Pourquoi Renaissance va (très probablement) se ramasser aux élections européennes, ou le déficit d’incarnation assez désespérant de notre gouvernement

Mardi 10 avril 2024. Sur CNEWS, Marion-Maréchal et Valérie Hayer débattent ensemble sur les sujets de l’islamisme, du pacte vert, de la politique migratoire de l’Europe et de la guerre en Ukraine.

Un échange qui préfigure la grande mise en scène manichéenne des prochaines élections européennes pour un face à face homérique entre la majorité présidentielle, larguée pour le coup dans les sondages, et son ennemi proclamé le Rassemblement National, dans ce qui ressemble plus ou moins pour les Français à un référendum pour l’Union Européenne.

Ce débat était donc une occasion pour Renaissance de lancer les hostilités face au grand Satan-bis qu’est le parti Reconquête, “une extrême droite avec le sourire la jeunesse, mais qui n’en reste pas moins l’extrême droite quand-même.” D’autant plus que la crédibilité très discutable de Mme Hayer en tant que tête de liste pour la majorité présidentielle est bien documentée. 

Il s’agissait donc d’une occasion pour Mme Hayer de confronter son discours et ses idées devant un adversaire un peu moins populaire que Jordan Bardella, mais tout aussi virulent sur les questions identitaires, Marion Maréchal.

A-t-elle réussi dans sa tentative? C’est ce que nous allons voir.

F0 et déficit d’incarnation

On s’est déjà intéressé à Marion Maréchal face à Mathilde Panot. On sait le débit assuré, la voix véloce et relativement peu de sautes de registres dans la voix. En revanche, on va s’attarder sur un premier point particulier qui est la qualité de la fréquence fondamentale des deux voix. 

Dans le cas de la tête de liste Reconquête, Marion Maréchal, la fréquence fondamentale de la voix (f0) soit la fréquence la plus basse est relativement grave et régulière, donc pas vraiment d’aspérité, ou de forçage. 

Beaucoup de variations aussi dans les inflexions, sans saute de registre. 

Les consonnes sont aussi intelligibles. Il y a de la densité dans cette voix, et une assurance manifeste. 

On peut vraiment ressentir que Mme Maréchal incarne son propos. 

Du côté de Valérie Hayer, la f0 de la voix est un peu plus haute, avec des fréquences aiguës plus apparentes. Mais c’est un trompe l'œil, car il s’agit en réalité de “résonance de tête déconnectée”. Je m’explique.

La voix de Marion Maréchal, bien qu’elle soit claire, résonne bien dans la poitrine, ce qui donne l’impression qu’elle ne sort pas ou peu de sa ligne politique. On ressent non pas du sourire de sa part en l’écoutant, mais plutôt un sentiment de domination tranquille. 

En revanche, celle de Valérie Hayer ne résonne quasiment que dans la tête et semble un peu constamment coupée du corps, c’est ce que j’appelle une résonance de tête déconnectée.

La colonne d’air ne fonctionne pas. 

Cela impacte les consonnes, moins bien définies du coup, et les inflexions, moins variées. Et les hésitations qu’on peut entendre ça et là face à un discours rôdé rendent la séquence de ce débat difficile à entendre. 

On a quelqu’un qui déroule contre quelqu’un qui réfléchit à ce qu’elle va dire. 

Et le contraste entre les deux candidates est assez douloureux…

Conclusion

Ce débat illustre de mon point de vue un problème fondamental de la majorité présidentielle pour les élections européennes en général et la manière dont elle mène les affaires de la France en particulier : un terrible manque de substance, de consistance, de ligne idéologique claire et au final d’incarnation de sa candidate et de ses représentants.

Il ne faut donc pas s’étonner si un nombre croissant de Français se détache de la classe politique au pouvoir en ce moment, tant elle semble complètement déconnectée des réalités concrètes des citoyens de notre beau pays.

Déconnectée tout court.

Le débat entre Mme Maréchal et Mme Hayer est symptomatique. 

La candidate de la majorité présidentielle a des difficultés à faire entendre son point de vue. Peut-être d’ailleurs n’en a-t-elle pas finalement, contrairement à son adversaire du soir.

Et malheureusement pour elle, cela s’entend.