Dois-je faire relire mon manuscrit avant de l’envoyer ?

OUI.

OUI, OUI, OUI.

Et si possible, pas par votre conjoint ou votre meilleur ami. Enfin, vous pouvez bien évidemment leur faire lire, mais le fait qu’ils soient vos proches ne garantit en rien un éclairage probant.

Tout d’abord, ne faites pas relire votre manuscrit par dix personnes. C’est beaucoup trop. Si vous voulez choisir des gens de votre entourage, choisissez-les bien et choisissez-en peu.

1)    Choisissez des lecteurs.

Et pas des lecteurs à la petite semaine, non. Des vrais lecteurs, ceux qui lisent au moins un bouquin par semaine, qui ne savent pas vivre sans lire, qui ont lu des classiques, qui aiment la littérature contemporaine ou les polars (si vous écrivez des polars). Des gens qui savent faire la différence entre ce qui est écrit et ce qui ne l’est pas, ce qui est intéressant et ce qui ne l’est pas, ce qui est intrigant et ce qui ne l’est pas, etc.

2)    Choisissez des gens francs du collier

… Et soyez prêts à entendre ! N’en faites pas une affaire personnelle, vous n’irez jamais loin si vous prenez les choses personnellement.

3)    Demandez-leur de mettre sur papier leurs impressions et recommandations

C’est indispensable, pas de discussion sur l’ouvrage à bâtons rompus autour d’un café. Ça oblige vos lecteurs à être davantage précis dans leur retour, et ça vous poussera à ne pas faire la sourde oreille à ce que vous ne voulez pas prendre en considération. Un livre, c’est du boulot, pas un apéro. Mais on peut boire un coup juste après une discussion sérieuse.

Évidemment, je vais prêcher pour ma paroisse et vous dire que rien ne vaut une lecture par un professionnel. Lecteur indépendant, copain éditeur, ou tout simplement moi (moment publicité), qu’importe ! En premier lieu, vous obtiendrez assurément des remarques plus probantes sur la structure, la narration, l’écriture, l’intrigue etc. En second lieu, je crois en l’approche analytique des choses : si vous décidez de payer pour savoir ce que vaut votre manuscrit, alors vous allez écouter. Certains disent que ce qui est gratuit n’a pas de valeur. C’est caricatural et extrémiste probablement, mais pas faux dans le fond.

Vous avez consacré des heures, des mois, souvent des années à un manuscrit. Vous pouvez bien vous offrir le meilleur conseil possible pour votre nouveau-né. Un copain fort en bricolage, c’est pratique pour poser une étagère. Un architecte, c’est mieux pour construire sa maison. Si vous accordez à votre manuscrit autant d’importance qu’à vos étagères, alors ayez recours à vos proches. Mais si ce texte, c’est votre maison, une partie indéniable de votre vie ces derniers temps, alors offrez-vous un véritable regard sur le sujet.

Il me tient à cœur de signaler également qu’un retour professionnel sur un manuscrit vous servira pour tous vos manuscrits. Parce qu’un professionnel va vous remettre dans les clous du B.A-BA de la narration. Et ça, cela ne sera jamais perdu. Vous avez le droit (l’obligation ? le devoir ?) d’avoir votre style, votre ton, votre signature et personne ne vous demande de rentrer dans un moule, évidemment. Mais on vous demandera toujours qu’il y ait une intrigue et pas du remplissage, de l’écriture travaillée et réfléchie, un protagoniste crédible et pas le cliché de lui-même, un style emportant et qui ne se regarde pas écrire. Si personne ne vous montre du doigt, une fois dans votre carrière d’écrivain, ce qui fonctionne et ne fonctionne pas dans un de vos manuscrits, vous allez inlassablement produire plus de la même chose. Les auteurs « connus » sont des auteurs qui ont progressé généralement de romans en romans, parce que le regard de leur(s) éditeur(s) les a entraînés à repérer leurs points forts sur lesquels miser. Vous ne progresserez pas sans autrui, car autrui à une place archi colossale dans la qualité de votre écriture. On écrit pour les autres, même si on peut se mentir à ce sujet.

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