Triste était mon cœur ...

Triste était mon cœur ...

Triste était mon cœur ...

Quand les rancœurs s'accumulent au travail comme les feuilles d'automne sur les voies de chemin de fer, il ne faut pas s'étonner si l'implication stagne comme une locomotive dont les roues patinent sur les rails.

Pourquoi tant de rancœur, d'aigreur ou de tristesse ? Parce qu'un salarié, un fonctionnaire, un collaborateur ou même un prestataire sont d'abord des personnes sensibles. Même avec un costume - cravate ou un bleu de travail ! Or notre exigence de qualité et de performance peut devenir excessive tout comme nos maladresses peuvent s'avérer blessantes. Oublier un merci, formuler agressivement un reproche, humilier par une remarque déplacée sont autant de manières qui parsèment notre ordinaire de professionnels pressés et stressés, que nous soyons managers ou simples collaborateurs.

Le manager et le père Fouettard

Personnage mythique invoqué pour faire peur aux enfants, le père Fouettard pourrait-il aussi représenter une façon de pratiquer le management ? Si "nul n'est méchant volontairement" comme le disait Socrate, alors faut-il mettre certaines pratiques sur le compte de l'ignorance, c'est-à-dire de la croyance que les personnes doivent être menées à la baguette pour bien exécuter leurs tâches. Le management consiste alors en un cycle d'action bien rôdé : ordonner, surveiller et punir. Ceci à l'image de "la pédagogie noire" dont parlait Alice Miller dans un livre qui eut son heure de célébrité*. C'est confondre autorité et abaissement de l'autre. Or la pratique de l'autorité ne s'oppose pas au respect de l'autre et à son autonomie.

Les chamailleries du quotidien

A côté de pratiques contestables de l'autorité, nous observons aussi ces multiples conflits qui se produisent au quotidien pour des choses parfois futiles ou parfois importantes. C'est alors un mot, un geste, un regard qui nous en laissera "gros sur le cœur". Avec des envies de retour de bâton qui ajouteront leur contribution à cette dégradation relationnelle.

Et que de quiproquos ! Combien de malentendus donneront lieu à l'attribution d'une volonté mauvaise. Nous prêtons à l'autre une intention qu'il n'avait peut-être pas mais qui restera comme une blessure et qui justifie, croyons-nous, une réplique, ce qui entretien l'ambiance, façon guerre de tranchée.

Ainsi va la vie au travail.

 Du baume sur le cœur

Comment modifier cette trajectoire du mal être au travail ? Comment stopper cette accumulation d'énergie négative ? Il s'agit de rompre un processus et le seul moyen de le faire est de distribuer des signes de reconnaissance. Verbaux ou non-verbaux, ils signifient à l'autre qu'il existe pour nous et qu'il a une valeur ; ils manifestent un intérêt pour son travail et ce qui a été bien fait. Pour construire des relations de coopération, il est nécessaire d'injecter de l'énergie positive, en espérant qu'elle se propage par un effet de contagion.

 Le goût des autres

Est-ce si simple ? Oui, mais pas forcément facile. Sauf à se montrer hypocrite, il ne s'agit pas de mentir et de laisser croire ce qui n'est pas, ce qui en général ne trompe jamais longtemps. Car l'attention à l'autre relève d'une qualité qui, si elle n'est pas innée, ne s'apprend pas non plus en l'espace d'un petit stage. Cette qualité dans la relation à l'autre relève d'une modalité intime de la personne, soit d'un développement de soi qui nécessite volonté et durée.

Plus collectivement, il s'agit aussi de retrouver les bonnes manières. Notre monde doit-il réinventer le savoir vivre ?

 * Alice Miller, C'est pour ton bien. Racines de la violence dans l'éducation de l'enfant, Aubier, 1984.

© Manager Formation - FF

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