de démembrement croisé des parts dans lequel les deux associés réalisent un échange de l'usufruit des parts de chaque titulaire (Mr DUPONT cédant l'usufruit de ses parts et recevant l'usufruit des parts de Mme MARTIN et inversement),
  • Soit d’utiliser des apports en compte courant d’associé pour financer les biens acquis par la société, les compte courant d’associés se retrouvant sous forme de créance dans la succession du prémourant. Attention toutefois à cette solution, les héritiers pouvant à tout moment réclamer cette créance, il faut que la société soit en mesure de la rembourser sans obliger à la vente du bien que le prémourant souhait voir appartenir à son co-tontinier.

Autre précaution à prendre. En cas de mésentente entre les associés, la clause de tontine qui prévoit l’attribution rétroactive de la propriété des parts, semble empêcher la mise en œuvre de l’article 1869 du code civile permettant à un associé de se retirer totalement ou partiellement de la société. En effet puisque les parts ne lui appartiennent pas encore, il ne peut pas en demander l’annulation.

Le remède le plus simple à cette impossibilité est donc d’anticiper cette crise en stipulant, dans les statuts, que le blocage de la société (par exemple l’impossibilité de se prononcer sur les résultats de l’exercice) entraîne de plein droit la dissolution de la société et la renonciation aux conditions.

3:  FISCALITÉ DES TONTINES IMMOBILIERES OU SUR MEUBLES CORPORELS

3.1 : Fiscalité pour le survivant

Comme cela a déjà été mentionné, l’article 754 A du CGI analyse la clause de tontine comme une mutation à titre gratuit.

Cette disposition ne s’applique cependant pas à l’habitation principale communes à deux acquéreurs tontiniers, lorsque celle-ci à une valeur inférieure à 76 000€ (sauf sur option expresse du survivant pour les droits de mutation par décès).

Dans le cas général, les droits de mutation sont donc liquidés au décès de chaque co-contractant au tarif applicable au moment du décès et en fonction du lien de parenté existant entre le défunt et chaque bénéficiaire de l’accroissement.

Ainsi depuis la loi TEPA, lorsque le bénéficiaire survivant est le conjoint ou le partenaire de PACS du défunt, aucun droit n’est dû.

Dans le cas où il y a plus de deux co-tontiniers, les bénéficiaires seront soumis à des droits de mutations sans avoir la certitude d’être eux même le dernier survivant et donc de devenir propriétaire du bien. Ils auront donc potentiellement payé des droits de mutation sans recevoir le bien ; donc pour rien. S’ils sont étrangers au défunt, ces droit peuvent être élevés (60% de la part du prémourant avec un abattement de seulement 1 594€). On comprend donc rapidement l’intérêt de limiter le nombre de personnes parties à un contrat tontinier.

Comme cela a été évoqué au §2, les dispositions de l’article 754 A ne sont pas applicables aux biens recueillis en vertu d'une clause de tontine qui ne serait pas insérée dans un contrat d'acquisition en commun. C’est par exemple le cas de clause de tontine insérées dans les statuts de société. Ce sont alors les droits de mutation à titre onéreux qui s’appliquent.

3.2 : Fiscalité des plus-values

Lorsque le dernier survivant devient propriétaire du bien, il n’y pas d’imposition de la plus-value car le bien est censé lui avoir toujours appartenu.

Ce n’est qu’au moment où il décidera de vendre ce bien, qu’il pourra y avoir imposition de la plus-value.

Encore une fois, comme il est censé être propriétaire du bien depuis le jour de l’acquisition par le contrat tontinier, c’est la date de l’acquisition initiale qui servira de base pour le calcul des abattements en fonction de la durée de détention du bien.

Une question restait en suspens. Fallait-t-il prendre comme prix d’acquisition le prix payé par le seul survivant ou le prix payé par l’ensemble des co-contractant ?

La réponse est venue d’un rescrit en date du 6 février 2007, dans lequel l’administration fiscale indique que c’est la totalité du prix payé par l’ensemble des co-contractant et la date d’acquisition en commun du bien qui doivent être pris en compte.

Si les co-contractant décident unanimement de vendre le biens acquis à l’aide d’un contrat tontinier, cela reviens à considérer qu’ils ont renoncé unanimement à la tontine et sont devenus indivisaires (cf §5.10) .La plus-value est alors traitée comme dans le cas d’une indivision.

