L’Interview sans filtre de FABIEN GALTHIE à la veille de Ecosse-France

L’Interview sans filtre de FABIEN GALTHIE à la veille de Ecosse-France

Bonjour Fabien !

Tout d’abord merci Fabien d’accepter cet entretien ! N’étant pas journaliste sportif de profession, ni ancien joueur de rugby, je suis d’autant plus reconnaissant de vivre ce moment de confidence.  Mes questions seront sincères et dénuées de toute bienveillance envers le monde du rugby, vous teniez cher Fabien au respect de cette liberté de parole.

A deux jours du match Ecosse-France à Murrayfield, le match doit certainement revêtir pour vous une saveur particulière car il marquera votre 9ème année à la tête de l’équipe de France de rugby, un record qui ne peut pas vous laisser indifférent je suppose ?

FABIEN GALTHIE

En tant que sélectionneur de l’équipe de France depuis presque une décennie, je suis effectivement comblé dans mon parcours d’entraineur et mon parcours d’homme. J’ai la chance d’avoir eu le temps pour construire une relation de confiance durable avec le staff, les joueurs, et a famille du rugby dans son ensemble.

MOI

Fabien ! Un match Ecosse-France va se jouer samedi à Murrayfield, votre 9ème tournoi avec des chiffres qui donnent le tournis : 75% de succès pour 106 matchs joués, c’est là aussi un record, comment faites-vous pour maintenir une stat .aussi haute ?

FABIEN

Le rugby, c’est le reflet de la vraie vie..pas de trucage, ou vous gagnez ou vous perdez, moi je gagne très souvent car je ne laisse pas prise à l’incertitude, le rugby est un sport de combat qui se gagne par de la stratégie.

MOI

Qualifié de stratège « haut perché », vous déstabilisez justement la plupart des journalistes sportifs par la complexité de votre projet de jeu et de vos choix tactiques, mais s’il vous plait revenons au match de samedi, pouvez-vous nous en dire plus sur le plan de jeu souhaité pour contrer des Ecossais avides de revanche après la déculotté de 40 pions à la dernière coupe du monde en Australie.

FABIEN

Vous faites bien de revenir sur ce match car il est un bon baromètre de notre niveau de performance.  Nous nous battons avec l’Ecosse à tour de rôle, les écossais sont entrés depuis 4 années dans le top 6 des meilleures nations du monde et ils ne lâchent rien facilement !

J’ai cependant un plan de jeu pour samedi que j’ai nommé « Epervier » : j’ai remarqué que les écossais attaquaient en escadron de trois joueurs, alors pour les faire déjouer, j’ai demandé à mes gars de monter en ligne serrée et tous ensemble façon épervier (nom de jeux d’enfants en cours de récréation), histoire de faire pression en bloc compact.  Vous savez, nous ne faisons rien au hasard dans nos matchs…

MOI

Vous voulez dire Fabien qu’à chaque match, vous mettez en place un plan spécial ?

FABIEN

Tout à fait ! Nous avons commencé lors de la coupe du monde en France avec ce que j’ai appelé « La dépossession permissive » : moins de passes mais plus de jeu au pied dans un esprit de libre arbitre, reconnaissez que sans cet arbitre neozed, nous aurions été champion du monde !  Ensuite et sur les deux années suivantes, de 2024 à 2026, j’ai échafaudé avec mon nouveau staff, la stratégie que j’ai appelé « l’intensité combattue », c’est à dire être capable  de produire plus d’Ampère sur chaque zone de combat, chaque joueur disposant a cette intention, d’un Ampèremètre miniature connecté  à un capteur d’impacts capable de traduire la force mise dans l’impact.  Contre les irlandais lors du premier tournoi en 2024, mes gars se sont emmêlés les pinceaux dans les consignes en comprenant qu’il fallait ET jouer « la dépossession » ET permettre « l’intensité combattue », les irlandais ont cru au piège dans un premier temps car ils recevaient des ballons à répétition sans avoir combattu pour les obtenir….

En 2025, j’ai pris la décision de brouiller les pistes en vue de préparer nos gars à la coupe du monde en Australie de 2027.  Je savais que cette coupe du monde serait « post-moderne » ou ne serait pas,  le principe étant de réaliser des choses simples et compliquées simultanément,  des passes en aveugle mêlées de courses sans ballons afin de générer un nuage de points aléatoires, son nom de code :  « Le franchissement Colin Maillard ».  Je les ai tous bluffé au pays des marsupiaux du moins en phase de poule cf. la douche Ecossaise, car ensuite en quart contre les Australiens a domicile, nous avons perdu 3 gars sur une collision malencontreuse entre nous, mes gars avaient tenté une combinaison jugée pourtant imprenable sur ordinateur, mais notre gratteur en chef s’est trompé de sens après avoir fait trois tours de toupie sur lui-même secoué par un avant Australien, déréglant ainsi le plan préparé.  C’était pourtant une action d’essai, mais après et avec 3 cadres Premium en moins, ce fut la déroute ! Vraiment dommage car l’intention stratégique y était.

MOI

Fabien ! Vous êtes devenu en quelques années le sélectionneur « le plus Tech » des nations de rugby, j’ai lu que vous aviez un partenariat exclusif avec la société américaine Palantir technologies, spécialisée dans l’IA, pouvez-vous nous en dire plus sur ce partenariat ?

