"Ce n'est pas parce que la vie n'est pas un long fleuve tranquille que je n'ai pas le droit de réussir ma vie ( personnelle et professionnelle )!"

"Ce n'est pas parce que la vie n'est pas un long fleuve tranquille que je n'ai pas le droit de réussir ma vie ( personnelle et professionnelle )!"

Cette citation, je l'ai créée de toute pièce. Elle résume l'histoire de ma vie dont je vais vous raconter les premières années et qui doivent parler à beaucoup. 

J'ai évoqué dans un de mes précédents articles qu'on arrive au monde, pour certains ( et même pour tous, j'ai tendance avec le recul à le penser) "prisonnier" ( le terme peut paraitre fort) de son environnement!

A nous de le comprendre et de nous mettre en chemin pour nous "libérer" de notre histoire passée et de toutes les injonctions que nous avons ressenties depuis notre enfance et qui nous enferment.

Pourquoi se libérer ? C'est simple, pour commencer à vivre !

Comment pouvons nous "rencontrer l'amour", "devenir parent", " prendre sa place dans une organisation", "devenir manager", "créer sa boite " ... si cette "naissance" n'est pas accomplie . Pour commencer enfin à VIVRE SA VIE !

Aussi, dans le "Leadership de soi, pour Sapiens en quête de sens", je me suis servi de l'histoire de ce "petit Alain" pour illustrer par un exemple, le mien, une démarche pour "prendre sa place" et donner raison à la phrase de Sartre :

" L'important n'est pas ce qu'on a fait de nous, c'est ce que nous faisons de ce qu'on a fait de nous ! " ( à relire plusieurs fois, si besoin )

Reste ensuite à se mettre en chemin !

( Extrait de l'ouvrage "Le leadership de soi, pour Sapiens en quête de sens !) Préambule

Le coaching est l’art de l’action, sa force est de regarder le présent et d’aider la personne accompagnée à se projeter dans le futur. Le coach ne s’attarde jamais sur le passé. Toutefois, la personne arrive avec son présent, mais aussi avec pour bagage son histoire plus ou moins lointaine. Le coach averti écoute tout ce qu’elle dit et ce qu’elle ne dit pas. Bien souvent, notamment dans les premières séances, ce qu’elle dit a trait à son passé plus ou moins récent, à son histoire, à tout ce qui constitue son identité, ce qu’elle a été et ce qu’elle est devenue. Le coach écoute et est présent. Il écoute et s’autorise intérieurement à poser des hypothèses de diagnostic, à entendre l’indicible. Il prévoit des voies possibles de questionnement dans ce qui va émerger, dans la confrontation avec des outils inspirants à exposer durant le parcours de coaching.

 

Imaginons ici que nous écoutions l’histoire du passé d’Alain, telle qu’il pourrait la raconter à un coach.

 

Commençons par le commencement, les grands-parents !

Il me faut partir de l’histoire de mes grands-parents, la plus lointaine dont je peux me souvenir au sujet de ma famille, car elle a toute son importance dans le devenir du petit Alain qui a passé toute son enfance à écouter sans mot dire, l’histoire du génocide et de l’immigration tant arménienne qu’italienne racontée par ses aïeux.

Le père d’Alain, décédé aujourd’hui, a eu, comme beaucoup d’hommes de son époque, une enfance sacrifiée. Dès l’âge de huit ans, il dut arrêter l’école pour apprendre un métier. Son père, le grand-père d’Alain, était un rescapé du génocide arménien de 1915. Secouru par la France en 1922, il s’était retrouvé par hasard, à 30 ans, dans un petit hameau du Var, près de Draguignan. Ne parlant pas français, d’origine étrangère et immigré, il n’avait pas trouvé de travail et n’avait dû son salut qu’à la bienveillance d’un homme qui les avait accueillis, sa femme et lui, et qui avait accepté de leur prêter un morceau de terre pour qu’ils puissent subvenir à leurs besoins alimentaires.

 

Les grands-parents d’Alain n’ayant pas les moyens d’élever leurs quatre enfants et encore moins de les laisser trop longtemps à l’école, leurs trois fils et leur fille ont travaillé très tôt. Son père, le cadet, a été placé dès l’âge de neuf ans pour clouer des semelles chez un fabricant de chaussures que connaissaient ses parents. À l’époque, les chaussures et les costumes étaient faits main, certains sur mesure, et les Arméniens étaient connus pour être de très bons cordonniers et d’excellents tailleurs, c’est d’ailleurs ce que deviendra l’un de ses oncles ! Retiré très jeune de l’école pour devenir apprenti, le père d’Alain ne savait pratiquement ni lire et ni écrire.