3.3 Fiscalité des revenus

Chacun des co-contractants est réputé tirer des revenus du bien acquis par la tontine à proportion de ses apports ou de la clause de répartition prévue dans les statuts.

Les revenus sont taxés dans la catégorie des biens détenus au travers de la clause de tontine.

  • Fiscalité des revenus fonciers si le bien, acquis directement par le contrat de tontine, est un immeuble loué nu ou si la société, dans les statuts de laquelle est insérée la clause de tontine, est transparente et à prépondérance immobilière.
  • Fiscalité de revenus de capitaux mobiliers si la société dans les statuts de laquelle est insérée la clause de tontine est soumise à l’impôt sur les société
  • Fiscalité des BIC si le bien acquis est loué meublé
  • Fiscalité des rachats sur les contrats d’assurance vie dans le cas d’une tontine financière (cf §4.1.2).

LES TONTINES FINANCIÈRES

Les articles R322-139 est suivants du code des assurances prévoient la création de « sociétés à forme tontinières ».

Il ne faut pas les confondre avec les sociétés dans lesquelles une clause de tontine a été insérée dans les statuts.

Il s’agit de sociétés réunissant leurs adhérents en groupes distincts dénommés associations (chaque association devant détenir au moins 200 membres) et répartissent, à l'expiration de chacune de ces associations, les fonds provenant de la capitalisation en commun de leurs cotisations, déduction faite de la partie affectée aux frais de gestion et d'acquisition statutaires, entre les survivants des associations en cas de vie ou entre les ayants droit des décédés des associations en cas de décès, en tenant compte de l'âge des adhérents et de leurs versements.

L’investissement se réalise généralement dans les associations distribuant les sommes capitalisées entre les investisseurs survivants (dites « associations en cas de vie » ou « association en cas de survie »). Ces associations ont une durée, définie dès l’origine, qui doit être comprise entre 10 ans au minimum et 25 ans au maximum et doivent porter sur un minimum de 160 000€.

L’investissement peut être réalisé en un seul versement ou par des versements réguliers tout au long de la vie de l’association. Dans cette seconde hypothèse, en cas d’arrêt des versements réguliers par un des sociétaires, les statuts de l’association tontinière doivent prévoir comment ce sociétaire participera à la répartition des capitaux au terme de l’association.

Afin d’éviter d’avoir investi à fond perdu en cas de décès, les sociétés gérant ces associations prévoient généralement des contre-assurances décès avec des versements réguliers permettant aux ayants droits de récupérer le capital investi en cas de prédécès de leur parent ou légataire.

Les cotisations aux contre-assurances décès sont calculées en tenant compte de l'âge des sociétaires à l'époque de chaque échéance et sont proportionnelles au montant du capital récupéré par les ayants droits. Il s’agit de versement à fond perdu en cas de survie. Plus l’investisseur avance en âge, plus le montant des échéances augmente.

Le principal espoir de gain de tels placement par rapport à des solution plus classiques comme un contrat de capitalisation ou d’assurance vie est donc d’être survivant au terme de la durée prévue pour cette association et qu’entre temps un certain nombre d’autres membre soient décédés.

C’est un investissement qu’il faut réaliser en étant relativement jeune afin que le montant total des cotisations de la contre assurance décès ne soit pas supérieur à la somme initialement investie en cas de décès ou au gain espéré en cas de vie et que la probabilité d’être encore vivant au terme de la durée de vie de l’association soit grande.

4.1 Fiscalité des tontines financières

4.1.1 Fiscalité en cas de décès

Si aucune contre-assurance décès n’a été souscrite (ou que l’assuré a arrêté de payer les échéances, celles-ci devenant trop importantes au fil de l’avancée en âge), les héritiers n’héritent de rien. Le problème de la fiscalité ne se posent donc tout simplement pas !

Si l’investisseur a souscrit une contre assurance décès et paye régulièrement ses primes, alors en vertu de l’article 132-12 du code des assurances, le capital (ou la rente) versé à son décès que ce soit au bénéficiaire désigné ou à ses héritiers ne fait pas partie de sa succession.

