Les inégalités dans l'accès aux soins sortent renforcées du Covid-19
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Pour 45% des membres LinkedIn ayant répondu à un récent sondage posté en partenariat avec le média Acteurs Publics, les investissements publics devraient aller en priorité au secteur de la santé. Un chiffre qui fait écho à la mise en lumière des soignants tout au long de la crise. Les professionnels de santé espèrent des investissements à la hauteur et plus d'écoute du terrain, d'autant que la crise sociale qui s'annonce pourrait renforcer les inégalités, y compris sanitaires. Nous en avons discuté avec Abdelaali El Badaoui, le président et fondateur de Banlieues Santé, une association présente dans 300 quartiers partout en France.
Quel bilan tirez-vous des semaines de crise sanitaire aiguë que nous venons de traverser?
L’épidémie de coronavirus a révélé des inégalités préexistantes. Nous sommes loin d’être tous égaux face au Covid-19 et face à la santé en général. Il n’y a qu’à se pencher sur les chiffres. Ainsi, à titre d’exemple, la mortalité a augmenté de 110% en Seine-Saint-Denis entre le 2 mars et le 10 mai par rapport à la moyenne sur la même période de 2015 à 2019. En comparaison, ce taux a augmenté de 76% à Paris et de seulement 61% dans les Yvelines. Cela vient confirmer les fractures et les fragilités que nous observons sur le terrain depuis longtemps. Et cela s’explique par toute une série de facteurs bien connus. Dans les quartiers, les personnes ont été plus exposées car elles ont travaillé pour beaucoup d’entre elles en première ligne, dans les métiers du soin, de l’entretien ou encore dans les supermarchés. La densité de population et la question du logement sont aussi des facteurs explicatifs, de même que la présence de patients âgés et mal soignés, potentiellement beaucoup plus à risque. Ces personnes, fragilisées socialement et médicalement, ont beaucoup plus de chances d’être contaminées.
Quelles ont été les actions de Banlieues Santé pendant le confinement?
Nous avons continué à remplir notre mission, à savoir faire le raccord entre les institutions et les gens. Nous sommes les logisticiens du dernier kilomètre de la santé publique. Notre mission est d’aller identifier les personnes, de les mettre en confiance. Quand nous avons vu la vague qui arrivait d’Italie, nous avons pensé qu’une crise sociale et sanitaire arrivait aussi chez nous et nous avons anticipé en mettant en place plusieurs choses:
- Une application intitulée “En mode confiné” (qui va rester mais changer de nom pour devenir “La France du coeur”: une plateforme de coordination sanitaire avec des traductions des messages de santé publique dans une vingtaine de langues (arabe, roumain, ourdou…). En 3 mois, elle a été téléchargée 400.000 fois. L’enjeu? Rejoindre tout le monde, et notamment les catégories de patients les plus éloignées du parcours de soin, notamment les migrants ou encore les roms.
- Nous avons travaillé pour permettre aux associations de s’identifier en en fédérant 150. En effet, beaucoup se sont mises à l’arrêt car leurs bénévoles ont souvent un certain âge. Nous avons établi avec des médecins un protocole strict pour que la chaîne de solidarité ne se transforme pas en chaîne de contamination, en lien avec le ministre chargé de la ville, le cabinet du Premier du ministre, les ARS ou encore le ministère de la santé.
- Nous avons distribué des colis de confinement pour permettre aux personnes de vivre environ une semaine sans avoir besoin de sortir, en nous basant sur les relais du CCAS, des associations ou des infirmiers, grâce à une cagnotte que nous avons mis en place, à l'aide financière de plusieurs grands groupes et à nos 5.000 bénévoles partout en France.
Comment envisagez-vous la période post Covid qui s'ouvre?