Sa mère a eu un peu plus de chance, si l’on peut dire. Dans les années 1920, ses parents, issus pour leur part de l’immigration italienne, avaient décidé de quitter la pauvreté extrême du Mezzogiorno de l’époque pour rejoindre la France qui les a accueillis. La main-d’œuvre française étant insuffisante dans les mines de bauxite, le grand-père maternel d’Alain est devenu mineur. Il l’est resté jusqu’en 1950, date de son décès brutal à l’âge de 57 ans lors de l’effondrement de la mine dans laquelle il travaillait. Sa mère, cadette de trois filles, avait alors 17 ans. Au décès de son père, comme l’argent ne rentrait plus, il lui fallut quitter l’école après l’obtention de son brevet, diplôme qui avait de la valeur en ce temps-là. Elle rencontra le futur père d’Alain à l’âge de vingt ans et ils se marièrent en 1954.

 

Et voici Alain, né en juin 1955, fils d’un cordonnier et fabricant de chaussures, sa mère étant son assistante vendeuse au magasin.

 

Les parents

La façon dont l’histoire est relatée aux enfants façonne, suivant leur sensibilité, leurs états d’esprit, réveille ou fait émerger certaines blessures ou messages conditionnels. Dans le cas de la famille d’Alain, ces histoires étaient souvent sombres et douloureuses et elles l’ont profondément marqué.

De l’histoire du génocide arménien avec son lot de déportations et de morts cruelles, son père ne parlait jamais, sans doute pour épargner son fils, mais ce silence pesant et le mystère qu’il laissait planer portait les stigmates de ce moment, et l’ont peut-être rendu encore plus douloureux pour le jeune Alain.

 

Les recettes du commerce familial étant peu abondantes, les parents d’Alain ont décidé qu’il resterait fils unique. Être enfant unique n’est jamais simple, cela peut même devenir un fardeau lourd à porter une bonne partie de la vie. Tous les enfants fils uniques vous le diront !

 

Le père d’Alain était très travailleur, physiquement présent à la maison mais de fait absent, l’esprit toujours à son travail. Il se levait à 4 heures du matin tous les jours et à 5 heures pétantes il était déjà à son établi, où il restait jusqu’à 12 h 30. Après un rapide déjeuner à la maison, suivi d’une mini-sieste de 15 minutes, il repartait à 13 h 30 pour revenir à 20 heures. Puis il dînait rapidement et se couchait à 21 h 30 au plus tard. En moyenne 70 heures de travail par semaine ! Son quotidien était réglé comme du papier à musique, sans un jour de répit, pas même le dimanche ! Tout juste s’octroyait-il dix jours de congé à la fin de l’été mais la famille partait très peu durant ces vacances, si ce n’est quelquefois dans les Alpes.

 

Le père d’Alain parlait très peu. Le fait d’être illettré et sans instruction scolaire le complexait énormément. Il ne s’est jamais intéressé au travail scolaire de son fils car il ne s’en sentait pas capable, il disait qu’il « n’y comprenait rien ». Il avait toujours peur de gêner et d’être de trop. Mais dans le même temps, il était fier, intérieurement, des bons résultats scolaires de son fils !

Il préférait se réfugier dans son activité professionnelle, où il pouvait s’exprimer. Il créait de très belles chaussures faites entièrement sur mesure, réputées dans toute la région. Même à cette époque, les vrais artisans bottiers étaient rares ! Plus tard, il s’est aussi lancé dans la fabrication de sacs. Tout le monde reconnaissait son professionnalisme et la qualité de son travail. Alain était fier de ce que son père faisait. Mais de nature anxieuse, son père était toujours dans ses pensées, à recherche de la perfection dans son travail.

Ses rapports avec Alain étaient quasiment inexistants. Non qu’il ne l’aimât pas, mais aucune démonstration d’affection, aucun échange, aucun jeu partagé ne faisait partie de leur quotidien. Le père d’Alain aimait son fils, c’est certain, mais ne le montrait pas. Il restait silencieux, à mâchonner son éternelle pipe.