Seule la prime versée par l’assuré l’année du son décès est imposable :

  • Soit au taux de 20% si elle a été versée avant les 70 ans de l’assurée (990 I CGI). Mais chaque bénéficiaire à le droit à un abattement de 152 500€ tous contrat d’assurance vie et d’assurance décès confondus.
  • Soit aux droits de mutation à titre gratuits en fonction du lien entre l’assuré et les bénéficiaires (757 B CIG). Mais ceux-ci bénéficient d’un abattement de 30 500€ tous contrats confondus et cette fois également tout bénéficiaires confondus.
  • Les échéances de l’assurance décès sont totalement exonérées si le bénéficiaire est le conjoint ou le partenaire de PACS (796-0 bis du CGI) de l’assuré. Sont également exonérés les frère ou sœur de l’assuré, célibataire, veuf, divorcé ou séparé de corps, à la double condition :  qu’ils soient, au moment de l'ouverture de la succession, âgés de plus de cinquante ans ou atteints d'une infirmité les mettant dans l'impossibilité de subvenir par leur travail aux nécessités de l'existence ; ET qu'ils aient été constamment domiciliés avec le défunt pendant les cinq années ayant précédé le décès.

Exemple de calcul des droits:

  • Mr Martin dispose d’un capital de 400 000e qu’il souhaite investir. Il souscrit pour cela une assurance vie pour un montant de 200 000€ et une tontine financière également d’un montant de 200 000€ assortie d’une contre assurance décès.
  • Quelques années plus tard, Mr Martin décède à l’âge de 61 ans. Il a versé, l’année de son décès, une prime annuelle de 2 000e pour que son assurance décès verse un capital de 200 000€ à son unique enfant. Son unique enfant est également le seul bénéficiaire de l’assurance vie qui a une valeur de 250 000€ net de prélèvement sociaux au jour de son décès.
  • Les 200 000€ perçus au titre de l’assurance décès ne subissent aucune fiscalité.
  • L’abattement de 152 500e auquel a droit son fils est composé de 2 000€ correspondant à la prime versée l’année de son décès et 150 500€ de reliquat applicable à l’assurance vie (application du 990 I car comme il est décédé à 61 ans les primes ont forcément été versées avant ses 70 ans)
  • Pour l’assurance vie, son enfant perçoit donc 250 000€ – (250 000€ – 150 500€)*20% = 230 100€.
  • Au final son enfant aura donc reçu 200 000€ + 230 100€ = 430 100€ au moment du décès de son père net de fiscalité.  

4.1.2 : Fiscalité en cas de vie

Pour les tontines financières, c’est la fiscalité de l’assurance vie qui s’applique.

C’est-à-dire que les plus-value réalisées sont d’une part soumise aux prélèvement sociaux de 17.2% pour leur totalité et d’autre part soumis à la fiscalité sur les revenus de la manière suivante :

1.) Pour les intérêts acquis à partir des primes versées AVANT le 27/09/2017

 Ces intérêts sont taxés au taux de 7.5% pour la part qui dépasse 4 600e pour un célibataire ou 9 200e pour un couple ou sur option à l’impôt sur le revenus (le contrat ayant forcément plus de 8 ans car le durée minimale d’une association tontinière est de 10 ans)

2)      Pour la part des intérêts acquis à partir des primes versées A PARTIR DU 27/09/2017

Apres abattement de 4 600e pour un célibataire ou 9 200e pour un couple, ces intérêts sont imposés

          i.      Soit sur option globale, au barème de l'impôt sur le revenu

          ii.     Soit au taux de 7.5% pour la seule la fraction des produits correspondant aux primes versées à compter du 27.9.2017 n'excédant pas 150 000 € (tous contrats détenus par le souscripteur confondus), puis au taux de 12.8% pour le reste

Dans la pratique, il n’est pas possible pour un investisseur ayant ouvert un contrat avant 27/09/2021 et ayant fait des versements avant et après cette date, de savoir quelle part des intérêts provient des versements effectués avant le 27/09/2021 et de ceux effectués après cette date. C’est le gestionnaire de l’association tontinière qui doit maintenir deux compartiments distinct pour gérer la fiscalité des rachats

5: PRECAUTIONS, AVANTAGES et LIMITES

5.1 PRECAUTION: Eviter les requalifications

La validité de la tontine est subordonnée à la preuve que la clause fait naitre une chance de gain ou un risque de perte pour les deux parties (il s’agit d’un contrat aléatoire). Ce qui implique que toutes les parties co-contractantes aient une réelle espérance de vie au moment de la signature du contrat et qu’elles aient toutes participé au financement du bien dans des proportions équivalentes ou prenant en compte l’ecart d’espérance de vie des co-contractants.

