2018 : Balance ton petit chefaillon !
Témoignage sans filtre de Louis , victime d'un petit chefaillon.
« Mon patron, Maurice, était un pleutre, un couard et un pétochard zélé. Sa peur atavique le rendait pathétiquement veule et servile face au big boss, mais hélas également particulièrement vindicatif, nuisible et malfaisant avec ses collaborateurs.
Comment une telle imposture a-t-il pu hisser son pitoyable postérieur à un tel poste restera pour moi une question insoluble ? Dès le premier contact, j’ai compris que c’était mauvaise pioche car ce sinistre abruti n’était qu’une forme pervertie du gaz sarin. Au royaume des paillassons serviles, il était champion du monde. Fallait le voir, le Maurice, lorsque le big boss pointait son nez ! Aussitôt, ce répugnant aplati se mettait à transpirer par toutes les pores de sa carcasse bouffie. Des taches sombres auréolaient progressivement sa chemise bleue, car Maurice était toujours en chemisette. Je lui aurais bien expliqué à cette limace gluante que lorsque l’on est sensible des glandes sudoripares, il est conseillé de mettre des chemises blanches, mais je m’en suis abstenu car j’espérais que cette sudation malodorante et incontrôlable allait condamner cet oxyure à un exil express dans une filiale scandinave. Son visage de poivrot passait du rosé au rouge mais pouvait virer au blanc en un instant, en fonction de son degré de stress. Il avait beau s’appliquer des tonnes de fond de teint tous les matins le Maurice en chef, cette façade artificielle cédait à la première émotion, balayée par les cataractes de sueur et une variété de tics nerveux carrément clownesques.
Mais c’est quand le big boss était absent qu’il fallait craindre le Maurice aux pognes moites. Il dévoilait alors la face noire de sa personnalité, son mode kapo, sa perversité de petit chef. Il s’agitait, s’énervait, criait, gesticulait dans tous les sens. Il se lançait alors dans un activisme stérile qui me rappelait Cocaïne, mon hamster pédalant frénétiquement dans la petite roue de sa cage. Il lui fallait passer sa peur, Maurice, pas le hamste,r sur quelqu’un. En bon pétochard, il s’en prenait toujours à la plus faible des fourmis verticales de son équipe. Chaque décision importante lui arrachait le fond des tripes. Ce soulard haineux expliquait qu’il était entouré de nuls, de cloportes et de macaques, incapables de lui donner l’information lui permettant de trancher. Ce charognard se gavait de brimades, d’invectives, d’insultes et d’humiliations. Il n’était jamais repu. L’ennui c’est que, petit à petit, il s’en est pris à moi. J’étais un des plus jeunes et pas le genre à ramper devant lui. Nos joutes oratoires devinrent homériques. Je terrassais toujours au plan verbal mais son pouvoir hiérarchique m’écrasait sur tous les autres plans. Ça le courrouçait sévère le Maurice. Moi, à la longue, cela me pompait fortement les globules, surtout les blancs.
Usé par cette tension permanente, je m’en ouvrais à quelques compagnons d’infortune. Ils m’expliquèrent qu’une bonne façon d’amadouer l’immonde pelliculaire consistait à le flatter. Certains avaient manifestement testé avec succès ce subterfuge. Ils me conseillèrent de les imiter. Je refusais d’employer cet artifice de balayeur contraire à mes valeurs d’intégrité et d’honnêteté. Mais, poussé à bout par l’acharnement de l’hyène sadique, je décidai d’appliquer la méthode préconisée par les plus avisés de mes congénères. Me retrouvant seul avec cette malfaisante enflure sur un sujet sans enjeu, je réussis à lui placer quelques compliments qui m’écorchèrent la lippe. Effet extraordinaire. Maurice porta son regard torve sur ma misérable personne. Ses yeux striés et sanglants d’alcoolo commencèrent même par scintiller à travers l’abrutissement de sa cervelle embrumée. Le flux de ses artères tapissées d’artériosclérose sembla comme assoupli par l’effet de ma lamentable tirade. Son attitude à mon égard changea et il me laissa tranquille, dans mon coin, à boulotter des moisissures de travail qu’il m’octroyait généreusement pour s’en prendre à d’autres champignons de son département. Je réussis à maintenir cette situation en vaccinant mon Maurice régulièrement. Mais je notais rapidement que les doses initiales n’étaient plus suffisantes. Accro aux compliments et à la flatterie baveuse, le grand détritus en réclamait plus. Je consacrais donc de plus en plus de mon temps de travail à préparer les infâmes douceurs que j’allais susurrer aux oreilles poilues et suintantes de notre tyrannosaure départemental.
Il m’a fallu quelques semaines pour m’apercevoir que Maurice m’inoculait le poison de la flatterie dans mon sang jusque-là vaguement sain. Je suis tombé alors sur le livre du Professeur Laborit : « Éloge de la fuite » que j’ai dévoré. Quelques jours plus tard, j’ai donné ma démission.
Dans la foulée, le big boss a demandé à me voir.
Demain, je lui balance tout.
Si vous connaissez un Maurice, vous pouvez lui souhaiter une très mauvaise année...
En recherche d'emploi
6 ansExcellent texte qui m'a valu beaucoup d'éclats de rire même si la réalité de cette situation est plutôt pitoyable.
Manager - Responsable Middle Back Office - Chargé de Middle Office
7 ansBon article ! Quand on a vécu ce type d'expérience, on en retire la substantifique moëlle, comme disais Rabelais. Il reste que la question "comment est-il arrivé là?" reste sans réponse. Lisez ou relisez Peter's pinciple ou le principe de Peter (en livre de poche), ça peut servir
Directeur du Dévelopement chez I.P.C.
7 ansQuel talent Olivier! Tu vois clair, ça fait plaisir. Meilleurs vœux 2018! 😉
CFO West Europe chez Oerlikon Balzers
7 ansExcellent livre "l éloge de la fuite" courage fuyons