(Hebdo 06 -12 nov.) - Une nervosité venue tout droit d'Asie & Londres ?
Source: LeMonde

(Hebdo 06 -12 nov.) - Une nervosité venue tout droit d'Asie & Londres ?

Coup d'oeil rapide sur les évènements clés à suivre cette semaine sur les marchés des changes.

Premiers pas de Donald Trump en Asie (JPY/CNY) : Cette semaine pourrait être marquée par le retour du spectre nord-coréen sur les marchés des changes. Le président américain effectuera une grande tournée en Asie ; la première de son mandat ; qui le mènera au Japon (5-6 nov.), Corée du Sud (7 nov.), Chine (8-9 nov.), Viêt Nam (10-11 nov.) et Philippines (12-13 nov.). Cette visite intervient dans un contexte déjà très tendu entre Washington et Pyongyang. La moindre étincelle, ou remarque déplacée du locataire de la Maison Blanche, pourrait embraser la région et aussitôt réveiller les craintes de conflits militaires. La nature imprévisible de Donald Trump est tout aussi importante que l'apparente susceptibilité des responsables politiques nord-coréen, d'où un possible état de nervosité permanent qui pourrait s'emparer des marchés financiers cette semaine. Le yen japonais ("valeur refuge") et le yuan chinois (rôle d'arbitre dans le conflit Etats Unis/Corée du Nord) pourraient tous deux bénéficier de la situation et faire l'objet d'une hausse de la demande de la part d'investisseurs apeurés et soucieux de réduire leur exposition aux risques. À cette occasion, une chute de la paire EUR/JPY vers ¥130-132 pourrait être observée. L'euro pourrait lui pâtir d'un sentiment général d'aversion au risque sur les marchés. Les récents évènements en Espagne ont quelque peu échaudé les investisseurs et rappelé la présence récurrente en Zone Euro de risques d'instabilité politique.

La livre sterling à nouveau sous perfusion du Brexit (GBP) : La Banque d'Angleterre a échoué la semaine dernière à rétablir l'attractivité de la livre sterling en spécifiant que son choix de réhausser ses taux directeurs - une première en 10 ans - ne s'inscrivait pas dans une démarche de nouveau cycle monétaire. C'est donc une fois encore le Brexit et son actualité qui devrait régir la volatilité cette semaine de la devise britannique. Trois semaines après le sommet européen du 19-20 octobre dernier, négociateurs britanniques et européens se réuniront à nouveau durant deux jours (jeudi & vendredi) pour tenter de dénouer les points de contentieux qui demeurent. Du côté européen, on attend toujours un engagement clair et précis de la part de Londres sur le montant de la facture de sortie. Un pas en avant de la première ministre britannique sur ce dossier pourrait venir dissiper le pessimisme ambiant des investisseurs à l'égard de la livre sterling. C'est ce sentiment qui prédomine en ce début de semaine (EUR/GBP de retour sous £0,8850 ce lundi) ...aussi plus dure sera la chute pour la livre en cas de nouvelles déceptions.

Lancement des débats sur la réforme fiscale (USD) : Bénéficiant d'une nouvelle attractivité ces dernières semaines, le dollar américain pourrait accroître ses récents gains (plus de 2% vs EUR sur les 3 dernières semaines) en cas de développements favorables sur le processus d'adoption de la réforme du code fiscal, dont le texte final a été dévoilé jeudi dernier.

Évènements clés de la semaine :

Réunion monétaire de la RBA (Australie) ce mardi. Nouveau statu quo attendu.

• Donald Trump rencontrera le président chinois Xi Jinping ce mercredi.

• Nouveau tour de négociation sur le Brexit jeudi et vendredi.

Tour d'horizon de la semaine sur les marchés des changes (Commentaires détaillés):

