Le métro Nord pour les nuls (8 : vive l’auto !)
Chaque jour, je développe une question en vue de décoder la décision de réaliser un #métro à grande profondeur à la place du #tram 55 à #Schaerbeek et #Evere, ligne #STIB.
Question 8. Dans le dossier du métro Nord, va-t-on continuer à privilégier l’automobile?
Depuis la fin de la guerre, Bruxelles a fait l’objet d’énormes investissements en matière de mobilité. On a investi sans discontinuer dans les infrastructures de transport, et pourtant on doit constater tous les jours le manque d’efficacité du système : embouteillages, pertes de temps, qualité de l’air médiocre et niveau de bruit élevé, inconfort et danger des trajets à vélo et à pied, insuffisance d’entretien des ouvrages d’art, etc.
Et ce qu’on peut constater, c’est que la politique en matière de transport public a en réalité tenté de préserver au maximum la place de l’automobile !. Quelques exemples ? Le remplacement massif des trams par les bus dès les années 50 représente le choix d’un mode plus souple générant moins de contrainte pour la circulation privée.
Tandis que dès les années 60, le choix d’enterrer les trams en vue d’un pré-métro et ensuite d’un métro est voulu pour « désengorger la ville en faisant passer les trams en sous-sol », ce qui, en réalité, ne pourra qu’améliorer la capacité routière (les boulevards du Centre passent à 2x2 bandes, tandis que la rue de la Loi offre 5 bandes parallèles à l’arrivée du trafic venant de Liège).
Enfin depuis la fin des années 80 une méthodologie visant à améliorer la vitesse commerciale des trams et bus de surface est développée (programme VICOM ou AVANTI) : création de sites propres, modification des sens de circulation, suppression de stationnement, télécommandes des feux de signalisation par les transports publics, etc. Elle se heurte néanmoins en permanence aux défenseurs de l’automobile présents y compris dans certaines administrations et communes. L’argument massue, qui est en réalité un sophisme, consiste à dire que « réduire la capacité routière va créer de la congestion pénalisant les transports publics ». Cela revient à ignorer l’existence du phénomène de trafic déduit constaté lors des réductions de capacité routière[1].
Résultat des courses, la vitesse commerciale des trams et des bus diminue d’année en année : entre 2006 et 2016, la vitesse des trams est passée de 17,0 Km/heure à 16,0 Km/heure et pour les bus de 17,6 à 16,1 Km/heure. La référence qui peut être prise pour chiffrer une vitesse possible est celle du soir en 2006 : 19,4 pour le tram et 20,7 pour le bus.
En conclusion, contrairement à qu’on fait depuis les années 1950, donner une vraie priorité aux transports publics de surface par rapport aux automobiles constituerait, enfin, un signal fort permettant de miser sur des lignes à haut niveau de service aussi performantes que le métro, mais nettement moins coûteuses.
Vincent Carton Ingénieur civil, Urbaniste
[1] L’observation des données montre que de nouvelles infrastructures routières attirent un trafic supplémentaire. A contrario, la réduction de ces mêmes infrastructures peut générer des problèmes durant une courte période, mais par la suite, on a partout constaté un phénomène d’évaporation du trafic. Les références sont nombreuses.