Comment étendre la démarche RSE à l'ensemble des partenaires ?

Comment étendre la démarche RSE à l'ensemble des partenaires ?

Cette troisième matinale du Cycle Lab RSE de l’Aslog a posé les enjeux et les manières d’étendre une Supply Chain durable à l’ensemble des partenaires de l’entreprise focale. 

Avec un « Earth Overshoot day » passé du 31 décembre au 2 août, en tout juste trente ans, Valentina CARBONE Professeur HDR, (ESCP Europe) constate que la question de la création d’un cercle vertueux avec une vision à plus long terme est impérative. Il n’est plus possible d’analyser son impact environnemental et sociétal au seul périmètre de son entreprise, car la création de valeur est en grande partie externalisée.

L’adoption de la Loi sur le devoir de vigilance des sociétés mère et des entreprises donneuses d’ordre, du 27 mars 2017 est porteuse de cette idée. Celle-ci impose la construction d’un plan de vigilance pour identifier et prévenir les risques d’atteintes graves aux droits de l’homme, aux libertés fondamentales, à la santé, à la sécurité des personnes et à l’environnement. La responsabilité de la société est engagée dès lors qu’il y a un dommage et qu’elle n’a pas respecté son obligation d’établir et de mettre en œuvre un plan de vigilance.

Maitre Raphaël ROMI (LLC Avocats & Associés) précise que ces mesures consacrées par le plan doivent nécessairement englober les sous-traitants et les fournisseurs. 

La collaboration et l’accompagnement des partenaires, les indispensables prérequis pour déployer une démarche RSE tout au long de la chaîne

L’ensemble des témoignages, en particulier dans le domaine environnemental, se rejoignent sur le fait que l’entreprise donneuse d’ordre doit engager des relations de collaboration et d’accompagnement de ses fournisseurs et de ses sous-traitants.

Ainsi, attendre de ses partenaires des investissements financiers et humains pour produire écoresponsable requiert un minimum de visibilité. Des contrats courts et moins-disants ne permettent pas aux fournisseurs et aux sous-traitants de dégager suffisamment de profits et motivation pour s’engager durablement.

Frédéric ROBERT, Directeur Environnement Supply Chain chez Alliance RENAULT-NISSAN-MITSUBISHI, évoque l’importance du « Green co-engineering » avec les fournisseurs. L’entreprise et ses fournisseurs doivent éco-construire des solutions pérennes et profitables à toutes les parties pour que la RSE puisse s’étendre à tous.

Étendre la RSE à ses partenaires, c’est également imaginer de nouvelles solutions de financement

C’est le constat de Jean Christophe LAUGEE, VP Nature and Cycles Sustainability chez Danone. Cette entreprise phare dans l’agro-alimentaire collabore avec plus de 140 000 agriculteurs par jour, dont les exploitations sont de toutes tailles et présentes sur tous les continents. Toutes ne disposent pas des compétences, des connaissances et des fonds nécessaires pour évoluer vers une agriculture écoresponsable. L’entreprise focale a un rôle déterminant à jouer en matière de conseil, d’accompagnement, d’innovation et d’aide auprès de ses exploitants. 

Étendre la RSE à l’ensemble de la chaîne de production modifie le référentiel de performance des entreprises. Par conséquent, la création de fonds spécifiques d’innovation et le recours à la Finance à impact positif sont impératifs, car ils mutualisent les risques et rééquilibrent la valeur business et la valeur sociétale de l’entreprise.  

La gestion de la chaîne durable avec les fournisseurs passe aussi par l’élaboration d’un référentiel commun en matière de gestion sociale des collaborateurs

De nombreuses entreprises focales travaillent et externalisent tout ou partie de leurs activités dans des régions du Monde où les questions des droits et de la sécurité des travailleurs sont quasi inexistantes. 

Tout le monde a en mémoire, l’effondrement meurtrier de l’usine de textile au Bangladesh qui a causé plus de 1 000 morts parmi les travailleurs au Rana Plaza. Comment une société focale pourrait-elle se prévaloir d’une politique sociale vertueuse sans s’assurer que les collaborateurs des sociétés sous-traitantes travaillent dans des conditions de sécurité décentes ?