EUR :  Si la situation politique s’est stabilisée en Espagne, ce n’est pas pour autant que l’euro a bénéficié d’un nouvel élan d’intérêt des investisseurs. Il semblerait que la devise européenne subisse encore les contrecoups du choix de la BCE de privilégier une approche prudente dans sa nouvelle stratégie monétaire ; amorcée dès le début d’année 2018 ; de réduction de son soutien à l’économie. La devise européenne apparaît pénalisée par rapport à certains de ses pairs du différentiel de rendements obligataires observé actuellement ; notamment face au dollar US ; la faute à un plafond de verre actuel au-dessus des taux européens qui découle directement du flou entourant la date de la première hausse de taux en Europe. Le retour du thème de Divergences monétaires comme principe conducteur de la volatilité sur les marchés des changes demeure un handicap majeur pour l’euro à l’heure où les Etats Unis, le Canada et même le Royaume-Uni ont déjà commencé à rehausser leur taux d’intérêt. Ces effets pourraient progressivement s’estomper sous l’impulsion de bons indicateurs économiques en Zone Euro, et d’un retour au calme général dans la région. Un solide rebond des ventes au détail en Zone Euro ce mardi (consensus : +0,6% M/M en septembre), et des bons chiffres de production industrielle en Allemagne (contraction attendue) et en France (fort rebond attendu) pourraient offrir à l’euro le support nécessaire en cette période difficile. Les éventuels commentaires (ou bruits de couloirs) entendus en marge de la réunion informelle de la BCE ce mercredi pourrait également venir influencer l’euro. La paire EUR/USD tente toujours de revenir dans son ancien couloir de $1,17-$1,19 qu’elle a quitté suite à la réunion de la BCE du 26 octobre dernier, cependant la marche apparaît encore trop haute pour le moment.

USD : La dynamique du dollar américain devrait globalement battre cette semaine au rythme des premiers débats parlementaires sur la réforme fiscale ; dont l’intégralité du texte a été dévoilé la semaine dernière ; et des péripéties de Donald Trump lors de son voyage diplomatique en Asie. La devise américaine bénéficierait à coup sûr d’un développement favorable au niveau du processus d’adoption du projet de loi de réforme du code fiscal. Aussi ce pourrait être l’occasion de tester la solidité du support technique de $1,16 sur lequel repose actuellement la paire de change . Néanmoins, l’unité récente des parlementaires républicains apparaît toutefois fragile. Certains parlementaires ont d’ores et déjà pointé du doigt le coût de cette réforme – estimé à $1,5Trn sur 10 ans d’après le texte officiel du projet de loi - et fait part de leur opposition à faire gonfler la dette du pays ; actuellement supérieure à $20Trn ; sans assurance sur les effets économiques compensatoires de cette réforme. Si le calendrier fixé par le président américain – souhait de voir le texte approuvé avant les vacances de Thanksgiving débutant le 23 novembre – apparaît très optimiste, néanmoins cette réforme pourrait bien être adoptée d’ici la fin de l’année 2017 si un terrain d’entente est trouvé entre républicains, qui disposent d’une majorité au sein des deux chambres parlementaires américaines. Les fondamentaux économiques américains s’avérant à nouveau rassurants, le dollar pourrait cette semaine revêtir son costume de « valeur refuge » et se nourrir de la nervosité qui pourrait s’emparer des marchés financiers alors que la venue de Donald Trump en Asie intervient dans un contexte géopolitique très tendu. La présence du président américain en Asie, dont on connait la verve parfois peu diplomate, pourrait servir de prétexte à une nouvelle démonstration de force du régime nord-coréen. Compte tenu de l’absence globale de publications économiques clés dans le pays cette semaine, l’actualité géopolitique et politique devraient avoir une influence prépondérante sur la volatilité du dollar. À cet égard, les révélations sur l’enquête russe restent toujours surveillées d’un coin de l’œil par les investisseurs.

GBP :  C’est à un véritable jeu de montagnes russes auquel se prête la livre sterling depuis désormais deux mois, les spéculations monétaires s’entremêlant aux inquiétudes suscitées par l’absence d’avancées majeures dans les négociations de sortie. En l’absence désormais de soutien de la part de la Banque d’Angleterre, pour qui la hausse de taux de la semaine dernière n’est en aucun cas la première pierre d’un nouveau cycle de normalisation monétaire, la livre se retrouve à nouveau face aux questionnements des investisseurs sur les conditions du Brexit et à la situation politique au Royaume-Uni. L’organisation d’un nouveau tour de négociation en fin de semaine (jeudi et vendredi) ; soit la première rencontre entre britanniques et européens depuis le sommet européen de mi-octobre ; devrait rendre la devise britannique à nouveau très sensible à l’actualité sur le Brexit. Si du côté européen, on consent à accélérer le processus de discussion, comme en témoigne la proposition de multiplier les rencontres avant le sommet européen de décembre, on attend néanmoins une prise de position claire et précise de Londres concernant la facture de sortie, principal point de contentieux entre les deux partis qui paralyse actuellement les négociations. Quant à Theresa May, elle apparaît à nouveau sous le feu des critiques après la nomination la semaine dernière d’un nouveau ministre de la Défense très peu expérimenté dans ce domaine. Si la livre sterling continue ce lundi de panser les plaies provoquées suite à la réunion de la Banque d’Angleterre, bien aidée par une succession de signaux de redressement léger de l’économie au second semestre, elle demeurera néanmoins très sensible à l’actualité politique publiée cette semaine. Le cours EUR/GBP se maintient toujours dans une fourchette élargie de £0,87-£0,90, sans véritable tendance claire pour le moment. Les signaux de redressement de l’économie britannique au second semestre (PIB au T3, enquêtes PMI,…), bien que modestes, semblent limiter la magnitude des pressions baissières sur la devise britannique. Si aucun élément majeur ne ressort de cette nouvelle rencontre sur le thème du Brexit, la livre pourrait bénéficier, comme vendredi dernier, du soutien offert par de bonnes statistiques économiques (production industrielle et balance commerciale).