 

Le père d’Alain était réputé pour être très serviable et avoir la main sur le cœur, aidant tous ceux qui venaient le voir, faisant crédit facilement, allant même jusqu’à prêter de l’argent à tous ceux qui le lui demandaient. Il était perçu comme un « gentil », par tous ceux qui le côtoyaient.

Les parents d’Alain parlaient peu entre eux. À table, le mutisme était de mise. Les rares paroles prononcées portaient généralement sur l’activité professionnelle, la rareté des clients et le manque d’argent.

Ou alors, il s’agissait de querelles. Les disputes étaient fréquentes au sein du couple. Les pleurs de la mère d’Alain aussi. Avec pour elle sans doute beaucoup de frustration concernant la tournure qu’avait pris sa vie.

Car c’était elle qui assumait l’essentiel de la vie du foyer. Présente tous les jours au magasin pour assister son mari, elle s’occupait aussi de la maison, du bien-être de son fils et de son éducation. Comme toutes les femmes de son époque et comme encore beaucoup aujourd’hui, elle devait répondre présent sur les deux tableaux.

Elle a toujours voulu le meilleur pour le petit Alain, même si l’argent manquait cruellement à la maison. Elle a suivi très rigoureusement sa scolarité, avec amour, présence, attention, parfois avec beaucoup de sévérité, plaçant très haut son degré d’exigence alors même que son fils avait des résultats scolaires très honorables.

 

Alain et le travail, le travail, et encore le travail

Le foyer où Alain a grandi offrait peu de distractions : pas de télévision, pas de téléphone, pas de bandes dessinées (les seuls livres achetés devaient servir à s’instruire), pas d’amis rendant visite à la famille.

La seule activité pour Alain était de travailler, travailler et encore travailler, comme son père. Toutefois, dès qu’il eut six ans, sa mère eut la bonne idée de l’inscrire dans un club de gymnastique où il y est resté jusqu’à l’âge de 18 ans.

Hormis quelques journées d’apprentissage du ski à partir de 15 ans et deux amis qu’il fréquentait, c’était pour lui sa seule bouffée d’oxygène durant l’année scolaire, un endroit où il pouvait s’évader trois fois par semaine en fin d’après-midi.

La vie à la maison était souvent triste et silencieuse. Il y avait quelquefois des moments de fous rires mais ils étaient très rares. Peu de place pour l’humour, les rires, les blagues ou la fête. Le père d’Alain était un taiseux. Les seuls moments où ce calme devenait ressourçant étaient ceux où Alain et ses parents regardaient tous les trois le vol des hirondelles depuis le balcon de leur appartement, en écoutant leurs cris stridents dans le lointain.

 

À vous !

D’après vous, comment cet environnement familial a-t-il façonné le jeune Alain ?

Quelles conséquences sur la personnalité qu’il a développée par la suite ?

 

Souvenez-vous que tout dépend du terreau qui est propre à chacun d’entre nous, constitué à 50 % par nos gènes, à 10 % par notre éducation et nos origines familiales, et à 40 % par nos comportements sur lesquels nous avons prise, comme nous l’avons au début de cet ouvrage.

L’ADN de Alain est caractérisé par une base comportementale ISFJ selon l’indicateur MBTI décrit plus haut et, selon le modèle DISC Assessment 24*7, sa couleur dominante est le vert (80 %), suivie du bleu (75 %) et du jaune (40 %).

Nous avons vu dans la partie concernant l’intelligence relationnelle que Yung, Marston et de nombreux experts de la question considèrent que notre profil comportemental est inné. Notre mode naturel reste le même toute notre vie ou presque, sauf rupture majeure. Ce qui peut varier est lié à notre capacité à nous adapter aux situations données.

 

Le jeune Alain était donc d’un naturel introverti. Il éprouvait souvent le besoin de se ressourcer dans le calme, était amoureux des détails, de la précision, des choses bien cadrées, avec une légère tendance au formalisme, un souci de la méthode et de l’organisation. Les situations où il lui fallait s’exprimer, prendre la parole en public ou converser sur un sujet n’étaient pas celles où il se sentait le plus à l’aise.

 

Alain, soumis et besogneux

Alain était toujours premier ou deuxième de sa classe. Il avait le profil du bon élève besogneux par excellence, celui qui suit les règles et sait s’adapter à tout.

Quand je regarde le Alain de cette époque, avec les lunettes d’expert en comportements que j’ai aujourd’hui, je le vois comme un petit garçon non pas timide mais réservé, préférant rester dans son coin, et qui a porté beaucoup de choses dans sa besace, notamment de très grosses peurs.