L’après-crise risque d’être fatal pour les personnes qui sont déjà loin du parcours de soin. Pour ces patients en angle mort, il existe trop de barrières pour aller se faire soigner, notamment psychologiques mais aussi matérielles. Nous allons continuer de mener des campagnes de santé publique, notamment sur la vue et les dents, les deux premiers postes de renoncement au soin. La crise sociale risque fort d'être encore pire que la crise sanitaire. Les investissements dans la santé publique sont au coeur de l'actualité. Les institutions ont tout intérêt à se mettre à l'écoute du terrain et à développer une culture d'impact, pour faire le lien entre ce qui existe et ce dont les gens ont besoin.
La tech peut-elle vraiment permettre de lutter contre les inégalités?
Les technologies se doivent d'être des instruments pour lutter contre les inégalités. Mais pour cela, il faut que ces publics soient au fait du digital, or il y a en France une fracture numérique. C'est pour cela que nous avons monté une formation de médiateur en santé numérique, dont la mission sera de former des associations et des bénéficiaires aux outils numériques.
Qu'en pensez-vous? N'hésitez pas à vous joindre à la conversation en commentaire ou à signaler des sujets que vous aimeriez voir traiter dans cette newsletter. A bientôt !
Médecin chef de Service de Pédiatrie chez Hôpital Riviera-Chablais Vaud-Valais
4 ansC'est triste ce constat ! Il faut cependant éviter les conclusions trop hâtives et peu documentées. J'ai perdu un proche dans des conditions indignes: saturation en oxygène basse à la prise en charge qui était une indication d'intubation, aggravation à l'arrivée à l'hôpital avec échec d'intubation et malheureusement pas de trachéotomie faite. Déclaré mort de COVID-19 sans preuve biologique....54 ans, sans AUCUN facteur de risque...Je n'accuse personne, mais j'attire l'attention sur le fait que tous ceux, nés hors de France, déclarés morts de COVID-19 n'avaient pas de facteurs de risque (obésité, HTA, etc.). L'absence des tests rend l'interprétation des chiffres difficile. La medecine est basée sur l'évidence !!!
Partner Axiantis.com- Pdt Eurotradia Int’l jusqu’en sept 2020.
4 ansC’est le principe de la Sécu!
Accompagne et audite le développement des professionnels (entreprises, professions réglementées et libérales) #finances #audit #fusion #acquisition #entreprises #patrimoine
4 ansCes initiatives , actions et engagements au quotidien confirment , rappellent et mettent en évidence la difficulté et continuité d'accès aux soins pour un nombre grandissant de patients ,le Covid-19 n'ayant été qu'un révélateur de la fragilité du système . Chaque assuré social devra compter plus que jamais sur la volonté, l'implication , le dévouement de chaque professionnel de santé (ville / hôpital ) ce pour prétendre et continuer à bénéficier d'un traitement équitable . En ce sens ' @urgencesanitaire.org ' envoie un signal fort aux soignants et aidants .
Infirmière DE
4 ansEn effet, les personnes les plus vulnérables de par leur âge, leur précarité médicale ou sociale ont plus souffert de cette pandémie. Comment assurer les gestes barrières lorsque l'on vit dans la rue ou dans des conditions de promiscuité qui favorise la transmission virale? Les aidants, le plus souvent bénévoles, ont dû également respecter le confinement. L'absence d'aide pour les besoins élémentaires n'a fait qu'aggraver les risques épidémiques. Rendons donc hommage aux personnels des associations qui ont poursuivi leur travail habituel, voire en étant encore plus inventifs et solidaires.
Oui, les inégalités par rapport à la santé existaient déjà. Dans de nombreux départements d'une ville à l'autre on voit très nettement les écarts. C'est pour cela que les associations qui accompagnent pour toutes les démarches santé & prévention sur le terrain ont énormément de demandes. Cela se comprend largement quand on voit le prix pour une consultation de certains médecins spécialistes ou pas d'ailleurs. Cela explique également pourquoi les urgences de certains hôpitaux sont très souvent surchargés.