Regard sur : Changer ? Mais pourquoi donc !
J’ai longtemps travaillé à la transformation de personnes, de groupes dans le cadre de mon activité, à l’époque où j’avais du mal à saisir cette réticence au changement que j’avais tant espéré.
Je me suis heurtée à une notion de transformation que j’appréhendais bien plus disruptive et profonde.
J’ai été nourrie par les concepts de transformation d’Isaac Getz qui fut mon mentor en quelque sorte puis par mon approche des neurosciences.
En fait cette appétence au changement je l’avais en moi depuis toujours, curieuse de tout ce qui pouvait améliorer les conditions de travail, le travail en lui-même, la posture managériale, l’ergonomie même, la manière dont nous appréhendions le « travail ».
Alors, lorsque notre DG nous a donné le feu vert pour une transformation de notre entreprise j’ai sauté sur l’occasion.
Ce fut le début d’une découverte qui changea complètement ma vie tant professionnelle que personnelle.
En fait, à ce même moment je me suis intéressée aux neurosciences et très vite j’en ai vu l’incroyable complétude avec notre métier de coach, nous devions nous saisir des sciences cognitives pour amorcer cette transformation car la transformation avant d’être structurelle est humaine ; c’est en changeant notre comportement, notre posture face aux équipes, au tâches en elles-mêmes que nous allions changer réellement notre façon de travailler.
C’est aussi pour cela qu’une transformation n’est pas industrialisable, j’entends mise en musique par le biais d’une feuille de route sauf à ce que le pavé le plus important soit :
Changement d’état d’esprit qui induit une posture différente : 70% (au moins) du temps de transformation 😊 et sans plus de précision car nous touchons à la transformation de l’humain et en cela il n’est pas séquençable dans le sens où parfois ce peut être très rapide et d’autres fois long, très long, c’est quasiment individualisé.
Alors je conçois que ce soit difficile à appréhender en entreprise où tout est normalisé, budgétisé, prévu dans un plan … mais l’humain n’est pas une machine et si vous voulez transformer votre structure il faudra le prendre en compte ce temps plus ou moins long.
On peut imaginer plusieurs formes de transformation afin de ne pas perturber la bonne marche de l’entreprise comme une transformation par absorption dans un groupe test qui petit à petit grandit ; on peut aussi imaginer des pôles tests indépendants… mais le « one shot » ne peut être réalisé que sur de nouvelles structures qui permettra à chacun d’avancer de concert.
Mais sur une ancienne structure, a fortiori si le nombre de personnes est important et les activités variées, le « one shot » est complexe … mais pas impossible 😊, toujours rester humble devant la tâche et travailler par itérations, crantant pas à pas la transformation qui variera en fonction de l’avancée de la transformation des individus.
Ça, c’est pour le comment (très brièvement) mais ce qui est primordial c’est de comprendre pourquoi l’individu est réticent au changement.
C’est sur la compréhension de ce levier que s’appuiera la réussite de votre transformation.
C’est aussi malheureusement ce point qui est omis en entreprise car difficilement maîtrisable et donc qui ne peut rentrer aisément dans une feuille de route maîtrisée j’entends avec certes une date de début mais surtout une date de fin inconnue … l’entreprise n’aime pas l’incertitude même si un des principes de l’Agile est justement de piloter l’incertitude.
C’est ce qui m’a plu dans l’Agilité c’est d’introduire cette incertitude qui est la mère de tout progrès, de la créativité, de la mobilisation …. Bref de toute transformation 😊
Mais encore une fois l’homme n’aime pas le changement car justement il introduit les notions d’incertitude, de risque !
Rien n’est permanent sauf le changement !
Si nous avions tous en tête que l’intelligence, notre cerveau même est en perpétuel changement, en continuelle transformation, que ses capacités d’adaptation sont incroyables pour ne pas dire infinies, peut-être n’aborderions nous pas ces changements avec autant de réticence !
Donc neurologiquement nous avons soif de changement et d’autre part ce même cerveau freine au moindre changement, toute la complexité et la beauté de l’humain 😊
Explorons un peu comment notre cerveau fonctionne face au changement.
Tout d’abord un simple réflexe de survie ; rappelez-vous de la gouvernance instinctive. Elle nous permet d’assurer notre survie dès qu’un changement se profile, il sera plus ou moins perçu comme une agression, d’où un reflexe de fuite, de lutte, d’inhibition.
Nous parlons de posture face à ce que l’on décèle comme un danger, mais ce danger est propre à chacun, à notre manière de gérer le stress face au danger, face à l’inconnu.
Ce réflexe instinctif est inscrit dans notre « disque dur » (mais modifiable 😊) et cette réponse au changement est la même face à un danger de mort que face à un simple changement ; notre rôle de coach est alors de changer la notion de danger et de le remettre à sa juste place, changer de posture ne peut être perçue comme un danger comme celui de la survie.