 

Alain et sa crainte d’un divorce de ses parents

Alain a assisté à beaucoup trop de disputes entre ses parents, parfois même à des départs de sa mère en pleine nuit, à pied sur les routes de campagne, pour fuir son mari. Le lourd silence qui régnait souvent entre eux, les longues périodes qu’ils passaient sans échanger ont pesé sur Alain.

Cet enfant vivait souvent la peur au ventre, constamment en alerte, notamment lors des disputes. Il lui est même arriver de prier pour que ses parents restent ensemble ! Cette peur a généré en lui une profonde blessure d’abandon qui lui a longtemps collé à la peau, et qui se fait parfois encore sentir aujourd’hui !

Aujourd’hui, j’en suis conscient, je sais qu’elle va se réveiller suivant la situation que je vis, mais je n’y peux rien, ma tristesse reste là, je la subis encore. Par exemple, quand des proches quittent mon domicile ou que la famille doit se séparer, ou que nous devons quitter un lieu où nous avons passé de bons moments ensemble, les larmes me montent aux yeux. Mais maintenant, je suis capable d’évacuer cette émotion qui perle quelquefois de mes yeux pour rebondir très vite, en conscience, en me remettant dans l’action et dans de nouveaux projets. En me projetant en avant.

 

Pour ne pas aggraver les tensions au sein du couple, le jeune Alain faisait tout pour être agréable à ses parents. Il avait compris qu’ils se projetaient en lui, qu’il était leur rayon de soleil, leur boussole et leur raison de poursuivre leur vie à deux.

Les parents d’Alain, de manière très explicite pour sa mère et plus intériorisée pour son père, voulaient qu’il travaille bien en classe, qu’il soit sage, poli, qu’il les écoute. Ils voulaient cela pour son bien, pour qu’il ait une vie meilleure que la leur. Cela partait d’une bonne intention ! Ils voulaient que leur fils unique réussisse !

 

Comment l’enfant, puis l’adolescent Alain a-t-il traduit cela dans ses comportements ?

De plusieurs façons. Pour répondre à leurs injonctions, Alain devait :

• être souvent premier et avoir de très bonnes notes à l’école. Être « parfait ». Il passait donc beaucoup de temps à travailler. Très besogneux, tenace et pugnace, il voulait leur faire plaisir. Ils étaient d’ailleurs très fiers de lui quand il revenait avec des bons points ou mieux encore à l’époque, des images, qui valaient dix bons points – le summum ! Il répondait ainsi à leurs attentes. Alain avait compris qu’il était encore plus aimé quand il ramenait de bonnes notes !

• être gentil et toujours écouter et faire ce qui lui était demandé. Pour sauver ses parents de la possible descente aux enfers qu’il s’imaginait dans ses pires scénarios. Pour les sauver d’une séparation.

 

Tout cela combiné avec un père absent tout en étant présent, une mère qui l’aimait, mais qui était un tantinet castrateur et très sévère pour le bien de son fils, et l’ADN de ce dernier le portant naturellement à subir, on comprend que la situation n’était guère épanouissante pour Alain.

Sans oublier son statut de fils unique qui faisait que, tel Atlas, il portait seul le poids de la famille sur ses épaules.

 

Ce tableau n’est peut-être pas strictement conforme à la réalité mais c’était ce que le Alain de l’époque ressentait. Il s’était reconstruit sa vérité.



Quand on est enfant, il n’est pas toujours facile d’exprimer ce que l’on ressent.

Avec le recul, je pense que ce petit garçon a encaissé beaucoup de choses, au point de souffrir réellement dans son corps, notamment de fréquentes colites pendant toute son adolescence.

Est-il normal de souffrir de tels problèmes dans sa chair à l’âge de 13 ans ?

À cet âge-là, il avait déjà inconsciemment tout compris mais était dans le déni. Certainement pour se sauver et sauver ses parents. « Tout ce qui ne s’exprime pas, s’imprime ».

 

La honte d’avoir un père cordonnier !

À la rubrique « métier du père » de la fiche de renseignements à remplir en début d’année scolaire, la mère d’Alain enjoignait vigoureusement son fils de ne pas écrire « Cordonnier » mais « Artisan Bottier ». Elle avait honte du métier de son mari et il lui semblait que cette appellation était plus respectable. Cette honte, Alain l’a prise pour lui. Longtemps, il l’a conservée en lui et longtemps il a craint qu’on lui demande ce que faisait son père dans la vie.

