Infirmier libéral et assistant médical : attention au mélange des genres !

Infirmier libéral et assistant médical : attention au mélange des genres !

La création du métier d’assistant médical est l’une des mesures phares de la loi n° 2019-774 du 24 juillet 2019 relative à l’organisation et à la transformation du système de santé. L’autorisation pour les infirmiers d’exercer la fonction d’assistant médical est définie par l’arrêté du 7 novembre 2019 relatif à l'exercice de l'activité d'assistant médical. Pour autant, s’il est possible qu’un infirmier se voit confier la fonction d’assistant médical, elle ne doit pas lui permettre de développer une activité courante de soin infirmier ni d’augmenter sa clientèle personnelle.

En application de l'article L. 4161-1 du code de la santé publique, sont autorisés à exercer la fonction d’assistant médical auprès d'un médecin exerçant en ville, à titre libéral ou à titre salarié en centre de santé, les détenteurs du diplôme d'Etat d'infirmier (DEI), du diplôme d'Etat d'aide-soignant (DEAS), du diplôme d'Etat d'auxiliaire de puériculture (DEAP), ou du certificat de qualification professionnelle (CQP) d'assistant médical.

Les missions et la formation des assistants médicaux sont encadrées par l’arrêté du 14 août 2019 portant approbation de l’avenant no 7 à la convention nationale organisant les rapports entre les médecins libéraux et l’assurance maladie signée le 25 août 2016. L’article 9-1 de la convention médicale précise que les missions de l’assistant médical doivent permettre au médecin de libérer du temps médical et de l’accompagner dans sa pratique quotidienne. A titre indicatif et non limitatif, les missions confiées à l’assistant médical peuvent relever de trois domaines d’intervention :

–       Des tâches de nature administrative : ces tâches consistent en des missions sans lien direct avec le soin, comme par exemple : l’accueil du patient, la création et la gestion du dossier informatique du patient, le recueil et l’enregistrement des informations administratives et médicales, l’accompagnement de la mise en place de la télémédecine au sein du cabinet, etc.

–       Des missions en lien avec la préparation et le déroulement de la consultation : l’assistant médical pourrait aider le patient à l’habillage, au déshabillage, à la prise de constantes, à la mise à jour du dossier du patient concernant les dépistages, les vaccinations, les modes de vie, en générant si nécessaire des alertes à l’attention du médecin, délivrance des tests et kits de dépistage, préparation et aide à la réalisation d’actes techniques.

–       Des missions d’organisation et de coordination : les assistants médicaux peuvent remplir une mission de coordination notamment avec les autres acteurs intervenant dans la prise en charge des patients.

Cet article introduit cependant une limitation concernant la possibilité pour un infirmier exerçant la fonction d’assistant médial de réaliser des actes de soins : « s’il est possible qu’un infirmier se voit confier la fonction d’assistant médical et, à ce titre, puisse réaliser un acte relevant de son champ de compétences, cela ne peut s’envisager que ponctuellement et dans le cadre d’une consultation médicale, sans qu’il s’agisse de développer ainsi une activité courante de soin infirmier qui relèverait d’un exercice professionnel propre. ».

Cette disposition conventionnelle entre d’ailleurs en cohérence avec l’article R.4312-62 du code de déontologie des infirmiers qui précise : « L'infirmier salarié, lié à son employeur par un contrat, ou employé dans un cadre public, ne doit pas profiter de ses fonctions pour augmenter sa clientèle personnelle ».

Il ressort de ces dispositions législatives et conventionnelles qu’il convient pour un infirmier qui cumulerait un exercice libéral et une fonction d’assistant médical de distinguer clairement ces deux activités afin d’éviter toute dérive qui pourrait conduire à une forme de détournement de la patientèle de ses confrères libéraux. L’article R.4312-61 du code de déontologie précise en effet « Le détournement et la tentative de détournement de clientèle sont interdits ».

Obligation de formation de l’infirmier assurant la fonction d’assistant médical

L’article 2 de l’arrêté du 07/11/2019 relatif à l’exercice de l’activité d’assistant médical précise : « Une formation d'adaptation à l'emploi dans le champ de l'organisation et de la gestion administrative d'un cabinet médical est requise pour les assistants médicaux non détenteurs du certificat de qualification professionnelle d'assistant médical, dans un délai de trois ans après leur prise de fonction ».