Sensible à cette question d’exigence sociale chez ses fournisseurs, H&M, Entreprise familiale Suédoise, engage des actions de longs termes en matière de droit social et de conditions de travail. Ces actions portent sur une coopération avec les fournisseurs pour leur transmettre les bonnes pratiques en matière de gestion du personnel, tels que la signature d’accords-cadres, la création de Comités nationaux et supranationaux ayant pour objectif de trouver des solutions au niveau des usines et résoudre les conflits dans le respect des salariés, la mise en œuvre de politiques de gestion des salaires et l’indispensable coopération avec les différentes Organisations Internationales du travail et les ONG locales.

Rémi CRINIÈRE, Directeur du département RSE, souligne qu’au-delà de l’accompagnement et la sensibilisation des fournisseurs à l’importance du respect d’un référentiel commun en matière de gestion sociale des salariés, l’entreprise focale doit en faire une condition sine qua non de la relation commerciale afin que les comportements vertueux puissent devenir une valeur partagée et pas uniquement des mesures d’affichage.

Étendre la RSE à l’ensemble de ses partenaires, c’est repenser son business model

Ce qui ressort, c’est le principe de « capillarité » entre tous les acteurs de la chaîne avec une responsabilité de « mentor » pour les entreprises focales.

Pour l’Oréal, il est impératif de développer une nouvelle conception du modèle économique. Inclusion sociale, performance économique, performance sociale et environnementale constituent désormais la colonne vertébrale de l’entreprise. 

Sur la base de cette matrice, la façon de produire, de consommer et d’acheter s’en trouve totalement bouleversée. Pamela Chaine, Supply Chain sustainability Lead, et Axelle Hallu, Directrice du programme solidarity sourcing précisent que la responsabilité sociétale d’un groupe comme L’Oréal est à l’aune de sa puissance d’achat.

Ce pouvoir économique les oblige. L’ambition pour l’Oréal « d’être un leader à la fois économique et sociétal », portée par son PDG, Jean-Paul Ago, illustre cette idée. Pour ce faire, le Groupe L’Oréal s’est fixé pour objectif d’avoir un impact positif d’ici 2020 sur la vie de 100 000 personnes avec un résultat à date d’environ 50 000 bénéficiaires.

En considérant, leurs façons de produire, d’acheter et de consommer comme autant de leviers d’inclusion sociale, les entreprises focales contribuent à propager et à transmettre des bonnes pratiques en matière de RSE à l’ensemble des partenaires de la chaîne. Par ailleurs, L’Oréal considère la Supply Chain comme « business driver » mais surtout comme un des leviers principaux pour l’inclusion sociale et l’environnement.

Avoir conscience de cette responsabilité, c’est également intégrer les disparités territoriales en matière de normes environnementales, de droit social et de droit du travail. Non pas, en baissant les critères en fonction des cultures et des lieux, mais en renforçant et en adaptant l’accompagnement des fournisseurs et des partenaires pour atteindre un référentiel commun.

Considérer la RSE comme source d’innovation et d’opportunité est indispensable à son rayonnement

Afin que la RSE devienne un cercle vertueux, et où chaque maillon de la chaine se l’approprie, celle-ci ne doit plus être une question subsidiaire et parallèle au développement économique des entreprises. 

Pour FM Logistic, la RSE est devenue source d’opportunité dans ses relations commerciales, sa gestion des salariés et dans ses partenariats avec les fournisseurs. Yannick Buisson, Directeur Général France et Europe de l'Ouest constate qu'en interrogeant les offres commerciales de l’entreprise au travers du prisme de la RSE, cela permet d’offrir de nouveaux services et de favoriser ainsi de nouvelles attentes chez le client.

 Chaque acteur de la chaîne, et les entreprises focales en particulier doivent réinterroger le modèle économique et la relation avec leurs partenaires. C’est à la condition d’une transformation en profondeur des actes de productions, d’achat et de partenariat, que la RSE pourra se propager durablement et concrètement à l’ensemble de la chaîne.

 La RSE est devenue un impératif pour tous.

 

 

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