Faire évoluer notre métier pour réinventer la ville
La ville de demain, tout le monde en parle, mais l’on parle moins de ceux qui sont amenés à la concevoir. Comment s’ouvrir à de nouveaux talents capables de la façonner ? De quelles compétences avons-nous besoin ? Une chose est sûre : nous ne ferons pas surgir une nouvelle nature de ville en appliquant les mêmes recettes qu’hier. Humaniser la ville, réinventer les lieux de vie, vivre en mobilité, digitaliser l'expérience urbaine… tous ces défis exigent une nouvelle manière d’aborder nos métiers pour impulser le changement.
Pour toute révolution, il faut une occasion.
Dans la promotion immobilière, le point d’inflexion a été, selon moi, l’appel à projet « Réinventer Paris » lancé par la Maire de Paris, Anne Hidalgo, qui a été une formidable opportunité de « renverser la table ». Ce qui s’y est cristallisé, comme on le voit chez tous les lauréats, c’est l’ambition d’être à la hauteur des grandes mutations de notre temps : la transformation digitale, l’économie du partage ou encore le développement durable.
Toute transformation commence par soi-même. Pour réinventer la ville, les promoteurs immobiliers doivent adopter une nouvelle vision, plus large, de leur métier – et travailler différemment.
Le premier changement, c’est le travail en réseau. Nous ne pouvons espérer participer à la transformation positive des villes qu’en travaillant en étroite relation avec d’autres acteurs, aménageurs et donneurs d’ordre, architectes et innovateurs de tous horizons. Une méthode plus collaborative qui est au cœur du digital et que les nouvelles technologies rendent toujours plus fluides. C’est capital, car nous ne pouvons plus concevoir nos lieux de vie de façon parallèle et séparée, comme si tout fonctionnait indépendamment. Nous devons envisager la ville dans sa globalité, au travers de toutes les problématiques des cités d’aujourd’hui : besoin de nature, nouvelles mobilités et, surtout, les aspirations de ceux qui y vivent.
En ce sens, nous avons besoin, plus que jamais, de profils disposant de compétences transverses, capables de faire dialoguer des acteurs différents et d’impulser des projets capables de faire bouger les lignes.
S’ouvrir à de nouvelles compétences
Les attentes des citadins, nous ne pourrons les satisfaire qu’en nous ouvrant à d’autres sciences, qui viendront enrichir, et parfois bousculer, nos pratiques.
Pour y parvenir, il faut déjà savoir écouter et comprendre des aspirations en évolution constante – et imaginer ce qu’elles seront demain. Pour cela, nous sommes allés chercher des profils davantage tournés vers la sociologie et la prospective. Pourquoi ? Parce que, pour faire se rencontrer le temps des aspirations et celui de la construction, nous devons toujours garder un temps d’avance. Ces apports externes peuvent parfois surprendre. Chez Ogic, nous avons, par exemple fait nôtre le regard des sciences comportementales qui ont, elles aussi, beaucoup à nous apprendre sur notre manière de concevoir les lieux de vie. Nous avons également recruté des talents digitaux car notre rôle est de concevoir de nouveaux services connectés aux nouveaux usages des habitants et à leur quotidien.
La promotion immobilière doit ainsi devenir plus diverse et plus polyvalente, agile et capable de se réinventer sans cesse. Ambitieux ? Certes. Cette transformation est un défi, en soi, pour les managers.
L’art délicat du jongleur chinois
Le défi, pour le dirigeant, est de faire fonctionner de concert ces nouveaux profils, de générations et d’horizons différents. J’ai le sentiment que cela ne pourra pas fonctionner sans faire évoluer les modèles d’organisation traditionnels : il faut donner plus d’autonomie aux collaborateurs et recruter (ou encourager) des profils courageux mais capables de douter, d’aller à la recherche de partenariats nouveaux et disruptifs.
C’est un exercice d’équilibrage subtil, qui me fait penser à ces jongleurs chinois, qui font tenir en équilibre plusieurs assiettes sur de simples tiges, redonnant parfois la juste impulsion dans une direction, puis laissant ce mouvement suivre son cours.
Cette impulsion, c’est bien là tout le sens de la promotion immobilière.
ALM Treasury Head office-ALM Treasurer chez BNP Paribas
6 ansTous les secteurs d activités . doivent opérer et participer à cette mutation. Les banques ont engagées ce type de réflexion il faut maintenant les mettre en application via des actions concrètes
Technicien Systèmes et réseaux chez Cegid
6 ansComme pour la RH de façon globale, vous abordez une zone de turbulences : passer des savoir-faire aux savoir-être. Cinq spécialistes ou dix, agrégeant un travail sur un espace donné ne feront pas une ville, nous en avons fait l'expérience plusieurs fois déjà dans le monde, nous sommes d'accord. Mais c'est un constat que l'on fait partout et à tous les niveaux : il est le fruit de l'interopérabilité apportée par le réseau... Par un effet presque inconscient, nous avons intégrés nos communautés de biens, notre forte interdépendance (ce qui n'était pas évident avant le Net, souvenez-vous...). Nous avons conscience d'un tronc commun, d'une force, d'une voix, d'une voie. Les structures existantes ont un défi : passer d'un mode vertical, pyramidal descendant, à un mode presque parallèle. Parce qu'avant, la connaissance n'était dans les mains que de certains, protégés par la difficulté d'accès à l'information... Ce n'est pas sans me faire penser au rôle de la religion au moyen-age... Le réflexe, humain et compréhensible, est d'organiser l'horizontalité de façon verticale : nous, au pouvoir, allons construire la ville de demain après avoir consulté la population pendant un temps donné... de l'horizontalité verticale vous dis-je... Ces structures sont dans l'impossibilité d’appréhender le problème : la solution passe par leur remise en question profonde ou peut-être leur dis-solution... Un exemple de la faiblesse du procédé actuel : avez-vous seulement songé que l’hyper-connectivité ne sera pas éternellement désirable ? Des résistances se développent déjà...Comment protègerez-vous, dans votre ville réseau, le citoyen qui désirerait un peu d'intimité chez lui ? votre ville réseau sera has-been dans dix ans...
Référent chez URBA(N)COACH
6 ansLes API (appels à projet urbain innovant) ont indéniablement fait bouger l'art de bâtir. Mais une somme d'opérations n'a jamais fait une ville. Même si le bâti est la première chose que l'on perçoit, ce qui fait ville, et il en sera toujours de même demain, c'est ce qui se passe quand on va d'un chez soi à un ailleurs, c'est la manière dont des membres d'une même société aux fonctions ou aux statuts différents interagissent dans un espace donné.
Auteur de "Savoie Technolac, des racines et des fruits" chez Association PALME
6 ans100% d'accord !