 

Une autre honte, celle de son nom

C’est terrible, quand j’y repense ! Ce jeune Alain avait aussi honte de dire qu’il s’appelait « Manoukian », un nom qui ne sonnait pas français, dans un pays où une bonne partie de la population n’avait jamais entendu parler ni de l’Arménie ni des Arméniens. Il avait honte d’avoir à prononcer son nom de famille ! Quand il ne pouvait faire autrement, il guettait toujours d’éventuels regards moqueurs autour de lui !

 

La blessure d’injustice

Très tôt, un événement fort banal en apparence a également infligé au jeune Alain une profonde blessure d’injustice. À six ans, ses parents lui avaient promis de l’envoyer en classe de neige et il ne pensait plus qu’à cela, ravi de découvrir le ski et d’échapper un peu à son milieu familial, déjà avide d’espace et d’oxygénation ! Jusqu’au moment où il fallut payer pour ce séjour. Et là, pas d’argent ! Alain ressentit une grande tristesse de se voir privé de ces vacances que ses parents lui avaient promises. Pour lui, une promesse devait être tenue ! Alors qu’il faisait tout pour être « gentil » et se conformer à ce qu’on attendait de lui, il n’était pas récompensé. Dans son for intérieur, il ressentit une profonde injustice. Il aurait pu se rebeller mais ce n’était pas son ADN. Et quand il le faisait, il était tout de suite vertement recadré par sa mère qui pouvait se montrer très dure dans ces moments-là. Avec l’apprentissage de l’injustice, le jeune Alain a aussi fait celui de la résilience.

Cette injustice, Alain l’a aussi ressentie pour son père, à sa place, avec et pour lui.

Elle faisait souvent place à la tristesse. Le soir, après le dîner, son père avait l’habitude de sortir les billets de la recette de la journée et de compter les billets. Quand la recette était bonne, sa mine était réjouie.

Mais le plus souvent, une chape de plomb s’abattait sur lui et son visage devenait gris.

Alain ressentait cette tristesse dans ses tripes ! Il aurait voulu l’aider. Il ne pouvait rien faire. Rien du tout. Si ce n’est lui ramener de très bonnes notes de l’école et se comporter en enfant modèle !

 

Une colère refoulée

Parfois aussi Alain ressentait de la colère envers son père, en constatant qu’il ne faisait pas d’effort pour sortir de son isolement, mais elle aussi se transformait très vite en tristesse.

Tristesse de le voir enfermé dans son monde, tristesse de le voir subir les choses plutôt que de se mettre en marche pour apprendre à lire, à écrire, pour prendre du temps pour son fils et passer plus de temps avec lui. Alain aurait aimé l’aider mais l’ego de son père ne l’aurait pas supporté. Il avait choisi sa vie.

Plus tard, j’ai compris que son éducation avait marqué mon père à jamais et qu’il n’a jamais interrogé les valeurs qui lui avaient été inculquées. « Travail, travail, travail ! » Il n’a jamais pris de recul sur cette injonction. Et il s’est oublié, en oubliant du même coup les autres, au premier rang desquels sa femme et son fils, et en oubliant de vivre.

 

Mais où était le véritable Alain dans tout ça ?

Le véritable Alain était là et avait envie de joie, de vie, de fantaisie, de légèreté, de confiance, de générosité, de folie, de partages !

Il avait envie de découvrir le monde. Au fond de lui, cet Alain était plein d’énergie.

Mais il ne le savait pas. Ou plutôt, il le savait mais ne le disait pas, ne voulait pas le montrer pour rester loyal envers son milieu et respecter la souffrance qu’il ressentait chez ses parents.

 

Gratitude

Avec le recul, j’ai appris à comprendre que mes parents avaient fait ce qu’ils avaient pu avec ce qu’ils avaient. Le milieu familial et culturel dans lequel ils avaient été élevés les avait façonnés pour la vie. Je sais qu’ils m’ont aimé et protégé en me projetant dans une vie meilleure.

J’ai appris à ne plus être dans le jugement envers eux. Leur intention était noble : ils voulaient me donner une bonne éducation, pour me permettre d’accéder à une autre vie que la leur. Et pour cela, je les remercie. Ils ont réussi.