Cette obligation est reprise et précisée par la convention médicale dans son article 9-2 : « Quel que soit le profil de la personne recrutée en qualité d’assistant médical (profil soignant ou administratif), ce dernier devra être doté d’une qualification professionnelle ad hoc, qui sera obtenue à l’issue d’une formation spécifique, intégrant une éventuelle VAE (Validation des Acquis de l’Expérience), dont le contenu et la durée seront déterminés dans le cadre de la convention collective des personnels des cabinets libéraux. »

Pour les assistants médicaux recrutés sans être titulaires du certificat de qualification professionnelle (CQP), le médecin s’engage à ce que la personne recrutée en qualité d’assistant médical suive cette formation ad hoc dans les deux ans suivant son recrutement et obtienne sa qualification professionnelle dans un délai maximum de trois ans suivant son recrutement.

Il ressort de ces textes législatifs et conventionnels qu’un infirmier exerçant la fonction d’assistant médical devra obtenir dans un délai de trois ans suivant son recrutement la certification de qualification professionnelle, conformément au référentiel de compétences accessible sur le site de France Compétences.

Quel statut pour un infirmier libéral exerçant la fonction d’assistant médical ?

Sur le plan statutaire, dans la situation d’un infirmier libéral exerçant la fonction d’assistant d’un médecin libéral, le statut de collaborateur libéral semble devoir être exclu.

En effet, si la loi du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises a créé un statut particulier pour certaines professions libérales, dont les professions de santé en indiquant à l’article 18 que les membres de ces professions « peuvent exercer leur activité en qualité de collaborateur libéral », elle réserve par contre cette possibilité aux professionnels, personnes physiques ou morales, exerçant la même profession.

La collaboration libérale d’un médecin et d’un infirmier étant de fait exclue, la possibilité pour un infirmier libéral d’exercer la fonction d’assistant médical d’un médecin libéral ne pourra être envisagée que dans le cadre du salariat.

Cumul d’exercice libéral infirmier avec une fonction d’assistant médical salarié

La possibilité pour un infirmier de cumuler une activité salariée et un exercice libéral est prévue par l’article R4312-59 du code de déontologie qui précise : « Le mode d'exercice de l'infirmier est salarié ou libéral. Il peut également être mixte ».

Conformément aux dispositions de l'article L. 4113-9, l'exercice de la profession d'infirmier sous quelque forme que ce soit, au sein d'une entreprise, d'une collectivité ou d’une institution ressortissante du droit privé fait l'objet d'un contrat écrit. Par conséquent la fonction d’assistant médical devra être encadrée juridiquement par un contrat définissant les obligations respectives des parties et précisant les moyens permettant au professionnel infirmier de respecter les dispositions du code de déontologie, notamment dans ce cadre précis l’article R4312-62 précisant : « L'infirmier salarié, lié à son employeur par un contrat, ou employé dans un cadre public, ne doit pas profiter de ses fonctions pour augmenter sa clientèle personnelle » et l’article R4312-61 interdisant le détournement de patientèle.

Le contrat devra être communiqué au conseil départemental de l’ordre des infirmiers. Celui-ci vérifiera sa conformité avec les prescriptions du code de déontologie.

Enfin et pour information, les cotisations sociales se cumulent. Ainsi, l’infirmier paiera des cotisations sur son salaire et sur son activité libérale. De la même manière, une double affiliation aux régimes de retraite est requise ainsi que le paiement des cotisations retraite auprès des deux régimes. Enfin, les rémunérations perçues au titre de l’activité salariée et des bénéfices non commerciaux feront l’objet de déclarations d’impôt distinctes.

Article rédigé par

Philippe Tisserand-One Another Consulting

Corinne S.

Infirmière, Cadre de Santé Infirmier, Directrice de Prestation de santé à domicile, Développement de compétences en Esthétique médicale , DUAME médecine Esthetique. Direction Stratégie Médicalisation Événementielle

9 mois

Merci Philippe. Je pense qu’il en est de même pour les IDE assistants de médecine esthétique dont je fais la formation mais pour autant les soins anti âge ou minceur non invasifs sont si j’ai bien compris après formation bien sûr réalisable par un IDE,

Anne-sophie Lestrade Carluer de Kyvon

Assistante Médicale spécialisée en imagerie et prévention, cabinet d ophtalmologie

10 mois

une précision: en tant qu IDE la formation ne délivrera pas de certificat d assistant médical mais une attestation d heures effectuées pour UN module de la formation (les autres modules de l année de formation étant acquis dans le DE IDE). NB: je suis la formation au Mans actuellement

Bernard Duclos

Spiral Dynamics Wizard - Swiss retired in Gascony

10 mois

Dans les pays voisins, ça marche parfaitement et ici on commence déjà à se faire des frayeurs

Blanc Cyrille

Infirmier libéral

10 mois

on se rend compte que même l ONI ne sait pas les attributions possibles que l on peut faire aux idels … et ce sont eux qui doivent représenter la profession !!😉

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