Elections :la reconnaissance en politique
HENRI GUAINO: L'homme blessé
Irrespect, amertume, déception, les commentaires n'ont pas manqué pour qualifier la réaction de Monsieur Henri GUAINO après sa défaite à Paris. Ce dernier a en effet déclaré au sujet du corps électoral, exceptions faites bien sûr de ses propres électeurs : « L'électorat qui a voté aujourd'hui dans la 2e circonscription de Paris est, à mes yeux, à vomir»... «Vous m'entendez bien, à vomir», ... «Entre les bobos d'un côté, qui sont dans l'entre-soi de leur égoïsme... Et puis il y a cette espèce de bourgeoisie traditionnelle de droite. Celle qui va à la messe, qui amène ses enfants au catéchisme et qui après, vote pour un type qui pendant trente ans s'est arrangé, a triché par tous les moyens...». Si l'allusion à Monsieur FILLON semble claire pour certains, le regret d'une certaine époque pour Monsieur GUAINO est bien présent : «Il y avait des MESSMER, des CHABAN, des DEBRE, l'héritage du gaullisme, des SEGUIN, des PASQUA... Maintenant, on se retrouve avec les gens que vous voyez, qui, franchement, ne méritent pas le respect».
Voilà des mots qui ont le mérite de répondre à l'angélisme ambiant, à la vague dite populaire et irrépressible du mouvement « En marche » et au bien mal-nommé « renouveau politique » . Cette diatribe soulève d'ailleurs avec acuité trois problèmes de notre système politique.
D'abord, certains élus n'ont malheureusement de parlementaire que le titre. Jadis, être parlementaire était une fonction peu rémunérée, elle est désormais devenue une profession aux solides avantages, parfois exercée avec compétence et vertu, parfois utilisée à des fins personnelles. Mais croire que le changement de titulaires à l'assemblée va changer fondamentalement la nature humaine semble relever de l'utopie tout comme le changement de ministres ne traduit pas, loin s'en faut, la fin des affaires.
Ensuite, s' il est souvent question du statut de l'électeur et même de la probabilité de son vote, il est rarement souligné la fonction de l'électeur dans notre démocratie actuelle. Le titulaire du droit de vote, longtemps électeur d'un programme destiné à la durée, est devenu parfois un consommateur de mesures ponctuelles et de produits médiatiques. Si la consommation est un facteur important pour l'économie, la notion de client s'accommode mal avec l'ambition politique d'un Etat .
D'où, sans doute, la virulence avec laquelle le député parisien s'est exprimé pour commenter le brevet de bonne conduite à usage européen conféré à un candidat de la majorité présidentielle. Par ce choix, des électeurs de droite, entre autres, n'ont accordé aucune considération pour le bilan de plusieurs années exercé par un « ancien » député.
Ce manque d'adhésion, de connaissance ou de reconnaissance pour le travail accompli n'est d'ailleurs pas un cas isolé puisque un tiers des parlementaires quitte en ce moment la vie politique, ce qui ne s'est jamais produit sous la cinquième République.
En somme, plus profonde est la blessure et plus grande est la virulence de la riposte, Monsieur GUAINO est un homme blessé. Il y a des passions françaises comme des histoires d 'amour qui finissent mal. Quand le courage politique et la sincérité de l'un se heurtent à l'affairisme et à l'opportunisme de l'autre , l'aveu d'un échec comme d'une tristesse n'en est que plus courageux.