Dans le cas contraire, la tontine sera requalifiée en libéralité ou même purement considérée comme n’ayant jamais été écrite.

Il ne s’agit pas que chaque partie ait la même espérance de vie ( la jurisprudence a ainsi valider des clause où l’écart d’âges était de plus de 18 ans (cours d’appel d’Aix en Provence 13/12/1988) mais que chacun ait une chance de survivre à l’autre. Les requalification ou annulation de la clause sont donc tres probables si l’un des co-contractants se sait atteint d’une maladie incurable avec une faible espérance de vie ou s’il y a une forte différence d’âge entre les co-contractants (par exemple une tontine entre et ses enfants alors qu’il a eu ses derniers à un âge avancé).

Il a par exemple été jugé qu’un écart d’âge de 29 ans entre un oncle et sa nièce alors que de plus celui-ci avait subi plusieurs interventions médicales sans pour autant être atteint d’une grave maladie était de nature à entrainer un déséquilibre dans la clause d’accroissement (et ce, même si l’oncle a vécu plus de 10 ans après la création de la société).(CA Bordeaux 1iere Chambre civile 09/06/2008 n°07/04003).Dans cette affaire la clause de tontine n’a pas été considérée comme nulle mais a été requalifiée en donation de l’oncle à sa nièce.

Il n’est pas non plus nécessaire que les montants investis par chaque contractant soient strictement équivalents. On peut par exemple prévoir que le co-contractant le plus jeune apporte un peu plus qu’un co-contractant plus âgé pour compenser sa plus grande probabilité de disparaitre en dernier. Cependant si l’écart de financement est tel que l’espoir de gain, pour celui qui a apporté le plus, est quasi nul, il y aura également requalification.

5.2     AVANTAGE: Insaisissabilité partielle

Les tontiniers ne sont titulaires que de droits de propriété conditionnels, il en découle qu’un créancier de l’un des co-contractants ne peut pas provoquer le partage du bien afin de saisir la part revenant au co-contractant (ce dernier n’étant ni propriétaire tant que les autres co-contractants ne sont pas décédés ni considéré comme indivisaire).

En effet le droit de gage des créanciers ne peut porter que sur un bien dont le débiteur est propriétaire. Ce qui, en l’espèce, n’est pas le cas. Le bien est donc inaliénable si la totalité des co-contractants ne sont pas débiteurs du créancier.

Dans le cas où tous les co-contractants sont débiteurs, ce créancier pourra forcer la vente du bien.

Attention également, une tontine créée uniquement pour éviter une saisie (par exemple par ce que la dette existe déjà au moment de l’acquisition avec clause de tontine et que les co-contractants savent qu’elle ne pourra pas être remboursée) sera également remise en cause grâce à l’action Paulienne.

5.3     PRECAUTION : attention à l’abus ou au mini abus de droit

Si le contrat tontinier ou la société n'est constitué que dans le but d'éviter l'application des droits de mutation à titre gratuit, et donc dans un but uniquement (ou principalement) fiscal, la différence de fiscalité pourrait être requalifiée en libéralité et rapportée à la succession.

 Pour éviter ce risque nous conseillons d’éviter les tontines entre parents et enfants, de veiller à une répartition des apports prenant en compte la différence d’âge entre les co-contractant et de veiller à ce que l’aléa sur l’espérance de vie des co-contractant soit réel (pas de maladie grave connue d’un des co-contractant au moment de la signature du contrat ou de dépôt des statuts de la société).

 Dans le cas d’une clause de tontine insérée dans les statuts d’une société, celle-ci doit aussi avoir une vie réelle. Ainsi, une société pour laquelle il n’y aurait pas d’affectio societatis, c’est-à-dire de volonté réelle des associés de collaborer, serait considérée comme un artifice n’ayant d’autre but que de contourner l’impôt.

