Le médecin traitant peut-il attester de l'état de "burn out" de son patient?
J'ai exposé dans un post récent les raisons et moyens permettant à un employeur de faire écarter un certificat médical par lequel un médecin traitant attribue une origine professionnelle à l'état de santé d'un salarié.
Venons-en à une hypothèse plus subtile, dans laquelle le médecin traitant déclare avoir reçu ou traité son patient pour "burn-out", c'est à dire pour un syndrome d'épuisement professionnel.
Une telle pièce peut contribuer à engager la responsabilité de l'entreprise. En effet, le juge peut attribuer l'épuisement professionnel à un manquement de l'employeur, soit au travers du concept de harcèlement moral, soit plus généralement au titre de l'obligation de sécurité de résultat.
Il est donc dans l'intérêt de l'entreprise de savoir si elle peut remettre en cause un certificat médical ayant conclu au "burn-out" d'un salarié.
Telles sont les raisons qui permettent à mon sens de le faire :
Premièrement, il est clair que le "burn-out" désigne une affection née à l’occasion du travail du patient (v. Zawieja et Guarnieri, Dictionnaire des risques psychosociaux, 2014, page 273, entrée « Epuisement professionnel (burn-out) »).
Les facteurs de risques énumérés par la littérature scientifique pointent tous le milieu professionnel (surcharge de travail, conflit de rôles, manque de contrôle, récompenses insuffisantes, rupture de la communauté et absence de soutien social, absence d’équité, conflits de valeurs).
Or le médecin traitant n'a pas accès à l'environnement professionnel de son patient, si ce n'est par ses propres dires.
Deuxièmement, il n'existe pas à ce jour de symptomatologie permettant de caractériser un état de burn-out. Le rapport de février 2016 de l'Académie nationale de médecine conclut que "Le terme de burn-out ne peut être actuellement un diagnostic médical."
Il est donc possible de conclure que la constatation d'un burn-out excède les constatations que le médecin est en mesure de faire.
Telle est la démarche que nous avons engagée, en parallèle d'un litige prud'homal, devant l'Ordre des médecins de Paris. La procédure a pris fin au stade de la conciliation, le médecin ayant rejoint notre analyse et rectifié son certificat.
Cette hypothèse illustre à nouveau l'intérêt d'utiliser la procédure ordinale pour éviter que des certificats irréguliers ne viennent influencer indûment le cours du procès.
Jugeons-en : dans cette affaire de 2014, la Cour de cassation confirme un arrêt d'appel ayant conclu au harcèlement moral notamment au vu "d'arrêts maladie portant les mentions d'un état dépressif secondaire dû à un « burn out » professionnel". Si ces certificats avaient été écartés, le dossier aurait peut-être pris un autre chemin.