Villes nouvelles en Afrique : La question de l’importation des modèles préfabriqués à la perte de l’identité et au déséquilibre territorial
Qu’elles soient de création coloniale ou ex nihilo, nombre de villes en Afrique reflètent le caractère urbain des pays industrialisés : architecture moderne, fragmentation urbaine (par la présence de quartiers résidentiels), CBD, etc. Les villes nouvelles, particulièrement, semblent s’accrocher à ces réalités en déphasage avec les contextes géographiques locaux. En faisant allusion au concept et au dessein précurseur, il convient de mentionner que les villes nouvelles sont par ailleurs le fruit d’une ambition politique en vue d’atténuer tant les disparités territoriales que les questions urbaines préalablement identifiées.
En dépit de leur originalité conceptuelle, les villes nouvelles s’affirment comme un passage du rêve (voire de l’utopie) à la réalité. La moitié du XXème siècle et le début du XXIème siècle ont été marqués en Afrique par l’affleurement de nombreuses villes nouvelles. Quelques exemples de villes nouvelles fondées dans cette région du monde concernent spécifiquement Nouakchott en Mauritanie (1957), Dodoma en Tanzanie (1973), 10-Ramadan en Egypte (1979), Abudja au Nigéria (1982) et Tamansourt au Maroc (2005).
Importation des modèles inspirés des villes du Nord
On peut tout de même reprocher aux concepteurs des villes nouvelles de lésiner sur la mise en valeur d’une identité voire d’une idéologie propre à chaque milieu. Transversalement, la ville ne limite pas qu’au tracé des voies ou à la mise en place d’une structure. C’est d’abord une population à travers une approche temporelle et un vécu. Ce qui implique notamment les volets social et architectural. Cette préoccupation révèle quelques insuffisances à propos des villes nouvelles : l’absence d’identité, le manque d’anticipation sur les disparités socio spatiales et l’insertion dans le paysage naturel.
L’absence d’identité forte se justifie par une assimilation des tendances générales. Or, les villes nouvelles en Afrique doivent être un moyen idéal de préserver et de refléter les richesses identitaires locales. Dans ce contexte, il revient à promouvoir le patrimoine (sous ses divers angles), la culture, l’histoire, la mixité sociale, etc. Autrement, cela ne doit pas se réduire à l’implantation d’un monument, mais demande d’aller au-delà.
Le manque d’anticipation sur les disparités socio spatiales peut être perçu par l’exode rural que les villes dotées de forts attraits économiques attisent envers l’hinterland. Ceci participe du déséquilibre des territoires. Ces villes représentent en effet un appât économique inévitable pour les migrants ruraux en quête d’emploi, soit pour des travailleurs à la recherche des conditions de travail et de vie améliorées. En plus de dépeupler les milieux ruraux, ce phénomène demeure un facteur non négligeable de la croissance démographique et par ricochet de l’étalement urbain. Toutefois, les projets d’extension du site originel des villes nouvelles semblent quasi inexistants.
En ce qui concerne l’insertion dans le paysage naturel, il faut dire que quelques-unes des villes nouvelles sont implantées dans un contexte géographique à faibles contraintes morphologiques. Dans ce cas, la mise en place des systèmes d’assainissement liquide devient onéreuse et n’est pas aussi exempt de dysfonctionnements.
Vers des villes nouvelles africanisées
L’Afrique doit avoir son modèle de villes nouvelles afin d’exprimer sa singularité. Construire des villes nouvelles africanisées constitue un défi majeur auxquels doivent s’atteler les concepteurs. Ce défi intègre en amont la prise de décisions politiques basées sur des approches temporelles et novatrices ou d’actualité (transition énergétique, développement durable, résilience, etc.). En aval, il est question de considérer les nombreuses thématiques ainsi que les questions urbaines contemporaines.
Au-delà de ces prescriptions, les villes nouvelles africanisées sont censées être des moteurs de profondes mutations. En gros, ces villes deviennent également pour les populations résidentes des lieux de convivialité à travers une approche d’appropriation spatiale.
A défaut de construire des villes nouvelles…
Créer une ville nouvelle est loin d’être une panacée puisqu’il existe d’autres alternatives. Une des alternatives préconiserait de repenser et rendre efficaces les principes de l’aménagement du territoire. Concrètement, il s’agirait de considérer les villes secondaires, étant donné que ces dernières sont dotées d’une influence territoriale. Nombre d’entre elles disposent en effet du statut de chef-lieu de région. Il faudrait donc aménager ces villes pour redynamiser leur région respective et désengorger les métropoles.
Ce mécanisme conduit à l’établissement de nouveaux liens. Il s’agit des liens interdépendants ville secondaire – unité administrative satellite – hinterland. En outre, le développement de ces villes repose sur les interactions qui existent entre elles et leur région respective indépendamment des métropoles. Ce schéma pourrait s’affirmer comme un précurseur du développement régional autour des villes secondaires (chefs-lieux de région) dans une perspective d’équilibre.
Architecte assistant- Gospel speaker- Poète- Youth leader
5 anstrès intéressant cet article. Mais comment avoir des villes africainisées lorsque le mode de vie actuel ne l'est pas ??