L'ATTRACTIVITÉ. Ou comment habiller les monstres en tenue de soirée. (Dernière partie).

Est-ce que le vent aurait enfin tourné dans le monde de l’entreprise et de la fonction publique et partout ailleurs pour que l’attractivité se retrouve sur toutes les lèvres et qu’elle rejoigne la liste des préoccupations priorisées ? Est-ce que ce sont les changements sociétaux que l’on dit amorcés depuis la crise Covid qui seraient à l’origine de cette petite révolution ?  Ou le marché de l’emploi ?

Ou est-ce la faute de ces dirigeants qui ont tiré adroitement profit du culte du privilège, de l’exclusif, et de l’exclusion, dans une indifférence relativement consternante pendant trop longtemps ? Ceux-là mêmes qui ont légitimé le modèle de gestion plutôt monarchique que hiérarchique et qui sont devenus des massacreurs de talents et du potentiel humain. Le plus affligeant étant sans doute l’émergence des risques psychosociaux, qui met en équation, l’égocentrisme et le déni, à l’origine d’une courbe sans cesse montante.

Il y a une question réelle qui se pose autour de l’inertie, l’immobilisme profondément ancré dans les sphères du pouvoir décisionnel et politique, qui servent leur ambition de carrière bien loin devant les besoins organisationnels. Et ceci n’est pas et n’a pas été sans effets puisque c’est ce qui consumé les meilleurs éléments à petit feu, jusqu’à ce qu’ils se voient contraints de quitter par dépit ou par épuisement. Ibrahima Fall, dans la parution récente de son livre parle en ces termes de « l’humain sacrifié ». 

Il n’est pas encore certain que tous ceux qui ont payé le prix fort auront marqué les esprits avec une nouvelle conscience. Ce sont des caractéristiques de marché qui sont surtout à l’origine des changements les plus significatifs.  Mais lorsque ces organisations partent en « campagne d’attractivité » nous pourrions légitimement questionner plutôt si ce n’est pas une campagne « gobe-mouche » (nom d’une plante) pour les plus naïfs qui n’ont pas encore fréquentés ces dirigeants « occulteurs ».

Le talent, une menace pour l’incompétent.

Ces campagnes se flattent d’attirer les meilleurs candidats de talents, compétents et dynamiques, qui sauront mener leurs tâches avec ferveur et engagement. Voilà un marqueur d’imaginaire débordant.  

Les organisations avec des dirigeants occulteurs, produisent comme effet, un management assiégé par le silence et la soumission. Le comité de sélection lors d’un recrutement, ne peut pas être un porteur du flambeau de l’éthique du travail avec un état d’esprit qui milite en faveur du désir de « réussir ensemble » à moins qu’il soit conditionné à parler pour rien dire. Surtout si nous partons du principe que la soumission gâche le talent et la compétence.  

Il sera toujours possible de trouver un incompétent qui cherchera à s’offrir la marionnette qu’il veut manier ou la victime qui saura vanter l’extraordinaire chance de le côtoyer, et sur lequel il misera son propre avancement.

Questions d’intégrité

Il n’est pas très difficile de concevoir qu’une campagne d’attractivité devient une évidence de contradictions, une initiative de peu de fondements s’il n’y a pas d’abord une politique de reconnaissance des talents ainsi qu’une politique d’avancement et de progression de carrière stimulante et accessible portée par les dirigeants.   Si les dirigeants derrière le rideau, se consacrent à la réduction des postes comme premier levier de performance, quelque chose ne peut faire autrement que sonner faux.

Si les campagnes d’attractivité sont dans le but de remplacer ceux qui ont écopés de mauvais managers et de mauvaises pratiques, de la non-reconnaissance des talents, qui ont été soumis à l’isolement et au silence, alors, l’attractivité n’a rien d’attractif, à part d’habiller les monstres en tenue de soirée ou d’être de magnifiques gobe-mouches.