 Les indices permettant de démontrer cette absence d’affectio societatis sont entre autres, l’absence d’assemblée générale, l’absence systématique d’un des associés à ces assemblées, l’absence de tenue d’une comptabilité, l’absence de participation aux bénéfices et aux pertes, aucune communauté d’intérêts, …)

 5.4     PRECAUTION : Attention aux dates

Il n'est pas possible de conclure un pacte tontinier postérieurement à l'acte d'acquisition ou postérieurement à la création d’une société dont les statuts contiennent une clause de tontine.

En effet dans un tel cas, la clause ne rétroagirait qu'au jour de l'acte complémentaire. Le bien ou les parts aurait donc appartenu, pendant la période entre l'acquisition et l'acte complémentaire, au prémourant. La tontine serait alors analysée comme un pacte sur une succession future, ce qui est prohibé par la loi. Il y aurait alors nullité de la clause de tontine.

5.5     PRECAUTION : Préciser la rétroactivité de la condition suspensive

Le nouvel article 1304-6, du Code civil (en date du 01/10/2016) prévoit dans son premier alinéa que la réalisation d'une condition suspensive ne joue plus, par principe, rétroactivement.

Il faut donc maintenant prévoir explicitement dans la clause de tontine que « l'accomplissement de la condition suspensive rétroagira au jour du contrat ».

Exemple de clause (tirée du rapport du 118e congrès des notaires de France)

« Les acquéreurs conviennent, à titre de clause aléatoire, que le premier mourant d'entre eux sera considéré comme n'ayant jamais eu droit à la propriété de l'immeuble objet des présentes, qui sera censé avoir toujours été la propriété du survivant, depuis le jour de l'acquisition, la présente clause de tontine conférant ainsi à chacun d'eux la propriété de l'immeuble tout entier, à partir du jour de son acquisition, sous condition suspensive rétroactive de sa survie, par dérogation aux dispositions de l'alinéa 1er de l'article 1304-6 du Code civil, et sous condition résolutoire de son prédécès ; en conséquence, le dernier survivant des acquéreurs sera censé tenir directement et dès l'origine ses droits du vendeur. »

5.6     Précaution : Attention à l’international

Le recours à la technique de la tontine devra s'accompagner d'une vérification, d'une part, de la possibilité de mise en œuvre dans un contexte international et, d'autre part, de la fiscalité applicable.

 Par exemple si l’on suppose que la succession sera soumise à une loi Anglo-saxonne, la rédaction d’un « joint tenancy » devra être préféré ou être fait en complément à la tontine française. Il s’agit ni plus ni moins d’une tontine en droit Anglo-Saxon qui permet de plus la transmission du bien au survivant sans n’avoir recourt ni à un exécuteur testamentaire ni à une cour de justice. 

 5.7     Avantage : Eviter les coups bas entre les co-contractants

L’article 1304-3 prévoit que la condition suspensive est réputée accomplie si celui qui y avait intérêt en a empêché l'accomplissement, et que la condition résolutoire est réputée défaillie si son accomplissement a été provoqué par la partie qui y avait intérêt.

Ainsi ,s’il prenait l’idée à l’un des co-contractant de commettre un homicide sur les autres pour devenir le seul survivant, la clause résolutoire de prédécès des disparus serait considérée comme n’étant pas réalisée et la condition de survie du pré mourant réalisée.

S’il n’y a que deux co-contractant le meurtre de l’autre co-contractant aurait donc l’effet inverse de celui désiré. C’est-à-dire que c’est le prémourant (et donc ses héritiers) qui deviendrait propriétaire du bien objet de la tontine.

S’il y a plus de deux co-contractants, le problème est plus complexe. En effet s’il est clair que le criminel ne pourra pas devenir propriétaire car les clauses suspensives et résolutoires du prémourant pourront toujours lui être opposé. Mais qu’en est-il pour les autre co-contractant étranger à l’homicide ? Il ne nous semble pas que l’article 1304-3 puissent leur être opposés car ils n’ont ni empêché la clause suspensive ni provoqué la clause résolutoire.

5.8     AVANTAGE : permet de contourner la réserve héréditaire

Comme présenté au §1, le fait que le dernier survivant soit réputé avoir toujours été l’unique propriétaire du bien et donc que corolairement les autre co-contractants n’aient jamais été propriétaires, il n’y a dans les faits aucune transmission. Les héritiers du co-contractant ou des co-contractants prédécédés ne peuvent donc pas prétendre à recevoir une partie du bien.