La naissance votre premier changement … un moment où tout change, votre contexte, votre environnement, votre appréhension du nouveau monde, tout cela peut être extrêmement violent et marque aussi votre capacité à changer de manière inconsciente.
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Notre cerveau gère au mieux ses dépenses. Il fait des économies privilégiant ce qui est connu, vos habitudes, vos automatismes (zone de confort, d’où la difficulté d’en sortir), tous les biais cognitifs qui vous permettent d’aller au plus simple, au plus facile, au plus « secure » : le biais de statu quo (on a toujours fait comme ça) , le biais de conformité sociale ( faire comme tout le monde est plus confortable), la biais de négativité (ce biais est bien plus répandu que vous ne l’imaginez, voir le verre à moitié vide est quasi un automatisme) ….
Gestion des avantages / inconvénients : c’est le principe de l’effort à fournir par rapport au bénéfice escompté, c’est un principe de régulation connu sous le nom de circuit de la récompense.
Notre cerveau cherche avant tout le plaisir, le confort et donc se situe dans l’espace-temps immédiat et fournir un effort sur un temps long pour un bénéfice ultérieur parfois incertain est difficile à appréhender pour notre cerveau, la balance avantage/ inconvénient lui semble déséquilibrée.
Il s’agit aussi de notre capacité à fournir un effort qui implique un contrôle de notre comportement.
Notre place dans le groupe : Rappelez-vois la gouvernance grégaire qui gère notre positionnement dans le groupe, elle le définit. Le changement peut fragiliser cette position qui peut fragiliser notre statut, notre légitimité, il s’agit aussi de la peur du jugement d’autrui, de l’image que l’on renvoie ou croit renvoyer, en fait la peur de l’échec.
Comme vous le voyez, tout cela concoure effectivement à l’immobilisme !
Mais chacun ne réagit pas de la même manière, notre environnement social, notre éducation, notre résilience, notre neuroplasticité sont variables mais toujours modifiables.
Il n’y a pas d’immobilité hormis celle que vous vous imposez. 😊
Et c’est en cela que c’est un message extrêmement positif, tout est possible, la seule barrière c’est vous, point de question d’âge non plus, ce que l’on a longtemps cru, les neurones sont en continuelle expansion sauf à ce que vous en décidiez autrement.
Le levier principal de tout changement est donc la curiosité, l’envie d’expérimenter mais comme vous pouvez aussi le deviner ce puissant levier n’est pas suffisant et les freins aussi nombreux qu’il existe d’êtres humains (je dirais que pour ma part c’est ce qui en fait l’attrait, le charme de mon métier !).
Vous l’avez bien saisi, chaque être humain est différent, ses références sont différentes et de facto ses réactions face au changement différentes aussi, ne pas en tenir compte et croire que nous fonctionnons tous de la même manière est totalement illusoire et pour le coup foncièrement erroné.
Par conséquent le changement demande du temps, c’est avant tout un long processus de désapprentissage puis d’apprentissage, schématiquement on détricote un processus mental pour le réimplanter.
C’est un long jeu d’ajustement entre nos propres capacités cognitives, nos croyances parfois (très souvent !) limitantes, nos émotions (... et oui les oublier serait fatal !), nos motivations, tout est à explorer pour se remettre aisément je dirais presque confortablement sur les rails de la transformation !
Changer c’est aussi créer de nouvelles connexions neuronales, c’est comme si vous quittiez une autoroute que vous empruntez chaque jour pour un chemin de traverse inconnu, mais plus vous l’emprunterez, plus celui-ci vous sera familier et deviendra au bout d’un certain temps, une nouvelle autoroute. Rappelez-vous schématiquement 30 jours pour une impression dans un schéma connu, 3 mois pour le consolider, 9 mois pour l’inscrire dans un schéma récurent … 9 mois intéressant non ? 😊
Résumons un peu notre processus du changement :
· Lever les freins du mode automatique (gouvernances instinctive et grégaire, le mode automatique) et activer la gouvernance adaptative
· Accepter le deuil d’un avant pour envisager l’après
· Dépasser cette peur de l’encore inconnu.
Tout passe, vous vous en doutez, par la gestion de ses émotions, la perte de repère, de l’inconfort qui en découle tout cela doit être nommé, identifié, verbalisé pour être compris pour aborder la phase de changement.
Le changement s’apprend, lorsque l’on apprend à utiliser principalement son mode adaptatif, notre cortex préfrontal est notre allié principal.
Tout le monde peut changer, il n’y a que des différences de parcours, de temps, mais chacun de nous peut accéder à une autre vie, une autre préhension de notre univers, il faut juste prendre le temps d’écouter, de comprendre, d’expliquer, de démystifier le complexe processus du changement et c’est bien là le rôle du coach.
Voyez une fois cette étape passée, vous pourrez y plugger tous les outils, y adjoindre toutes le feuilles de route que vous voudrez, la transformation sera réellement en marche, mais pas avant !
« Le monde déteste le changement, c’est pourtant la seule chose qui lui a permis de progresser » …. Charles F Kettering