LEVOTHYROX: LA JUSTICE A DÉBOUTE 4 113 PLAIGNANTS DE LEUR DEMANDE D’INDEMNISATION POUR DEFAUT D'INFORMATION

Les utilisateurs du Levothyrox ont-ils été suffisamment informés sur le changement de formule du médicament du laboratoire Merck, soupçonné de leur avoir occasionné divers troubles provoquant un préjudice d'anxiété ?

Le 3 décembre 2018, devant le tribunal d'Instance de Lyon, les avocats de 4 113 malades réclamaient 10 000 € pour chacun d'entre eux au laboratoire pharmaceutique allemand Merck fabricant du médicament, soit plus de 41 millions d'euros au total.

«J’accuse Merck de savoir que le changement de formule allait avoir des conséquences néfastes, de faire peu de cas des malades et de privilégier les intérêts financiers de ses actionnaires», avait lancé Me Christophe Lèguevaques devant le tribunal d’Instance (quelque 200 requérants étaient présents au procès, en majorité des femmes).

«Depuis le début, nous disons que le sujet ce n’est pas le médicament mais l’information autour du médicament», avait poursuivi Me Lèguevaques.

Mise sur le marché au printemps 2017, une nouvelle formule du Levothyrox, prescrite contre l’hypothyroïdie avait été incriminée, entre mars 2017 et avril 2018, par quelque 31 000 patients victimes d’effets secondaires (fatigue, maux de tête, insomnies, vertiges, etc.).

Merck niait toute sous-information estimant avoir communiqué avec un plan de communication « extrêmement large » en envoyant « 300 000 communications par courrier, fax et mail auprès de 100 000 professionnels de santé » lors du lancement de la nouvelle formule en France. L'un des avocats du laboratoire, Me Jacques-Antoine Robert, avait assuré dans sa plaidoirie que "pas une réglementation n'avait été violée" tout en critiquant l'action collective lancée par la partie adverse. "Dans 200 dossiers, il y a zéro pièces, des milliers d'autres sont incomplets et pour 800, il y a lieu de se poser la question" avait estimé le conseil.

Par un arrêt du 5 mars 2019, le tribunal d’Instance de Lyon vient donc de débouter les 4 113 plaignants qui avaient assigné le laboratoire Merck pour « défaut d’information » concernant le changement de formule de son médicament Levothyrox. Le tribunal a estimé que Merck "avait œuvré dans les règles et de concert avec les autorités françaises", et par conséquent, qu’aucune faute n’avait été commise dans l’information due aux patients.

« Ne nous méprenons pas, Merck a toujours entendu l’émotion des patients et, à ce titre d’ailleurs, a demandé, dans cette procédure, des expertises médicales pour mieux comprendre chacune des situations » a réagi de son côté un des conseils du laboratoire. Et d’ajouter : « Soulignons qu’il ne s’agit pas d’un jugement contre le ressenti des patients. Ce qui a été jugé aujourd’hui, c’est la pertinence du dispositif commun d’information mis en place autour de la transition de l’ancienne à la nouvelle formule du Levothyrox, durant une période bien délimitée, allant de mars à septembre 2017 ».

Les patients devront assumer leurs frais de justice. Néanmoins, une procédure pénale est toujours en cours d’instruction par la justice marseillaise.

Par Isabelle BRIENT, Docteur en droit, Avocate, titulaire d'un D.I.U en " Droit de a Responsabilité Médicale et Droit des Malades" et d'un D.U en "Réparation Juridique du Dommage Corporel".

Voir aussi article précédent sur le site du 5 février 2019: "LEVOTHYROX: l'enquête ouverte à Marseille élargie à homicide involontaire ».