FABIEN

Le rugby est un sport qui mobilise 30 acteurs sur un terrain de 100 sur 70 M, soit 7000 M2. 2 familles de joueurs composent une équipe de rugby : les avants et les arrières, mais au-delà de cette organisation de base, j’ai remarqué qu’une sous organisation prédominait dans le rugby moderne : les prévisibles et les imprévisibles, en d’autres termes, ceux qui tracent des droites et ceux qui tracent des courbes. Alors ma grande idée, c’est de faire en sorte que sur un même plan de jeu, les droites et les courbes participent au même dessin. Pour y parvenir, vous devez en tant qu’entraineur, réduire les biais de trajectoire tout en optimisant le rendement des courses ; Jouer au rugby, c’est faire cohabiter des petits et des grands, des rapides et des lents, des leaders et des suiveurs, encore une fois, c’est le simple reflet de la vie en société et de la lutte des classes.  Mon projet ,il est simplement de pousser les dominés à devenir dominants afin que toute l’équipe enracine durablement une graine de dominant.  Gagner 75 % de match de rugby, c’est manier avec tact les lois de l’épigénétique afin de faire perdurer la transmission de nouveaux codes de jeu.  Alors si vous me demandez ce que je laisserais dans l’histoire du 15 de France, c’est l’espoir pour chaque joueur de performer selon les lois de la servitude involontaire : Servir la destinée collective du groupe par-dessus tout en restant à la place qui est invariablement la sienne.

MOI

Mais en quoi Fabien, les data interviennent sur ce dessein collectif ?

FABIEN

9 années en tant que sélectionneur, c’est 108 matchs mais derrière ces 108 matchs de 80 minutes, ce sont plus de 1000 jours sur des terrains de rugby sur lesquels évoluent 400 joueurs de haut niveau seulement en France.  Le déplacement d’un joueur est si rapide aujourd’hui qu’il faudrait augmenter la taille des terrains de 30 % pour garder la capacité de franchissement des joueurs de l’ère Fouroux.  Alors à défaut de toucher au terrain, on manie les scénarii de jeu et les combinaisons possibles. Un match de rugby est une partie d’échec alors quand vous savez qu’il existe (30×30)40 parties d’échecs possible, soit environ 10 puissance 120 (un 1 suivi de 120 zéros), imaginez le champ des possibles en rugby…alors je me fie plus que jamais aux data car les data seront toujours plus performants que 15 joueurs. 

MOI

Si je vous suis, vous expliquez notre rang de 6ème nation mondiale grâce aux Data ? N’est ce pas dévaloriser votre rôle de stratège ?

FABIEN

Bien au contraire, Après notre défaite en France en 2024 en raison d’erreurs d’arbitrages, mon raisonnement fut de ne pas faire reposer un match sur un jugement humain, mais sur des raisonnements statistiques et probabilistes.  Mon bilan après ces 9 années est éloquent : 1 finale et une demie finale de coupe du monde, 1 grand chelem de tournoi, 3 fois 2ème et 4 fois 3ème, 25 tests matchs gagnés sur 36 joués, je fais mieux que Jacques Fouroux

MOI

D’accords mais a l’échelle d’un pays comme la France qui possède par habitant peut-être, le 2ème plus grand nombre de licenciés de rugby au monde, être classée 6ème nation n’est-ce pas décevant ?

FABIEN

Vous vous trompez d’angle de vue, la force d’une nation sportive n’est plus son classement en instant t mais sa propension à inspirer le monde grâce à l’innovation en matière de nutrition, de sommeil, de coaching mental, d’expériences transverses, de big data.  Antoine Dupont a été plébiscité 4 années meilleur joueur du monde, tout sauf un hasard ! ...De même que les bleuets ont été champions du monde à trois reprises sur la même période. 

Le rugby ne sera jamais comme le football, le handball, le basket ou le volley, certes, nous avons été champion du monde dans ces 4 sports olympiques, mais je vais vous dire un truc :

"Le rugby a été inventé par des classes élitistes pour se permettre de ressembler au bas peuple mais en se fixant des codes qui ne les feront jamais ressembler au bas peuple.   Je pense que c’est pour cela que je fais l’affaire en tant que sélectionneur : je suis le gardien du temple !"

Ayant échoué en tant qu’entraineur au Stade Français, à Montpellier, et à Toulon, je démontre que l’échec conduit inexorablement au succès, qui sait apprendre de ses erreurs se bonifie.

MOI

Très clair et très honnête de votre part de me confier votre ressentis sur votre parcours !

Pour finir, qui auriez-vous souhaité être si vous aviez été footballeur ?

FABIEN

Au risque de vous paraître prétentieux, j’ai toujours eu beaucoup d’admiration pour ric Cantona car je le rejoins sur sa philosophie de vie en général.  Je garde en mémoire deux de ses phrases inspirantes majeures :  

-       « Quand les mouettes suivent un chalutier, c'est qu'elles pensent qu'on va leur jeter des sardines.” Et aussi...

-       “Quand les gens parlent de toi, c'est que tu existes.” “

Du pierrot, du vrai !

Identifiez-vous pour afficher ou ajouter un commentaire

Autres pages consultées

Explorer les sujets