Niki et la Veuve Noire
Inconnue en Belgique comme en France, cette Opel Rekord est légendaire dans le milieu sportif automobile outre-Rhin. Il ne lui aura fallu pour cela que deux brèves apparitions en course, la présence d’un champion au volant et aussi une disparition mystérieuse. L’histoire de cette voiture surnommée par les initiés “die Schwarze Witwe” (la veuve noire) ou encore parfois, mais plus rarement, le “Racing Taxi” (en raison de sa peinture bicolore qui était celle des taxis en Allemagne), débute en 1967, soit quelques mois à peine après le lancement de la génération C de l’Opel Rekord qui se déroula en août 1966. A l’époque, Opel ne peut s’engager officiellement en compétition, une interdiction formelle signifiée par la maison-mère GM sise à Detroit. Le projet d’une voiture de compétition pour la marque au Blitz (la première depuis la seconde guerre mondiale) est donc mené dans le plus grand secret sous la gouverne principale de trois hommes : le patron du design, Clare MacKichan ; le designer responsable des recherches avancées, Anatol Lepine (qui avait travaillé précédemment aux USA sur la Corvette Stingray C2 -dont la célèbre Split Window qui ne connut que le millésime 1963- et qui passera ensuite chez Porsche où il sera le maître d’œuvre de la 928) ; et l’ingénieur en chef Charles S. Chapman. Ils partiront d’une base de berline deux portes (et non du coupé fastback) pour élaborer cette fameuse “Schwarze Witwe”. Contrairement à ce qui a parfois été raconté, le moteur de celle-ci n’a pas été développé par le suédois Ragnar Ecklund mais bien en interne sous la conduite de l’ingénieur Dieter Herr. Gavé par deux carburateurs Weber 48 et recevant entre autres un arbre à cames très spécial, le 4 cylindres 1.9 litre a ainsi vu sa puissance doubler, passant de 90 ch à 180 ch. Si la boîte manuelle à 4 rapports a bien été conservée, le train arrière (essieu rigide) a bénéficié de considérables modifications pour faire passer la puissance au sol. Sur ce point, ce fut une réussite absolue, la “Schwarze Witwe” affichant un comportement neutre et efficace alors même que son freinage, pourtant amélioré, s’avéra toujours le plus gros point noir de cet engin pesant 935 kg à peine selon le pilote Erich Bitter, qui était à l’époque l’importateur Abarth pour Allemagne et deviendra par la suite un constructeur automobile. Il pilotera la “Schwarze Witwe” engagée sous la bannière privée d’une “entreprise située à Wiesbaden” (!) à deux reprises, en septembre 1968 à Zolder puis trois mois plus tard à Hockenheim où il fit forte impression. Une sortie à ce point remarquable qu’elle attira l’attention des dirigeants GM à Detroit et obligea Opel à se débarrasser rapidement du bébé, qui fut refilé au constructeur autrichien de Formule V Kurt Bergmann. Celui-ci confia alors la voiture au jeune pilote Niki Lauda lors d’une course se déroulant sur l’aérodrome de Tulln-Langenleborn en Autriche. A l’issue de celle-ci, la “Schwarze Witwe” disparut sans laisser de trace pour ne plus jamais réapparaître. Au départ d’un exemplaire datant de 1966 trouvé à la frontière espagnole, une voiture sera reconstruite, fidèle au modèle original, à partir de 2012 par le département Opel Classic sous l’impulsion de Jens Cooper, et cela grâce à la mémoire et aux souvenirs d’Anatol Lapine qui, malheureusement, mourut avant la fin de ce projet sympathique.
Chairman BEHVA (Belgian Historic Vehicle Association); Independent Director; Advisory Board Member; Honorary Chairman FEBIAC; Hauptabteilungsleiter i.R. bei BMW Group
1 moisMerci Stany Meurer de nous faire découvrir ce projet "sous le radar" d'ingénieurs sans peur et sans reproche !
Responsable suivi chantiers chez Sogerim Construction
1 moisToujours passionnant Monsieur Stany 👌