MAINTIEN DE L'INTERDICTION DE CAPTATION D'IMAGES ET D'ENREGISTREMEMTS LORS DES PROCES

MAINTIEN DE L'INTERDICTION DE CAPTATION D'IMAGES ET D'ENREGISTREMEMTS LORS DES PROCES

Le 6 décembre 2019, le Conseil Constitutionnel a confirmé l'interdiction de procéder à la captation d'images et d'enregistrements lors des procès, de les diffuser afin de garantir la sérénité des débats et de prévenir toute atteinte à la vie privée.

Les Sages étaient saisis d'une QPC (Question Prioritaire de Constitutionnalité) demandant l'abrogation de l'article 38 ter de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse qui interdit : "dès l'ouverture de l'audience des juridictions administratives ou judiciaires, l'emploi de tout appareil permettant d'enregistrer, de fixer ou de transmettre la parole ou l'image". En 1954, suite au déchaînement médiatique provoqué par le procès de Gaston Dominici, le législateur avait fait de cette règle: une interdiction générale et absolue.

Toute infraction étant passible de 4 500 € d'amende.

A l'origine de cette QPC transmise par la Cour de Cassation, la directrice de publication de Paris Match. En février 2019, elle avait été condamnée par la Cour d'Appel de Paris à payer la somme de 2 000 € d'amende pour avoir publié deux photos prises illégalement lors du premier procès d'Abdelkader Merah en novembre 2017. L'une représentait le djihadiste assis dans le box vitré des accusés, la seconde, la mère des frères Merah, témoin au procès dans la salle d'audience ainsi qu'un autre accusé dans le box. Ces clichés avaient été publiés dans la revue, sur le site et sur le compte Twitter du journal.

La requérante sollicitait la levée de cette interdiction. L'avocat de Paris Match estimait que les raisons qui avaient conduit à cette interdiction n'étaient plus d'actualité : "Avec les avancées technologiques: les appareils photos sont aujourd'hui minuscules, discrets et ne sont pas susceptibles de provoquer la moindre gêne. Comment expliquer que le dessin d'audience soit autorisé et pas la photographie ? Comment justifier que l'on puisse rendre compte d'une audience par les mots et pas par les images ? Cette interdiction représentant à l'évidence une atteinte au droit à l'information".

De même, l'avocat de l'association de la presse judiciaire plaidait pour un "un juste équilibre "entre respect de l'intimité et la présomption d' innocence" et "le droit d'informer" allant jusqu'à proposer "une disposition qui aurait permis d'enregistrer les audiences en interdisant la diffusion des images avant la fin du procès".

Le Conseil Constitutionnel n' a pas été sensible à ces arguments estimant que la règle instaurée depuis 65 ans devait rester la même. Pour les Sages, l'évolution technologique est susceptible au contraire, de donner à la diffusion d'images "un retentissement important qui amplifie le risque de porter atteinte à la sérénité des débats, au respect de la vie privée, à la sécurité des acteurs judiciaires ou à la présomption d'innocence de la personne poursuivie".

En outre, les juges constitutionnels rappellent que les journalistes "ont la possibilité de rendre compte des débats par tout autre moyen, y compris pendant leur déroulement par des croquis et comptes rendus d'audience ou sur les réseaux sociaux, sous réserve de l'accord du Président". L'atteinte portée à la liberté d'expression et de communication avec cette interdiction générale est par conséquent "nécessaire, adaptée et proportionnée".

Il est à noter que cinq procès ont été filmés en France, grâce à la loi Badinter qui permet les prises de son et de vue lorsqu'un procès a "une dimension historique" ceux de : Klaus Barbie, Paul Touvier, et Maurice Papon mais aussi ceux de la catastrophe d'AZF et des disparus sous Pinochet.

www.huffingtonpost.fr, www.franceinter.fr, www.dalloz-actualité.fr.

Par Isabelle BRIENT, Docteur en Droit et Avocate.

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