Le bien n’étant pas dans la masse successorale des co-contractants prédécès, aucune réserve ne peut lui être appliquée.

5.9     LIMITE : Imposition à l’IFI

Comme nous l’avons présenté précédemment à plusieurs reprises, la tontine repose sur une double stipulation d’une part résolutoire du décès des autres co-contractants et d’autre part suspensive de sa propre survie.

D’une manière générale, les biens immobiliers détenus sous clauses résolutoire sont soumis à IFI tant que la condition résolutoire n’est pas avérée alors que les biens détenus sous réserve d’une clause suspensive ne le sont pas.

Les biens détenus au travers d’une tontine étant soumis aux deux types de clause, la question se posait donc de savoir si le bien immobilier, ainsi détenu, était ou non imposable à l’IFI.

Le législateur y a apporté une réponse par la création le 01/01/2018 de l’article 968 bis du code général des impôts qui stipule que ces biens sont inclus dans le patrimoine de chacun des contractants, au prorata des sommes investies par chacun des survivants, dans le cas d’un contrat tontinier (ce qui exclut normalement les sociétés tontinières et les sociétés contenant une clause de tontine dans leurs statuts)

Cependant, l’administration fiscale précise que les sociétés à forme tontinière définies par l’article R 322-139 du code des assurance (les tontines financières mentionnées au §4), sont également soumises à ce nouvel article 968 bis et donc à l’IFI (cf BOI-PAT-IFI-20-20-30-30 points 280 et suivants) a proportion des biens immobiliers détenus par l’association tontinière et au prorata du montant investi par chaque sociétaire.

Cette extension de la volonté du législateur par l’administration fiscale nous semble contestable. Il n’en demeure pas moins un risque de redressement par l’administration si la tontine financière possède des actifs immobiliers tant qu’une cour de justice n’aura pas débouté l’administration fiscale ou que le législateur n’aura pas préciser ce point.

5.10   LIMITE : La Tontine est un carcan

Il est impossible de sortir d’une tontine sans l’accord unanime des co-contractants. A l’inverse de ce qui se passe dans une indivision, les acquéreurs ne peuvent pas provoquer le partage en justice, ni même exiger la vente du bien en application de l’article 815 du code civil.

Imaginons des partenaires de PACS qui acquièrent leur résidence principale à l’aide d’un contrat tontinier et que quelques années plus tard, ils décident de se séparer. Si, l’un d’eux, veut conserver le bien pour y demeurer, le second ne peut pas s’y opposer. Il devra soit accepter une vie commune soit aller en justice pour réclamer un loyer à celui qui conserve la jouissance du bien. Ainsi en a statué la 3e chambre civile de la cours de cassation le 17/12/2013 (arrêt n°12-15.433) en précisant que l'achat en commun d'un bien immobilier avec clause d'accroissement est exclusif de l'indivision mais confère aux parties des droits concurrents de jouissance indivise sur le bien tant que la condition de prédécès d'un des acquéreurs ne s'est pas réalisée. Dès lors une indemnité d'occupation est due à la partie co-titulaire du droit de jouissance par celle qui a la jouissance exclusive du bien.

De même les tontines financières mentionnées au §4 ne permettent aucune possibilité de rachat anticipé. Il faut obligatoirement attendre le fin de l’association tontinière.

Il est toutefois possible de réaliser une renonciation unanime à la clause de tontine. Ce qui aura pour résultat, du fait de l'abandon de la condition suspensive et de la condition résolutoire, de placer les parties sous le régime de l'indivision. Seul le droit fixe des actes innomés (315€) sera perçu sur l'acte de renonciation. Encore convient-il qu'il s'agisse d'une renonciation pure et simple qui n'entraîne pas une modification des droits indivis des parties dans le bien acquis, car tout changement dans la répartition de leurs droits serait traité comme une mutation à titre gratuit ou onéreux, selon que ce transfert serait motivé ou non par une intention libérale.

Enfin une renonciation unilatérale à la clause de tontine est également possible. Elle s’analyse comme une mutation à titre gratuit (c’est-à-dire une donation).

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