JPY :  Le yen devrait connaître une semaine pour le moins agitée, la faute à la présence du président américain sur le continent asiatique cette semaine. Un état de nervosité permanent pourrait s’emparer des acteurs de marché alors que la moindre parole déplacée de Donald Trump pourrait servir d’étincelles et embraser un nouveau feu de tensions en Asie entre la Corée du Nord et les Etats Unis. Le régime de Pyongyang a déjà mis en garde le président américain sur les éventuelles « remarques irresponsables » qu’il pourrait faire. Les craintes de nouvelles tensions pourraient venir alimenter une hausse de la demande en yen dans la région et ainsi assurer un renforcement de la devise japonaise. Il ne serait pas surprenant de voir le facteur « géopolitique » prendre temporairement le pas sur le facteur « monétaire » cette semaine, et ainsi observer la paire EUR/JPY osciller dans une fourchette de prix de ¥130-132.

CHF :  La pause de la dynamique d’inflation générale observée en Suisse en octobre (0,7% A/A vs consensus 0,8% et 0,7% en septembre) devrait conforter les responsables monétaires helvètes à repousser loin dans le temps tout scénario de sortie du cycle accommodant actuel et de scénarios de hausse de taux. Cette hypothèse pourrait confirmer, voire marteler, ce jeudi par le gouverneur central de la BNS, Thomas Jordan. À l’inverse de ce que l’on peut observer sur la paire EUR/USD, la rhétorique de Divergences monétaires joue cette fois en faveur de l’euro au détriment du franc suisse. Dans ce contexte, la paire EUR/CHF pourrait rester fortement valorisée et engranger de nouveaux gains dans la semaine. Néanmoins, le contexte géopolitique actuellement tendu pourrait se répercuter sur la volatilité du cours de change (demande en franc dans un contexte général d’aversion aux risques) et limiter son ascension au-delà du seuil de ₣1,17.

AUD : La réunion monétaire de la réserve bancaire australienne pourrait donner l’occasion de voir un nouveau mouvement de recul, plus ou moins important, du dollar australien. En effet, contrairement à un nombre croissant de ses homologues, la banque centrale australienne pourrait continuer de repousser et rejeter le débat de normalisation monétaire, jugeant celui-ci trop prématuré dans le contexte économique actuel. Le recul surprise de la dynamique d’inflation au 3ième trimestre (1,8% A/A vs 1,9% au T2 2017), en dessous de l’objectif de 2-3% ciblé par la banque, devrait donner du grain à moudre aux responsables australiens dans le maintien d’un discours prudent. Si un nouveau statu quo monétaire ce mardi de la RBA, potentiellement le 16ième consécutif, ne constituerait pas une surprise en soi, toutefois le dollar australien pourrait à nouveau souffrir de dommages collatéraux du retour de l’argument de Divergences monétaires dans les stratégies d’investissement. Le cours EUR/AUD pourrait à nouveau revoir les niveaux de A$1,52-A$1,53 en cas de nouveau mouvement baissier important de la devise australienne.

NOK : Outre les prix du pétrole, à nouveau en hausse en ce début de semaine suite aux tumultes politiques du weekend en Arabie Saoudite, la couronne norvégienne devrait être sensible aux nouveaux chiffres d’inflation publiés en fin de semaine. L’absence de signaux d’accélération de la dynamique de prix dans le pays pourrait alimenter les spéculations d’un possible report dans le temps de la date de première hausse de taux en Norvège, et par corolaire venir impacter négativement la valorisation de la couronne norvégienne face à l’euro. Malgré une correction en ce début de semaine, la paire EUR/NOK pourrait reprendre son ascension vers les niveaux de NOK 9,55-9,60 d’ici la fin de la semaine, si les anticipations de recul de l’inflation générale se matérialisent ce vendredi.

Source graphes : Reuters

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