Petit à petit, je me suis mis à les accepter tels qu’ils étaient. Aujourd’hui, chaque fois que la colère, la tristesse ou le jugement m’accaparent, ce qui de plus en plus rare, je les chasse grâce à l’acceptation rendue possible par ma prise de recul.

Je me dis : « Ils ont fait de leur mieux avec ce qu’ils avaient. » Je les accepte comme ils sont. Ce sont mes parents.

 

À vous !

À sa majorité, d’où partait Alain, d’après vous ?

 

Clairement, il répondait à l’injonction « Sois parfait ».

Il était très exigeant avec lui-même et avec son entourage.

Il parlait très peu.

Il n’avait aucune conviction et très peu de culture.

Il avait très peu confiance en lui.

Il se cherchait encore, et sa crise d’adolescence, c’est bien plus tard qu’il l’a faite, à l’âge de 30 ans. Rappelez-vous de tout ce qu’il avait refoulé dans son enfance et son adolescence, au prix de crises de colites…

Il avait très peur de s’exposer, de dire ce qu’il pensait, ce qu’il ressentait.

Et quand enfin il s’exposait, il surjouait !

Il était dans le registre du sauveur… Il préservait ses parents pour ne pas leur faire de la peine. Il n’était pas sincère envers eux pour ne pas avoir à leur dire qui il était vraiment : tout simplement qu’il était naturellement différent d’eux ! Il voulait leur épargner une déception. Par crainte de les décevoir, il ne voulait pas se confronter à eux en se libérant.

Il n’exprimait aucun sentiment, aucune émotion.

Il souffrait sans le savoir d’un sentiment d’injustice et d’abandon.

 

Fort heureusement, ce jeune Alain avait quelques espaces d’oxygénation quand il sortait du cadre familial. Il retrouvait sa joie de vivre, son énergie, sa curiosité, dans la joie, le partage, l’apprentissage permanent, l’ouverture, la générosité et un peu de la folie naturelle aux adolescents.

Il avait en lui une soif de découvrir, une saine curiosité de comprendre et de chercher une issue. La preuve en est qu’à seize ans, il s’est fait offrir le Traité pratique d’analyse du caractère de Gaston Berger ! Un titre prémonitoire compte tenu de ce qu’allait devenir sa vie… ou peut-être simplement le besoin de comprendre ce qu’il vivait et qu’il ne parvenait pas à nommer !


Alain MANOUKIAN

Roger DUBUS

DIRECTEUR des RESSOURCES HUMAINES en Management de transition disponible Mars 2025 sur un rayon 100 km autour de Lille jusqu'en Région Parisienne si les frais de vie & déplacement pris en charge en plus du TJM

1 mois

Alain MANOUKIAN bonjour, merci pour le partage, dans un autre registre on est pas responsable de la tête que l'on a mais de la tête que l'on fait, bonne continuation, et bon dimanche, Roger 😉

Christine-Anne Chevry

Founder & CEO EXPAND SAS Consulting and Non-Executive Board Member / Aerospace & Defense ExperConnect / European Citizen

1 mois

Merci Alain de ce témoignage, j’ai lu et relu ton ouvrage, Quelle fantastique leçon de vie ! Quelle inspiration ! On comprend toute la puissance du #Coaching.

Emeline Millet

Senior Coach EMCC, Coach Gallup, certifiée DISC & forces motrices, Hypno Coach, Formatrice (QUALIOPI), Heart52 - "Cœur Vaillant", LE JEU pour apprendre performance et résilience : une croissance synonyme de bien-être

1 mois

Merci Alain MANOUKIAN pour ton partage et la confiance. Oui, notre mode de fonctionnement unique et nos comportements reflètent notre parcours de vie, avec nos blessures. Mais heureusement c'est vrai, nous ne sommes jamais "seuls" au monde.

Sylvie Poulain Langlois

Coach Professionnelle certifiée ACC ICF / coach du collectif Osez /consultante RGPD Déléguée régionale de Bretagne SPS - Soins aux professionnels de la santé

1 mois

Merci pour ce partage Alain MANOUKIAN ça donne envie d'en savoir plus et de se procurer ton ouvrage. Ça me donne envie aussi de m'atteler à la relecture du mien pour enfin clôturer un chapitre de vie !

Abdel GALLOUL-PONAMA

Dirigeant associé chez My Success Way

2 mois

Merci pour cet extrait Alain!

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