De la tête vers le coeur

De la tête vers le coeur

Chers dirigeants,

Ma première reflexion comme fondateur de www.advisum-consulte.ch va s'adresser à votre coeur, et ce n’est pas un hasard. Car le dirigeant qui ne manage qu’avec son intellect sans laisser parler son cœur se déshumanise vite et ses actes se mécanisent, les hommes deviennent pour lui des ressources qu’il convient de gérer au mieux et non des êtres dignes qui nous font le don par leur travail de contribuer à notre projet d’entreprise. De la tête au cœur, il n’y a pourtant pas loin, tout au plus 30 cm… et cependant une vie ne suffit pas pour nombre d’entre nous à faire ce petit bout de chemin. Ceci d’abord car nous sommes le produit d’une éduction et de modes de pensées qui nous ont plus appris à habiter notre tête que notre cœur, à nous fier plus à notre raison qu’à notre intuition et nos émotions, et ceci depuis la maternelle. On cherche même à nous faire croire que cela ne se fait pas d’agir avec cœur dans le monde professionnel. La sphère économique serait comme un monde à part dans lequel nos émotions n’ont pas le droit de s’extérioriser. Illustré par le nœud de cravate que beaucoup d’entre nous serrent encore le matin devant leur glace, il nous faudrait mettre nos paroles, nos pensées, nos envies sous contrôle sous peine de ne pas réussir dans l’entreprise. Notre fonction devrait devenir toute notre identité, un rôle que nous tiendrions des heures durant derrière un masque impassible…

Mais regardons nous vivre ! Ces mêmes personnes qui se disciplinent au travail vont ensuite aller vibrer tous ensemble à un beau concert, prendre part à une équipe sportive, rejoindre une troupe de théâtre ou de musique, faire des démonstrations d’amour dans leur famille, rire aux éclats avec des amis. Le même « moi », d’un côté corseté et sous contrôle, de l’autre libre de laisser se manifester son enfant intérieur.

Revenons à ces fameux 30 cm que nous n’osons pas franchir. Pourquoi et de quoi avons-nous peur ? Pourquoi nous réfugions-nous dans la tête et dans l’intellect ? Pourquoi n’invitons-nous pas notre humanité à la table du management ? Est-ce la peur de l’autre, la peur de soi-même, ou la peur de son montrer tel que soi-même aux autres ? La volonté de tout garder sous contrôle ? Mais qu’avons-nous vraiment sous contrôle dans notre vie quand tout peut nous être enlevé du jour au lendemain ?

Il m’a fallu beaucoup de temps à moi aussi pour habiter mon cœur durant mes heures de bureau. J’ai longtemps cru que si je me montrais tel que je suis, avec mes peurs, mes limites, mes émotions, mes révoltes, mes questions, je serais alors plus vulnérable à la critique et que mes faiblesses pourraient être utilisées contre moi. Une relation professionnelle ne devait jamais partir sur le terrain de l’amitié par exemple. Et pendant longtemps j’avais du mal à exprimer avec mes émotions ce que je ressentais au contact de telle ou telle personne. Aujourd’hui la science nous dit que nous avons trois cerveaux, ou plutôt que nous avons des cellules neuronales non seulement dans notre cerveau mais aussi dans notre cœur et dans notre estomac. Et ces cerveaux décentralisés appartiennent à notre sphère animale qu’il est impossible de mettre sous le contrôle du cerveau principal. Les asiatiques mettent d’ailleurs le centre la personnalité, non dans la tête, mais dans le bas ventre, le hara. Nous ne pouvons réprimer nos perceptions, notre ressenti pour telle ou telle personne, et j’ai appris avec le temps que ces vibrations me disent toujours quelque chose de très important sur la qualité de ma relation avec la personne en face de moi. Au travail comme dans la vie, il y a des personnes qui me touchent profondément, par leur lumière, leur fragilité, leur sensibilité, et j’apprends aujourd’hui à le leur dire, et à me rapprocher d’elles pour travailler ensemble. Il y a d’autres personnes qui éveillent en moi des tensions ou un malaise, et j’essaye d’accepter ces émotions, de voir ce qu’elles me disent de moi, et – éventuellement – de faire part de ce ressenti à ces personnes si elles le souhaitent et si j’ai le sentiment que cela peut les aider à voir quelque chose d’elles.

Le livre fondateur « Reinventing Organisations » de Frédéric Laloux sur les entreprises libérées nous propose d’avoir le courage d’être nous-mêmes au travail et nous montre l’exemple de plusieurs entreprises, venant de différents pays et de différentes industries, qui ont choisi de laisser émerger une culture d’entreprise où le paraître laisse la place à la possibilité d’être soi-même. J’ai eu la chance de rencontrer Frédéric et d’échanger avec lui sur ce pari. Une vertu semble clef pour que ce type de culture s’établisse : la bienveillance de tous les acteurs. Dans mon dernier poste en tant que manager, mon département en création a connu de nombreuses difficultés au démarrage et je découvrais régulièrement des mauvaises surprises et des projets qui n’étaient pas sous contrôle. J’ai alors pris la décision, instinctive, de laisser émerger une culture du droit à l’erreur et de la vulnérabilité, en commençant par parler assez librement de mes propres limites, ignorances, ou erreurs. Ceci n’a pas mis fin aux problèmes comme par enchantement mais cela a dédramatisé les échecs et a aidé à de nombreuses prises de conscience. Et le lendemain de telle ou telle prise de parole où j’avais avoué telle ou telle faiblesse personnelle, je remarquais que j’étais toujours là, que je pouvais déposer mon masque de manager parfait, que mes collaborateurs n’avaient pas moins de considération pour moi et que nous pouvions avancer tous ensemble.  Durant ces années, je n’ai pas fait l’expérience de la malveillance à mon égard. Par contre je me suis ici ou là heurté au silence et aux masques portés par certains qui ne voulaient ou ne pouvaient laisser parler leur être en vérité.

Je vous laisse dans votre semaine avec cette belle phrase de Marie Rivier : « Ne vous imaginez pas que pour être humble il faille n’apercevoir en soi aucune faute, ce n’est pas cela. L’humilité nous les fait voir paisiblement, sans trouble ni découragement ».

Christian Petit, fondateur de Advisum Consulte, cabinet d'accompagnement des dirigeants.


Laurence Gavillet

Responsable de maison Fondation Saphir

6 ans

Tellement vrai et authentique

Jochen Peter Breuer

Leadership Team Coach 🔆 Speaker 🔆 Auteur > de 40 ans d'expérience🔆 Je vous aide à booster votre impact grâce au Leadership Énergétique. ✨ Executive Team Coaching ✨ 1 - 1 Coaching pour Dirigeants ✨ Key-Note Speaker ✨

6 ans

Authentique et inspirant. ça va droit 30 cm en dessous du cerveau. #businessishuman 

Luis Fraigedo

Senior Regulatory Affairs & Quality Assurance Medical Devices Industry

6 ans

Bel article... écrit avec du cœur

Blaise Nicolet-dit-Félix

Directeur chez Opointzéro SA

6 ans

Tellement vrai !

Kenza Majbar

Gestionnaire de projets d'infrastructure | HES Engineer | ITIL 4 & HERMES & Cisco Certified | Certified Professional Life Coach

6 ans

Oser être soi-même :)... Merci pour l'article !

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