Adieu Lucien, je t'aimais bien tu sais

Lucien Isnard n'est plus. Sous ses allures discrètes, dignes d'un cadre d'une entreprise publique, Lucien était un rebelle pour qui "rien n'est acquis quand on l'exprime. Tout doit s'expliquer et se démontrer".

"Utile", voilà le mot qu'il aimait bien. Ce qui existe ou va exister doit être "utile". Utile à l'AFTM dont il partageait les visions mais à qui il reprochait "de ne pas toujours être en phase avec on époque". Utile à Marco Polo qu'il a fondé avec Abdelaziz Bougja pour réfléchir sur le monde, l'environnement et la solidarité pour "faire avancer les grands sujets qui passionnent le voyage d'affaires". Utile à ses amis et connaissances pour l'humour et le regard décalé. Utile enfin pour nous faire réfléchir, avancer. Lui pour qui "la place de l'humain était essentielle dans nos métiers".

Lucien et son indissociable ami Aziz apportaient un autre regard sur le voyage d'affaires. Eux que j'avais affectivement surnommé "Le Muppets show du voyage d'affaires" pour ces "ping-pong sonores" lors du dîner annuel de Marco Polo, ont été bien plus loin dans leurs réflexions que beaucoup de ceux qui clament aujourd'hui leurs connaissances du métier. Ils étaient plus innovants que bien des jeunes qui nous entourent.

Lucien aimait l'ordre établi et l'impertinence ! C'était tout le paradoxe. Mais respectueux des hiérarchies il ne s'opposait pas ouvertement à ses contradicteurs. Il les laissait venir pour mieux asséner son avis, toujours justifié, toujours détaillé. Lors du congrès des EDV à Lille, lors du débat sur NDC, il bouillonnait sur son siège me glissant à l'oreille "ils n'ont rien compris tous ces gens, c'est sur le terrain qu'il faut valider ses idées pas sur le papier". Pourtant, il aimait la simplicité et n'hésitait pas à rappeler que tout ce qui facilite le voyage doit être étudié, analysé, décortiqué et mis en place dans l'entreprise. Lui pour qui le SBT était une perte d'argent quand on a du "capital humain". Un paradoxe assumé.

Adieux Lucien je t'aimais bien tu sais.

Je regrette aujourd'hui de ne pas avoir pris le temps de déjeuner avec toi et Aziz au printemps dernier. Mais tu le sais Lucien, "il faut s'aimer vivant, il faut s'aimer sur terre, ne crois pas au cimetière, il faut s'aimer avant".

Marcel Lévy

 Le message d'Abelaziz Bougja

C’est avec une grande émotion et une immense tristesse que nous vous annonçons le décès de notre ami Lucien Isnard et de son copilote, Alain Garnier, dimanche 15 septembre 2019.

Lucien avait pris le départ du Raid Latécoère – Aéropostale depuis vendredi dernier. C’était un « rêve de gosse » comme il aimait à le dire. Ce Raid, c’était l’aboutissement d’une passion pour l’aviation qu’il nourrissait depuis son enfance.

À l’occasion de la deuxième étape du raid, entre Castellón de la Plana et Alicante, son avion s’est abîmé à Alcalalí dans les montagnes espagnoles non loin de la mer. Les premiers éléments dont nous disposons indiquent que la météo – mauvaise hier – serait la cause majeure de l’accident.

Nous avons perdu un ami fidèle. Tous ceux qui ont eu la chance de connaître Lucien savent à quel point c’était une « belle personne » à la joie de vivre communicative. Nous pleurons également notre cher co-président chez Marco Polo. Au-delà de cette communauté, c’est toute l’industrie du voyage d’affaires qui est en deuil aujourd’hui. Les nombreux appels et messages que nous recevons ce matin sont la preuve du grand vide qu’il laissera dans nos vies à tous.

Tous les membres de Marco Polo sont mobilisés autour de la famille Lucien, de son épouse, Evelyne et de sa sœur, Michèle, de son beau-frère Philippe et de leurs enfants. Fidèle Lucien a été avec chacun d’entre nous, fidèles nous serons avec sa mémoire et ses proches. 

« Faites que le rêve dévore votre vie afin que la vie ne dévore pas votre rêve » déclara Antoine de Saint-Exupéry. « Je confirme et cela conforte mon opinion, il faut assouvir ses rêves. On a qu’une vie ». C’est le dernier message reçu de Lucien.

Nous avons tous deux vies, une qui prend fin avec la mort et la seconde éternelle, car à jamais dans nos mémoires. Nous vous invitons à conserver le souvenir de Lucien intacte.

Respectueusement,

Abdelaziz Bougja, Co-président de Marco Polo